Arrivé légalement au pouvoir le 30 janvier 1933, Adolf Hitler met en place un régime totalitaire. Comment parvient-il à contrôler la société ? Comment installe-t-il la dictature nazie ?
I. Un homme, un parti au pouvoir
• L'idéologie nazie peut être résumée par ce slogan : « Ein Volk, ein Reich, ein Führer ! » (« Un seul peuple, un seul État, un seul chef ! »). Le peuple allemand doit s'unir autour de son chef, Adolf Hitler, pour mieux assurer sa domination sur les autres peuples et conquérir un espace à sa mesure, le Lebensraum (l'« espace vital »). Hitler met en place un véritable culte de la personnalité du führer : il est au centre de tout. Ainsi peut-on lire dans certaines dictées de 1934 : « Comme Jésus a délivré les hommes du péché et de l'enfer, Hitler a sauvé le peuple allemand de la ruine. »
• Dans la nuit du 28 février 1933, un incendie détruit le Reichstag (la chambre des députés). Un ex-membre du Parti communiste, manipulé par les nazis eux-mêmes, est arrêté et accusé. Hitler prétexte cet événement pour interdire le Parti communiste, supprimer la liberté de la presse et ouvrir les premiers camps de concentration. Au Reichstag, l'arrestation des députés communistes donne de facto la majorité absolue aux nazis. Hitler reçoit les pleins pouvoirs le 23 mars et, en juillet, le Parti nazi (national-socialiste) devient parti unique : il est le seul à pouvoir présenter des candidats aux élections.
• Le 30 juin 1934, lors de la Nuit des longs couteaux, Hitler fait assassiner Ernst Röhm et d'autres dirigeants des SA qui critiquaient son attitude conciliante envers les grands industriels. Il se débarrasse ainsi d'un rival encombrant. À la mort d'Hindenburg, en août 1934, Hitler devient à la fois chancelier et président de la République. Il prend le titre de Reichsführer.
• Certains Allemands (des communistes, des socialistes, des catholiques et des protestants) tentent néanmoins de résister. Beaucoup d'artistes et d'intellectuels quittent le pays et dénoncent les exactions nazies. Parmi eux, un certain Albert Einstein…
II. La prise en main de la société allemande
• Hitler entend museler toute opposition et contrôler les esprits. Cette tâche est confiée à Joseph Goebbels, ministre de l'Information et de la Propagande. Goebbels utilise tous les moyens modernes de communication (le cinéma, la presse, la radio) pour endoctriner la population. De spectaculaires manifestations (grandes fêtes nocturnes, rassemblements militaires impressionnants) sont organisées, notamment à Nuremberg, où Hitler organise les congrès du Parti nazi, tel celui de 1934, baptisé Triumph des Willens (« Triomphe de la volonté »). Les Allemands ont l'impression que le pays fait bloc autour de son führer. De fait, le Parti nazi compte, en 1939, 5 300 000 membres.
• L'art est mis au service du régime. Les œuvres non conformes sont interdites ; les livres subversifs sont brûlés dans de grands autodafés. L'art et la culture sont nazifiés. On exalte les exploits sportifs, notamment lors des jeux Olympiques de Berlin, en 1936.
• L'État entend régir tous les aspects de la vie publique, professionnelle et privée des Allemands. La société est encadrée par le Parti : les Jeunesses hitlériennes (Hitlerjugend) enrôlent les enfants et les adolescents pour en faire des individus obéissants, disciplinés, physiquement bien entraînés, entièrement dévoués à leur führer et, pour les garçons, les éléments de futures troupes d'élite.
• Dès 1933, les opposants au régime sont traqués par les SS (de la Schutzstaffel, « escadron de protection », que l'on traduit parfois par « section de sécurité » pour conserver le « SS »), dirigés par Heinrich Himmler (qui contrôle également la police secrète d'État, la Gestapo, c'est-à-dire la police politique). Ils sont envoyés dans des camps de concentration, à Dachau par exemple. En six ans, 350 000 communistes sont ainsi arrêtés, internés et condamnés au travail forcé, dans des conditions extrêmement difficiles.
III. Le projet d'une société antisémite et raciste
• Hitler expose ses idées dans un livre programme intitulé Mein Kampf (« Mon combat ») : la société doit être dominée par une race supérieure, les Aryens. Pour assurer la pureté de cette dernière, il faut éliminer les races inférieures, en particulier les juifs et les Tziganes (Roms). Les femmes allemandes sont encouragées à fonder des familles nombreuses. Des lois sur l'eugénisme prévoient l'élimination des handicapés de la société ; les homosexuels font l'objet de mesures de répression.
• Hitler met progressivement ses idées en pratique : en septembre 1935, les lois de Nuremberg condamnent d'une peine d'emprisonnement toute union d'un(e) Aryen(ne) avec une personne juive. Les juifs ne peuvent plus enseigner ni publier. Lors de la Nuit de cristal (le 9 novembre 1938), 7 000 magasins juifs sont détruits et 26 000 juifs, arrêtés.
• Les juifs sont obligés de se signaler par le port d'une étoile jaune ; ils sont de plus en plus nombreux à être déportés dans les camps de concentration.
IV. L'Allemagne glisse vers la guerre
• Pour relancer l'économie, le régime réalise de grands travaux : construction d'autoroutes, défrichement de forêts, etc. De nombreux ouvriers sont employés dans les usines d'armement. Certes, le chômage recule, mais la population est soumise au rationnement. En 1935, le Service du travail oblige les jeunes à travailler gratuitement. Progressivement, le pays met en place une politique économique fondée sur l'autarcie (le fait de subvenir seul à ses propres besoins). En 1936, en violation flagrante du traité de Versailles, l'Allemagne met en place un programme de production massive d'armement. Son économie tourne autour de la préparation de la guerre.
• L'expansion du Reich
Hitler met en œuvre son projet politique : assurer l'espace vital de la race allemande, liquider le diktat du traité de Versailles et préparer la guerre qui permettra la conquête des ressources dont l'Allemagne a besoin. Dès 1933, l'Allemagne quitte la Société des Nations (SDN).
• En violation du traité de Versailles, l'Allemagne rétablit le service militaire en 1936. En mars 1936, les troupes allemandes occupent la Rhénanie, région officiellement démilitarisée.
• Enfin, l'Allemagne se fait des alliés : elle signe, en 1936, des accords avec l'Italie fasciste (Axe Rome-Berlin), avec le Japon et, trois ans plus tard, un pacte de non-agression avec l'URSS, le Pacte germano-soviétique.
• Hitler pratique la politique du fait accompli : il agit d'abord et se justifie ensuite. En 1938, il masse ses troupes à la frontière et fait pression sur le gouvernement autrichien. Les forces allemandes entrent en Autriche, l'Anschluss (le « rattachement ») est réalisé, bientôt massivement approuvé par la population autrichienne.
• Profondément pacifistes, la France et l'Angleterre pensent qu'il vaut mieux céder à Hitler que s'engager dans un conflit mal préparé. En 1938, Hitler réclame l'annexion du territoire tchèque des Sudètes, peuplé d'Allemands. En septembre, à la conférence de Munich, la France et l'Angleterre acceptent les exigences de Hitler et sacrifient à la paix leur allié tchécoslovaque.
• En mars 1939, l'Allemagne s'empare du reste de la Tchécoslovaquie (protectorat de Bohême-Moravie). Elle réclame ensuite la ville de Dantzig et son corridor (accès à la mer Baltique). À la suite de l'attaque allemande de la Pologne, le 1er septembre 1939, la France et l'Angleterre déclarent la guerre à l'Allemagne, le 3 septembre.