La France a longtemps eu un rapport particulier avec la mer, le navigateur É. Tabarly en plaisantait : « La mer, pour les Français, c'est ce qu'ils ont dans le dos quand ils regardent la plage. » Pourtant, la France possède la 2e ZEE au monde derrière les États-Unis. Présente dans tous les océans, elle dispose d'une capacité d'action indéniable grâce à sa marine de guerre et compte de grandes figures individuelles, de Tabarly au commandant Cousteau. Dans quelle mesure l'espace maritime est-il intégré à la stratégie de la puissance française dans le cadre de la mondialisation ?
I. Une géographie maritime de la France
Le domaine maritime français s'étend sur 10,2 millions de km2, soit vingt fois le territoire terrestre ou quatre fois la Méditerranée. Grâce à ses territoires ultramarins qui composent 97 % de cet ensemble, la France est présente dans les forums régionaux de la planète, comme la Commission de l'océan Indien. Les Antilles et la Guadeloupe permettent une présence française dans les eaux américaines, la Polynésie française dans le Pacifique et les îles Kerguelen dans l'espace subantarctique. Cette dispersion du domaine à l'échelle mondiale s'accompagne de la fragmentation du territoire en archipels, notamment avec les 118 îles polynésiennes. Néanmoins, de larges parts de cette ZEE sont encore inexploitées ou mal connues, ce qui résulte d'une cartographie encore incomplète des fonds marins. Elle est également parfois mal délimitée : ainsi, les îles Éparses dans le canal du Mozambique font l'objet d'une rivalité avec les Comores, Maurice ou Madagascar.Exercice n°1
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II. L'économie maritime
Alors que les réserves d'hydrocarbures sont limitées en métropole, le domaine maritime offre des ressources fossiles importantes dont l'exploitation est rendue de plus en plus rentable par la hausse de la consommation. Des prospections pétrolières ont par exemple lieu autour de Grande Terre en Nouvelle-Calédonie. La demande accrue de métaux pour les technologies de pointe, comme le cobalt et le platine, a également relancé les recherches dans le domaine maritime. Wallis-et-Futuna offre ainsi de riches ressources encore inexploitées en raison des moyens sous-marins nécessaires, dans une très grande imbrication des enjeux civils et militaires. L'espace maritime est aussi propice au développement d'énergies renouvelables de différents types. Si les éoliennes off shore sont encore assez peu nombreuses, la France fut pionnière dans l'usage de la force marémotrice, avec l'installation d'une usine utilisant les marées pour produire de l'électricité dès 1966 en Bretagne.
Les ressources halieutiques sont également des ressources de premier plan pour l'économie française. Si le secteur de la pêche compte 16 000 marins, le nombre d'emplois induits est bien plus important, pour une valeur totale de 1,8 milliard d'euros. Cette activité n'est toutefois pas également répartie en France. La présence d'un plateau continental permet par exemple une abondance de ressources halieutiques dans le cadre de la ZEE de Saint-Pierre-et-Miquelon, tandis que son absence à la Réunion limite la présence des pélagiques (poissons les plus recherchés). Ces ressources sont soumises à de fortes pressions, dont les conséquences sont déjà sensibles dans l'océan Indien en ce qui concerne l'exploitation du thon. Une pêche illicite se développe dans les TAAF (Terres australes et antarctiques françaises), nécessitant une surveillance accrue de la part des autorités. L'exploitation de la pêche se double d'une augmentation des capacités de l'aquaculture française pour répondre à la demande. Cette facette de l'économie mondialisée permet de nouvelles perspectives de développement notamment pour les DROM (départements et régions d'outre-mer), faisant par exemple de la crevette le deuxième produit d'exportation de la Nouvelle-Calédonie derrière le nickel.
