L'adaptabilité de l'organisme et ses limites


Fiche

L'organisme vit au sein d'un environnement dont les conditions sont changeantes. Lors d'une modification brutale d'un facteur de l'environnement (modification d'un caractère physico-chimique comme la température, présence d'un danger, etc.), l'organisme réagit en déclenchant un ensemble de réponses adaptatives qui lui permettent de produire un comportement répondant à la situation. L'ensemble de ces réponses adaptatives constitue un stress biologique. Lorsqu'il est limité dans le temps, il est qualifié de stress aigu. Quels sont les mécanismes biologiques permettant à l'organisme de produire des réponses adaptées lors d'un stress aigu ? Comment réagit l'organisme lorsque le stress se prolonge dans le temps ?
I. L'adaptabilité de l'organisme lors d'un stress aigu
Une perturbation de l'environnement peut constituer un agent stresseur. Celui-ci est à l'origine d'un ensemble de réactions chez l'individu, appelé stress biologique. Les réactions qu'il cause permettent à l'individu de produire un comportement adapté à la perturbation à l'origine de ce stress. Les agents stresseurs peuvent être physiques (s'ils occasionnent une contrainte importante sur le corps) ou psychologiques (s'il s'agit de situations que l'individu interprète comme dangereuses pour lui, qu'elles le soient objectivement ou non). Lors de la survenue dans l'environnement d'un agent stresseur, sa nocivité et la possibilité d'y faire face sont évaluées lors de processus cognitifs et émotionnels. Ces processus présentent une forte variabilité individuelle et sont à l'origine de la diversité des réponses selon les individus lors d'une même situation stressante.
Dès que l'agent stresseur est perçu, le système limbique est stimulé. Il s'agit de la région du cerveau contenant l'hippocampe et l'amygdale, impliquée dans les émotions, le comportement et la mémoire. Très rapidement, le système limbique module l'activité du système nerveux autonome qui déclenche la sécrétion d'hormones du groupe des catécholamines, par la glande médullosurrénale. La principale hormone qu'elle sécrète est l'adrénaline. La glande surrénale est une glande endocrine, située au-dessus de chaque rein. Elle comporte une partie centrale (appelée médullosurrénale) de nature nerveuse, qui produit les hormones catécholamines, et une partie périphérique (appelée corticosurrénale), qui produit d'autres hormones, les glucocorticoïdes.
Un peu plus tard, en présence d'un agent stresseur, la stimulation des neurones de l'hypothalamus déclenche la sécrétion de CRH (Corticotropin Releasing Hormone). La CRH agit en particulier sur l'hypophyse antérieure, une glande endocrine située sous l'hypothalamus et qui sécrète alors l'hormone ACTH (Adeno Cortico Tropic Hormone). La CRH agit ici en tant que neurohormone, car elle est libérée par les neurones de l'hypothalamus et agit sur les cellules de l'hypophyse antérieure. L'ACTH, sécrétée par l'hypophyse antérieure dans le sang, stimule la sécrétion de cortisol (hormone de type glucocorticoïde) par la corticosurrénale. La libération de cortisol, qui a lieu quelques minutes après le début du stress aigu, est donc postérieure à la sécrétion d'adrénaline.
Lors du stress aigu, l'adrénaline entraîne une augmentation du rythme cardiaque, de la fréquence respiratoire et de la libération de glucose dans le sang. Les effets rapides de l'adrénaline permettent à l'organisme d'être prêt physiologiquement à répondre à la situation à l'origine du stress. L'individu vivant ce stress aigu peut percevoir ces modifications physiologiques (notamment l'augmentation du rythme cardiaque), et peut ressentir de l'anxiété. La libération plus tardive du cortisol stimule la production de glucose à partir du glycogène, favorisant l'augmentation de la glycémie. Le cortisol a plusieurs autres actions ; en particulier, il est responsable d'une inhibition du système immunitaire caractérisée par une réduction du nombre de lymphocytes, une diminution de l'activité des certaines cellules immunitaires, ainsi qu'un effet anti-inflammatoire. De plus, le cortisol exerce un rétrocontrôle négatif sur l'axe hypothalamo-hypophyso-corticosurrénalien, en inhibant la libération de CRH par l'hypothalamus et d'ACTH par l'hypophyse antérieure. Ainsi, le cortisol contribue au retour à l'équilibre homéostatique, perturbé par les modifications biologiques dues notamment à l'action de l'adrénaline.
Les différentes voies physiologiques mobilisées lors d'un stress aigu sont donc coordonnées au sein d'un système complexe, qui fait interagir le système neveux, le système hormonal et le système immunitaire. Ce réseau d'interrelations réciproques explique l'adaptabilité de l'organisme aux conditions changeantes du milieu.
