La construction européenne entre élargissement, approfondissement et remises en question
La construction européenne est une expérience unique : une association d'États visant des buts politiques et économiques similaires et se dotant d'institutions communes au nom du principe de supranationalité. Europe des États mais aussi Europe des citoyens ont pris la forme de la Communauté économique européenne (CEE) de 1957 à 1992, puis de l'Union européenne (UE) depuis cette date et le traité de Maastricht. Plusieurs étapes, parfois accompagnées par des crises, marquent la construction européenne.
I. Les principes fondateurs de la construction européenne
Dès le lendemain de la Seconde Guerre mondiale, des hommes politiques européens, souvent issus des partis chrétiens-démocrates, cherchent un moyen de rendre la guerre impossible entre les pays d'Europe. Jean Monnet et Maurice Schumann en France, Alcide de Gasperi en Italie ou encore Conrad Adenauer en Allemagne contribuent à la fondation du Conseil de l'Europe en 1949, puis de la Communauté européenne du charbon et de l'acier (CECA) en 1951. Toutefois, la Communauté européenne de défense (CED) échoue en 1954. Les États-Unis sont favorables à ce mouvement qui ancre les pays d'Europe occidentale dans le bloc de l'Ouest. Le 25 mars 1957, le traité de Rome institue la Communauté économique européenne (CEE) : elle réunit la France, l'Allemagne de l'Ouest, l'Italie, la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg.Les États membres ont toutefois des visions divergentes sur la voie à suivre : le fédéralisme, avec la constitution d'un gouvernement commun, est la voie favorisée par les partis chrétiens-démocrates, notamment en RFA et en Italie ; le souverainisme, qui consiste à maintenir pour chaque État les plus larges attributions possibles, est soutenu par la France du général de Gaulle ; le principe de supranationalité, finalement retenu, établit que chaque État est libre d'accepter des décisions communes qui doivent être le plus consensuelles possible.
Exercice n°1
II. Les institutions européennes
Plusieurs institutions sont créées afin de garantir le fonctionnement de l'Union indépendamment de celles des États membres :
• Le Conseil européen (1974), formé des chefs d'État ou de gouvernement de chaque État membre, donne les grandes orientations des politiques menées par l'Union.
• La Commission européenne, instituée par le traité de Rome en 1957, est constituée d'un commissaire par État membre et propose le budget et les lois votées par le Parlement et le Conseil de l'Union européenne.
• Le Parlement européen, héritier de l'Assemblée générale de la CECA, prend son nom actuel en 1962. Il participe au vote des lois européennes, sans en avoir l'initiative. Depuis 1979, il est élu au suffrage universel par l'ensemble des citoyens de l'Union.
• Le Conseil de l'Union européenne, également issu de la CECA, est institué en 1957. Il est composé des ministres des États membres concernés par le sujet abordé. Il partage avec le Parlement le pouvoir législatif.
Le fonctionnement de ces institutions a permis la concrétisation de plusieurs programmes européens : Euratom pour l'énergie atomique, la Politique agricole commune (PAC) ou encore des politiques d'aides aux régions.
Exercice n°2
Exercice n°2
III. L'élargissement de l'Union européenne
La spécificité de la CEE puis de l'Union européenne est de comporter une dimension économique et une dimension politique. Le but est de favoriser la libre circulation des hommes et des biens dans l'espace européen et de développer une citoyenneté européenne, accordée à tout citoyen d'un État membre. Les États membres travaillent à une monnaie commune dès 1979, en instituant le Système monétaire européen (SME) afin de limiter l'influence du dollar.
Tout au long de leur histoire, la CEE puis l'UE ont accueilli de nouveaux États membres. Les conditions à remplir pour rejoindre les six fondateurs (France, RFA, Italie, Belgique, Pays-Bas et Luxembourg) sont politiques (être une démocratie) et économiques (satisfaire à certaines normes monétaires et de rigueur budgétaire). Dans les années 1960 et 1970, les nouveaux membres sont des États de l'Europe du Nord. L'adhésion du Royaume-Uni est refusée par le général de Gaulle, qui voit en lui un « cheval de Troie des États-Unis ». Le Royaume-Uni constitue donc, en 1960, une organisation rivale de la CEE : l'AELE, groupant dix pays européens (ils ne sont plus que quatre actuellement : Islande, Norvège, Suisse et Liechtenstein). Cependant, le départ du général de Gaulle facilite le processus d'adhésion et, en 1973, Royaume-Uni et Danemark entrent dans la CEE.