L'outre-mer français constitue de plus une réserve de biodiversité importante. La Nouvelle-Calédonie détient ainsi la deuxième barrière de corail dans le monde derrière l'Australie. Ces ensembles naturels sont aujourd'hui en danger : le réchauffement des mers est un des facteurs majeurs de la disparition des coraux.
La France dispose enfin d'une puissance industrielle navale lui permettant d'engager de grands plans de production des infrastructures, par exemple avec les Chantiers navals de Saint-Nazaire ou l'entreprise Alstom.
Les ressources halieutiques sont également des ressources de premier plan pour l'économie française. Si le secteur de la pêche compte 16 000 marins, le nombre d'emplois induits est bien plus important, pour une valeur totale de 1,8 milliard d'euros. Cette activité n'est toutefois pas également répartie en France. La présence d'un plateau continental permet par exemple une abondance de ressources halieutiques dans le cadre de la ZEE de Saint-Pierre-et-Miquelon, tandis que son absence à la Réunion limite la présence des pélagiques (poissons les plus recherchés). Ces ressources sont soumises à de fortes pressions, dont les conséquences sont déjà sensibles dans l'océan Indien en ce qui concerne l'exploitation du thon. Une pêche illicite se développe dans les TAAF (Terres australes et antarctiques françaises), nécessitant une surveillance accrue de la part des autorités. L'exploitation de la pêche se double d'une augmentation des capacités de l'aquaculture française pour répondre à la demande. Cette facette de l'économie mondialisée permet de nouvelles perspectives de développement notamment pour les DROM (départements et régions d'outre-mer), faisant par exemple de la crevette le deuxième produit d'exportation de la Nouvelle-Calédonie derrière le nickel.
L'outre-mer français constitue de plus une réserve de biodiversité importante. La Nouvelle-Calédonie détient ainsi la deuxième barrière de corail dans le monde derrière l'Australie. Ces ensembles naturels sont aujourd'hui en danger : le réchauffement des mers est un des facteurs majeurs de la disparition des coraux.
La France dispose enfin d'une puissance industrielle navale lui permettant d'engager de grands plans de production des infrastructures, par exemple avec les Chantiers navals de Saint-Nazaire ou l'entreprise Alstom.
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III. Les limites du domaine maritime français
L'environnement marin peut rendre la France vulnérable à différentes échelles. Elle est en effet dépendante des flux maritimes d'importation de pétrole brut et des gazoducs maritimes. Une déstabilisation du Moyen-Orient ou du golfe de Guinée pourrait ainsi s'avérer problématique pour son économie. La diversification des approvisionnements, notamment avec l'ouverture des exploitations en Arctique, favorise la résolution de ce problème. La situation de la France dans l'Europe lui permet en effet de contrôler des points de passage stratégiques, comme le rail d'Ouessant ou le pas de Calais. La route maritime allant des ports de la mer du Nord à la mer de Chine en empruntant le canal de Suez et le détroit de Malacca est néanmoins si essentielle pour les importations de marchandises françaises que toute crise sur cet axe pourrait avoir un impact majeur. Ainsi, après le tsunami de 2010 au Japon, l'industrie automobile française s'est trouvée en difficulté du fait de l'impossible importation de composants japonais. Des accords avec des pays riverains pour la mise en place de bases militaires, notamment aux Émirats arabes unis, et la participation à la lutte antipiraterie au large de la Somalie sont l'une des réponses de l'État aux risques encourus.La position de « Finisterre » fait de la France une porte d'entrée idéale pour l'Europe. Les infrastructures routières et ferroviaires de bonne qualité assurent un lien fort à l'hinterland. La Seine offre un très bon axe de transport des marchandises vers l'une des régions les plus dynamiques d'Europe, l'Île-de-France. Sur le littoral méditerranéen, Marseille-Fos est la porte d'entrée des hydrocarbures et un carrefour sur la route de l'Asie. Des projets d'extensions y sont en cours pour s'adapter aux nouveaux flux. Il s'agit néanmoins de parvenir à renverser une tendance : la moitié des marchandises arrivant en France sont en effet débarquées par un port étranger, ce qui fait d'Anvers le « premier port français ». C'est un fait : les ports français manquent de compétitivité face aux concurrents de la mer du Nord. Avec la conteneurisation et la mondialisation des échanges, des hubs ont été mis en place pour la redistribution des flux. Ainsi CMA-CGM a placé le sien à Malte, tandis que les ports français ne sont pas adaptés pour accueillir les plus grands navires. Ainsi, la totalité des ports français voient transiter cinq millions de conteneurs par an, quand Rotterdam atteint à lui seul un résultat de treize millions.