Le stress biologique aigu
L'adaptabilité de l'organisme et ses limites - illustration 1
II. L'organisme débordé dans ses capacités d'adaptation
Cette partie ne sera pas évaluée à l'épreuve écrite du baccalauréat.
Un stress chronique est la réponse de l'organisme à des événements dangereux ou déplaisants ayant lieu sur une période prolongée, et sur lesquels l'individu n'a pas de contrôle. Le stress chronique entraîne une sécrétion prolongée de cortisol. Or celle-ci provoque une diminution progressive du rétrocontrôle négatif du cortisol sur l'axe hypothalamo-hypophyso-corticosurrénalien. L'excès de cortisol conduit à des modifications structurelles du cerveau : diminution de la taille de l'hippocampe à l'origine de troubles de la mémoire, altérations neuronales du cortex préfrontal causant une diminution de l'attention, etc. Il s'agit d'une plasticité mal-adaptative, où les modifications affectant le cerveau ont des conséquences néfastes pour l'individu. Ainsi, en cas stress chronique, le système complexe de réponse au stress est débordé, ce qui engendre des dommages sur la santé physique et mentale : anxiété, dépression, troubles cognitifs comme des difficultés de concentration, des troubles de la mémoire, problèmes de sommeil mais aussi douleurs somatiques (céphalées, douleurs abdominales, etc.). Des traitements médicamenteux et non médicamenteux peuvent être envisagés pour limiter les conséquences du stress chronique sur l'organisme.
Exercice n°1Exercice n°2Exercice n°3Exercice n°4Exercice n°5
Personnages clés
Walter Bradford Cannon (1871-1945) : médecin et physiologiste américain, qui a développé le concept d'homéostasie (ensemble des réactions physiologiques qui, par des équilibres dynamiques, visent à maintenir constantes les caractéristiques internes de l'organisme) à la suite des travaux de Claude Bernard. Il a mis en en évidence la sécrétion d'adrénaline après à une émotion violente, et a travaillé sur les liens entre le psychisme et la physiologie.
Hans Selye (1907-1982) : médecin et physiologiste québécois d'origine hongroise, qui a défini la notion de stress et a proposé la théorie du syndrome général d'adaptation (suite à une agression, l'individu réagit selon 3 étapes successives : la phase d'alarme, la phase de résistance et la phase d'épuisement si la cause du stress se maintient).
Zoom sur…
Le syndrome de Cushing
Le syndrome de Cushing est un ensemble de symptômes occasionnés par un excès de sécrétion du cortisol, ayant comme origine une anomalie au niveau de la glande corticosurrénale ou au niveau de l'hypophyse. Ce syndrome se traduit notamment par une obésité de la partie supérieure du corps. Il s'agit d'une maladie rare, dont l'incidence (nombre de nouveaux cas dans une population étudiée sur un temps donné) est estimée à 1 cas par an pour un million d'habitants. Le syndrome de Cushing est une maladie grave, qui peut être mortelle mais qui, dans la très majorité des cas, peut être traitée de façon efficace, avec même une possible guérison définitive.
Les thérapies contre l'anxiété
Des médicaments peuvent être prescrits pour traiter certaines conséquences du stress, en particulier l'anxiété. Ces médicaments, les anxiolytiques (parfois appelés tranquillisants), réduisent l'anxiété mais aussi les manifestations associées, comme les troubles émotionnels et les problèmes de sommeil. Les anxiolytiques les plus utilisés sont les benzodiazépines. Elles agissent dans le cerveau sur les récepteurs au GABA, un neurotransmetteur inhibiteur présent dans de nombreuses structures cérébrales. En se fixant sur le récepteur au GABA, elles inhibent les neurones postsynaptiques. En particulier, elles inhibent l'activité de l'hypothalamus et du système limbique, lieu de l'intégration des émotions et de l'anxiété. En plus de leur effet anxiolytique, les benzodiazépines ont une action sédative, anticonvulsive et stimulent la relaxation musculaire. Mais leurs effets secondaires sont une somnolence et un ralentissement des réflexes. Leur utilisation à moyen et long terme entraîne une dépendance. Leur prescription est ainsi réservée aux cas d'urgence et doit être limitée dans le temps. D'autres pratiques non médicamenteuses (psychothérapie, relaxation, méditation, etc.) peuvent aussi limiter les effets du stress et favoriser la résilience (capacité à surmonter une situation difficile) de l'individu soumis à un stress chronique.
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