Dans les années 1980, le retour de la démocratie dans certains pays d'Europe du Sud permet leur adhésion : la Grèce en 1981, l'Espagne et le Portugal en 1986. En 1992, afin de consacrer le resserrement des liens entre les États membres, le traité de Maastricht institue l'Union européenne, qui remplace la CEE.
Avec la fin du bloc soviétique et de la logique de la guerre froide, certains pays neutres entrent dans l'Union en 1995 : l'Autriche, la Suède et la Finlande. Les anciennes démocraties populaires doivent attendre que leur économie satisfasse aux critères de convergence. En 2004, la plupart d'entre elles (Pologne, République tchèque, Slovaquie, Slovénie, Lituanie, Lettonie, Estonie et Hongrie) adhèrent à l'Union, ainsi que Malte et Chypre. En 2007, la Roumanie et la Bulgarie voient leur candidature acceptée et, en 2013, c'est à la Croatie d'intégrer l'Union, portant à vingt-huit le nombre d'États membres.
Cependant, le Royaume-Uni organise en 2016 un référendum à l'issue duquel les Britanniques se prononcent en faveur de la sortie de l'Union européenne. Pour ses partisans, le« Brexit » est lié au refus de continuer de contribuer au financement d'institutions sans que le pays reçoive un soutien proportionnel. Cette tendance s'était déjà exprimée en 1984 lorsqueMargaret Thatcher avait déclaré « I want my money back ». Les négociations sur le Brexit sont complexes et se traduisent par de nombreux retards et renégociations. Elles aboutissent à la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne le 1er février 2020.
Exercice n°3Exercice n°4
Tout au long de leur histoire, la CEE puis l'UE ont accueilli de nouveaux États membres. Les conditions à remplir pour rejoindre les six fondateurs (France, RFA, Italie, Belgique, Pays-Bas et Luxembourg) sont politiques (être une démocratie) et économiques (satisfaire à certaines normes monétaires et de rigueur budgétaire). Dans les années 1960 et 1970, les nouveaux membres sont des États de l'Europe du Nord. L'adhésion du Royaume-Uni est refusée par le général de Gaulle, qui voit en lui un « cheval de Troie des États-Unis ». Le Royaume-Uni constitue donc, en 1960, une organisation rivale de la CEE : l'AELE, groupant dix pays européens (ils ne sont plus que quatre actuellement : Islande, Norvège, Suisse et Liechtenstein). Cependant, le départ du général de Gaulle facilite le processus d'adhésion et, en 1973, Royaume-Uni et Danemark entrent dans la CEE.
Dans les années 1980, le retour de la démocratie dans certains pays d'Europe du Sud permet leur adhésion : la Grèce en 1981, l'Espagne et le Portugal en 1986. En 1992, afin de consacrer le resserrement des liens entre les États membres, le traité de Maastricht institue l'Union européenne, qui remplace la CEE.
Avec la fin du bloc soviétique et de la logique de la guerre froide, certains pays neutres entrent dans l'Union en 1995 : l'Autriche, la Suède et la Finlande. Les anciennes démocraties populaires doivent attendre que leur économie satisfasse aux critères de convergence. En 2004, la plupart d'entre elles (Pologne, République tchèque, Slovaquie, Slovénie, Lituanie, Lettonie, Estonie et Hongrie) adhèrent à l'Union, ainsi que Malte et Chypre. En 2007, la Roumanie et la Bulgarie voient leur candidature acceptée et, en 2013, c'est à la Croatie d'intégrer l'Union, portant à vingt-huit le nombre d'États membres.
Cependant, le Royaume-Uni organise en 2016 un référendum à l'issue duquel les Britanniques se prononcent en faveur de la sortie de l'Union européenne. Pour ses partisans, le« Brexit » est lié au refus de continuer de contribuer au financement d'institutions sans que le pays reçoive un soutien proportionnel. Cette tendance s'était déjà exprimée en 1984 lorsqueMargaret Thatcher avait déclaré « I want my money back ». Les négociations sur le Brexit sont complexes et se traduisent par de nombreux retards et renégociations. Elles aboutissent à la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne le 1er février 2020.
