Musset, On ne badine pas avec l'amour

On ne badine pas avec l'amour paraît dans La Revue des Deux Mondes le 1er juillet 1834. Il s'agit d'une commande du directeur de la revue. Mais, à ce moment de sa vie, Musset n'a guère envie d'écrire une comédie : après un voyage désastreux à Venise avec George Sand, il vient de se séparer de l'écrivaine et cette rupture est particulièrement douloureuse.
La pièce est-elle une comédie ?
Sur le plan générique, On ne badine pas avec l'amour est plus exactement un « proverbe » théâtral. Ce genre est issu d'un jeu apparu dans les salons du xviiie siècle : on choisissait un proverbe et on le faisait deviner au public par une saynète.
Structurellement, dans On ne badine pas avec l'amour, les dialogues du chœur et des « fantoches » tels que Maître Blazius et Maître Bridaine, s'opposent aux dialogues entre Perdican, Camille et Rosette. Les premiers développent la tonalité comique de la pièce, qui repose sur la rivalité entre Maître Blazius et Maître Bridaine et sur les personnages caricaturaux que sont Dame Pluche et le Baron. Les seconds, Perdican, Camille et Rosette, par leurs mensonges et malentendus, instillent une tonalité tragique.
En quoi la pièce a-t-elle une tonalité tragique ?
La pièce illustre les dangers du badinage en amour : quelques mots prononcés à la légère peuvent avoir d'irréversibles conséquences. Camille et Perdican sont rompus à l'art de la conversation et passent tour à tour par le badinage, la raillerie, le mensonge, le persiflage. À l'opposé, Rosette sait qu'elle est loin d'une telle maîtrise du langage. Pour elle, les mots d'amour peuvent se révéler aussi dangereux que des armes.
Rosette (dont le prénom possède une portée symbolique), apparaît comme une incarnation de la simplicité et de la bonté de la nature face à ces deux cousins dénaturés par la culture.
Comment Musset pointe-t-il les inégalités entre les sexes ?
Au-delà de l'orgueil qui le caractérise, le personnage de Camille pointe du doigt la différence d'éducation et de condition entre les sexes. Dans sa tirade finale, elle réprouve âprement le « métier de jeune homme », en affirmant que l'» eau des sources est plus constante que [les] larmes » de son cousin.
Or Perdican, par le piège qu'il tend à la fois à Camille et Rosette et qui provoquera la mort de cette dernière, semble ne faire que confirmer les dires de sa cousine.