Zoom sur…
les océans et la stratégie militaire française
Les territoires ultramarins offrent des points d'appui tout autour du globe et fournissent à la France des relations de voisinage avec l'Australie et l'Afrique du Sud, ce qui représente un atout stratégique. L'historicité de la présence française permet d'établir une coopération militaire soutenue avec une douzaine d'États riverains de l'océan Indien. Des installations portuaires peuvent ainsi accueillir les bâtiments de la Marine nationale, mais aussi abriter des instruments de surveillance et de contrôle par des patrouilles aériennes ; la localisation de ces installations permet la maîtrise d'espaces essentiels à l'économie française dans le cadre de la mondialisation. La base navale de Djibouti permet, par exemple, de contrôler les flux empruntant la mer Rouge et le canal de Suez.De plus, la France apparaît comme la seule, avec les États-Unis, à disposer d'un porte-avions à propulsion nucléaire, ainsi que d'une présence continue de la force sous-marine de dissuasion nucléaire. La force de projection ainsi disponible fait de la France la 2e puissance navale. Néanmoins, dans un contexte de renforcement des flottes militaires dans le monde, les dépenses pour garder ce statut sont très élevées. La dispersion des DROM conduit également à une relative fragilité de la présence maritime militaire : la Nouvelle-Calédonie se trouve ainsi à vingt jours de mer des grands ports militaires que sont Brest ou Toulon.
Exercice n°2
L'industrie maritime française
À l'échelle nationale, le secteur maritime français représente 310 000 emplois pour une valeur de 52 milliards d'euros, soit deux fois le secteur aéronautique. Les domaines concernés sont très divers : la recherche océanographique, la construction navale tant civile que militaire, le tourisme littoral, le transport maritime, l'exploitation des hydrocarbures off shore, etc. Les armateurs français, en premier lieu CMA-CGM (3e transporteur mondial), comptent 1 200 navires, modernes comparés à la flotte mondiale, transportant 305 millions de tonnes et 12 millions de passagers par an. La construction française se caractérise par son excellence tant dans le domaine de la plaisance, avec le groupe Bénéteau, que dans le domaine militaire, avec le leader européen DCNS. La construction militaire constitue en effet un secteur stratégique mettant en œuvre un partenariat très fort entre quelques grands groupes industriels et l'État, pour assurer une autonomie technologique vis-à-vis des États-Unis. Les sous-marins nucléaires lanceurs d'engins sont en effet une des forces essentielles de la dissuasion nucléaire française. Avec la croissance pour tous les pays des enjeux maritimes, les exportations de matériel militaire sont en hausse, par exemple vers le Brésil ou l'Inde. Cette activité est essentielle pour certains ports français, comme Saint-Nazaire dont la vie économique est rythmée par les carnets de commandes navales.Exercice n°1
Sur combien de km2 s'étend le domaine maritime français ?
Cochez la bonne réponse.
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Le domaine maritime français s'étend sur 10,2 millions de km2, soit vingt fois son territoire terrestre.
Exercice n°2
Combien la France compte-t-elle de DROM ?
Cochez la bonne réponse.
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La France compte cinq DROM : la Guadeloupe, la Martinique, la Réunion, la Guyane et Mayotte. Elle compte également six collectivités d'outre-mer