Exercice n°3Exercice n°4
IV. Europe des États, Europe des citoyens : une gouvernance à construire
Afin de s'adapter à la volonté des différents États, l'Union leur laisse la possibilité d'adhérer ou non à certains accords. On parle d'« Europe à géométrie variable ». Ainsi, en 1985, les accords de Schengen ont permis d'établir un espace de libre circulation et un contrôle commun des frontières extérieures à l'Union. Toutefois, la Grande-Bretagne n'y a pas adhéré, causant des crispations autour de la question migratoire, alors que la Suisse, qui n'appartient pas à l'Union, fait partie de l'espace Schengen. La Roumanie, la Bulgarie, la Croatie et Chypre sont encore en attente de leur intégration dans cet espace. L'euro, adopté comme monnaie unique dans dix-neuf pays membres de l'Union en 2002, est un autre exemple d'une Union à plusieurs vitesses.
Afin de renforcer la dimension politique et citoyenne de l'Union européenne, le traité de Maastricht prévoit l'élaboration d'une Constitution européenne. Le projet aboutit en 2005, et plusieurs États décident de le soumettre à un référendum. On constate alors dans l'opinion un divorce entre l'Union et certains citoyens. L'Union européenne est accusée d'être une machine technocratique imposant des normes et qui souffrirait d'un déficit de représentativité. Cette idée est reprise par de nombreux mouvements souverainistes, voire populistes dans les différents pays de l'Union. Les Français et les Néerlandais rejettent le projet : il faut trouver une voie de gouvernance sans Constitution.
Le traité de Lisbonne, qui prolonge le traité de Nice de 2001, y remédie en 2009 : il prévoit que les décisions soient désormais prises à la majorité qualifiée. Le nombre de représentants par pays membre est revu de manière à ne pas désavantager les États les moins peuplés. Aujourd'hui, la question de la gouvernance économique de l'Union se pose avec une nouvelle acuité face à la crise économique liée aux confinements dus à l'épidémie de COVID-19. Les divergences entre les États et le poids de l'Allemagne au sein de l'Union constituent des défis importants.
Exercice n°5
Afin de renforcer la dimension politique et citoyenne de l'Union européenne, le traité de Maastricht prévoit l'élaboration d'une Constitution européenne. Le projet aboutit en 2005, et plusieurs États décident de le soumettre à un référendum. On constate alors dans l'opinion un divorce entre l'Union et certains citoyens. L'Union européenne est accusée d'être une machine technocratique imposant des normes et qui souffrirait d'un déficit de représentativité. Cette idée est reprise par de nombreux mouvements souverainistes, voire populistes dans les différents pays de l'Union. Les Français et les Néerlandais rejettent le projet : il faut trouver une voie de gouvernance sans Constitution.
Le traité de Lisbonne, qui prolonge le traité de Nice de 2001, y remédie en 2009 : il prévoit que les décisions soient désormais prises à la majorité qualifiée. Le nombre de représentants par pays membre est revu de manière à ne pas désavantager les États les moins peuplés. Aujourd'hui, la question de la gouvernance économique de l'Union se pose avec une nouvelle acuité face à la crise économique liée aux confinements dus à l'épidémie de COVID-19. Les divergences entre les États et le poids de l'Allemagne au sein de l'Union constituent des défis importants.
Exercice n°5
Zoom sur…
Le tunnel sous la Manche
La question du lien entre la Grande-Bretagne et l'Europe continentale est une donnée géopolitique ancienne : l'île est insérée dans le jeu des puissances européennes, mais elle doit à sa situation insulaire le fait de n'avoir jamais connu de débarquement armé venant du continent depuis le xviiie siècle. Depuis le xixe siècle, cependant, l'enjeu économique d'un lien avec le continent et le goût des défis techniques conduisent à réfléchir à la possibilité d'un tunnel sous la Manche. Le projet est lancé dans les années 1960, mais échoue à cause de la crise économique de 1973. François Mitterrand et Margaret Thatcher le relancent en 1981. L'enjeu est politique : il s'agit d'ancrer le Royaume-Uni dans l'Europe. Mais cela crée un bouleversement géopolitique majeur : le Royaume-Uni possède désormais une frontière « terrestre » (car située sous terre) avec la France. Les travaux commencent en 1986 et le tunnel est inauguré en 1994. La non-adhésion du Royaume-Uni à l'espace Schengen fait de Calais un point de blocage migratoire et un point de passage à destination des îles britanniques pour les migrants extra-européens, surtout depuis la crise migratoire commencée en 2011. Depuis le 31 janvier 2020, en raison du Brexit, le tunnel franchit désormais une frontière extérieure de l'Union européenne.L'euro : genèse, mise en place et débats
Le 1er janvier 2002, les premiers billets et pièces en euro commencent à circuler. Dès 1979, l'idée d'une monnaie commune aux États de l'Union européenne se concrétise avec la mise en place du Système monétaire européen et d'une monnaie de compte : l'ECU. En 1992, le traité de Maastricht se donne pour objectif la mise en circulation d'une monnaie commune qui prend le nom d'euro. Afin d'assurer la stabilité de cette monnaie, des critères dits « de convergence » sont adoptés pour sélectionner les pays capables d'entrer dans la zone euro. Ils doivent notamment avoir un déficit budgétaire inférieur à 3 % et un endettement inférieur à 60 % du PIB. Si certains pays ne peuvent donc adopter l'euro, d'autres comme la Suède ou le Royaume-Uni ne l'ont pas souhaité afin de conserver leur souveraineté monétaire. Le poids de ces critères, qui n'ont pas systématiquement été respectés, ainsi qu'un taux de change entre les monnaies nationales et l'euro favorisant l'idée d'une augmentation des prix conduisent certains mouvements politiques à dénoncer le passage à l'euro, que ce soit au nom du nationalisme économique ou pour s'opposer à une Union privilégiant une économie libérale. L'euro est aujourd'hui l'un des éléments majeurs du rayonnement économique de l'Union européenne dans le monde.États membres de l'Union européenne
L'Union européenne compte vingt-sept membres depuis le 1er février 2020. Le tableau suivant récapitule les dates auxquelles les États membres ont rejoint l'Union : Allemagne | 1958 | Espagne | 1986 | Italie | 1958 | Portugal | 1986 |
Autriche | 1995 | Estonie | 2004 | Lettonie | 2004 | République tchèque | 2004 |
Belgique | 1958 | Finlande | 1995 | Lituanie | 2004 | Roumanie | 2007 |
Bulgarie | 2007 | France | 1958 | Luxembourg | 1958 | Slovaquie | 2004 |
Chypre | 2004 | Grèce | 1981 | Malte | 2004 | Slovénie | 2004 |
Croatie | 2013 | Hongrie | 2004 | Pays-Bas | 1958 | Suède | 1995 |
Danemark | 1973 | Irlande | 1973 | Pologne | 2004 | | |
Exercice n°1
Quand le traité de Rome donne-t-il naissance à la CEE ?
Cochez la bonne réponse.
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Ce traité, préparé depuis la conférence de Messine, destinée à relancer la construction européenne après l'échec de la Communauté européenne de défense en 1954, donnenaissance à la CEE. Un second traité, signé le même jour, lance le premier programme européen : Euratom.
Exercice n°2
Quelle institution vote les lois qui s'appliquent au sein de l'Union européenne ?
Cochez la bonne réponse.
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Élu au suffrage universel suivant un scrutin proportionnel, le Parlement compte un nombre de députés précis pour chaque pays, mais qui siègent en groupes parlementaires transnationaux, organisés suivant les différentes familles politiques. Le Parlement européen vote les lois mais ne peut les proposer, ce pouvoir étant détenu par la Commission européenne.
Exercice n°3
Quels sont les six pays fondateurs de la CEE ?
Cochez la bonne réponse.
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Ces six pays font déjà partie, depuis 1951, de la CECA et leurs dirigeants partagent des idéaux communs qui facilitent la construction européenne et la signature du traité de Rome le 25 mars 1957.
Exercice n°4
En quelle année plusieurs pays ayant appartenu au bloc soviétique sont-ils entrés dans l'Union européenne ?
Cochez la bonne réponse.
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C'est en 2004, après plusieurs années de négociations sur les critères de convergence, que la Pologne, la Hongrie, la République tchèque, la Slovaquie, anciennes démocraties populaires, intègrent l'Union. C'est également le cas des trois États baltes (Lettonie, Lituanie, Estonie) qui étaient des républiques soviétiques membres de l'URSS.
Exercice n°5
Dans quels pays le projet de Constitution européenne est-il rejeté par référendum en 2005 ?
Cochez la bonne réponse.
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En 2005, les Français et les Néerlandais rejettent, par référendum, le projet de Constitution de l'Union européenne. Cette situation est l'expression du divorce entre l'Union et une partie des citoyens. L'Union est accusée par les partis souverainistes de favoriser les logiques libérales sacrifiant des emplois à la rentabilité et de n'être pas suffisamment représentative de ses citoyens.