Comprendre le marché des quotas d'émission
I. Qu'est-ce qu'un marché des quotas d'émission ?
Au-delà de la réglementation, de la taxation et de la subvention, l'État dispose d'un autre moyen pour mener une politique climatique et réduire l'émission de gaz à effet de serre : le marché de quotas d'émission (ou « des droits à polluer »). L'idée du marché des quotas d'émission est née durant les années 1960 à la suite des travaux de l'économiste américain Ronald Coase (1910-2013, prix Nobel d'économie en 1991) sur les externalités.
Son principe est le suivant : l'État fixe un niveau maximal de pollution admissible sur un territoire. Par exemple, dans une petite économie imaginaire, l'État fixe à 1 000 grammes par mois la quantité totale de CO2 autorisée à être rejetée par les dix entreprises du pays. L'État attribue un droit à polluer de 100 grammes par mois à chacune des entreprises.
Il s'agit d'un marché dans le sens où une entreprise qui n'utiliserait pas tout ou partie de son droit à polluer a la possibilité de le vendre à une autre entreprise qui, elle, en aurait besoin. Par exemple, l'entreprise X ne rejette que 50 g de CO2 dans l'atmosphère alors qu'elle a droit de rejeter 100 g. L'entreprise Y, quant à elle, connaît une augmentation de son activité et doit rejeter 150 g de CO2 ce mois-ci. L'entreprise Y va donc acheter les 50 g manquants à l'entreprise X (l'échange – marchand – se fait comme sur un marché ordinaire). Ainsi, l'avantage d'un marché de droits à polluer repose sur son adaptabilité aux variations de l'activité des entreprises, qui peuvent acheter ou vendre des droits à polluer en fonction de leurs besoins.
Chaque entreprise arbitre entre la valeur du droit à polluer (qu'elle peut revendre) et le coût de la réduction de la pollution : si l'entreprise Z peut réduire complètement son émission de CO2 en achetant une nouvelle machine d'une valeur de 20 000 € et que la vente de ses 100 grammes de droit à polluer peut lui rapporter 30 000 €, elle choisira d'investir dans la machine et de vendre son droit à polluer sur le marché, enregistrant ainsi un gain de 10 000 €. Dans ce cas, le marché des droits à polluer est efficace car il a bien incité l'entreprise à réduire ses émissions de CO2.
Le prix du quota est déterminé sur le marché en fonction de l'offre (les vendeurs) et de la demande de quotas (les acheteurs). Si les entreprises prévoient de polluer davantage que la quantité autorisée qu'elles détiennent, elles achètent des quotas, provoquant ainsi une hausse de la demande. Or, toute chose égale par ailleurs, cette hausse de la demande va provoquer une augmentation du prix du quota incitant les entreprises à dépolluer davantage. À l'inverse, si les émissions réelles sont inférieures au total des quotas, le prix d'un quota se réduira :
Son principe est le suivant : l'État fixe un niveau maximal de pollution admissible sur un territoire. Par exemple, dans une petite économie imaginaire, l'État fixe à 1 000 grammes par mois la quantité totale de CO2 autorisée à être rejetée par les dix entreprises du pays. L'État attribue un droit à polluer de 100 grammes par mois à chacune des entreprises.
Il s'agit d'un marché dans le sens où une entreprise qui n'utiliserait pas tout ou partie de son droit à polluer a la possibilité de le vendre à une autre entreprise qui, elle, en aurait besoin. Par exemple, l'entreprise X ne rejette que 50 g de CO2 dans l'atmosphère alors qu'elle a droit de rejeter 100 g. L'entreprise Y, quant à elle, connaît une augmentation de son activité et doit rejeter 150 g de CO2 ce mois-ci. L'entreprise Y va donc acheter les 50 g manquants à l'entreprise X (l'échange – marchand – se fait comme sur un marché ordinaire). Ainsi, l'avantage d'un marché de droits à polluer repose sur son adaptabilité aux variations de l'activité des entreprises, qui peuvent acheter ou vendre des droits à polluer en fonction de leurs besoins.
Chaque entreprise arbitre entre la valeur du droit à polluer (qu'elle peut revendre) et le coût de la réduction de la pollution : si l'entreprise Z peut réduire complètement son émission de CO2 en achetant une nouvelle machine d'une valeur de 20 000 € et que la vente de ses 100 grammes de droit à polluer peut lui rapporter 30 000 €, elle choisira d'investir dans la machine et de vendre son droit à polluer sur le marché, enregistrant ainsi un gain de 10 000 €. Dans ce cas, le marché des droits à polluer est efficace car il a bien incité l'entreprise à réduire ses émissions de CO2.
Le prix du quota est déterminé sur le marché en fonction de l'offre (les vendeurs) et de la demande de quotas (les acheteurs). Si les entreprises prévoient de polluer davantage que la quantité autorisée qu'elles détiennent, elles achètent des quotas, provoquant ainsi une hausse de la demande. Or, toute chose égale par ailleurs, cette hausse de la demande va provoquer une augmentation du prix du quota incitant les entreprises à dépolluer davantage. À l'inverse, si les émissions réelles sont inférieures au total des quotas, le prix d'un quota se réduira :
• offre de quotas < demande de quotas le prix du quota augmente ;
• offre de quotas > demande de quotas le prix du quota baisse.
Le marché des quotas d'émission est en effet un marché « ordinaire » soumis à la loi de l'offre et de la demande.
Pour remplir son objectif de réduction d'émissions polluantes, l'État peut réduire chaque année le plafond global autorisé. En donnant un prix à la pollution, le marché des quotas d'émission permet donc « d'internaliser l'externalité » en obligeant les entreprises polluantes à prendre en compte le coût de la pollution qu'elles génèrent.
Pour remplir son objectif de réduction d'émissions polluantes, l'État peut réduire chaque année le plafond global autorisé. En donnant un prix à la pollution, le marché des quotas d'émission permet donc « d'internaliser l'externalité » en obligeant les entreprises polluantes à prendre en compte le coût de la pollution qu'elles génèrent.
II. Un exemple réel de marché des quotas d'émission : le SEQE
En 2005, l'Union européenne a mis en place un marché des quotas d'émission pour réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) : le système d'échange de quotas d'émission (SEQE), pour les entreprises qui consomment beaucoup d'énergie (dans les secteurs de la cimenterie, la sidérurgie, la production d'électricité, etc.). Il concerne aujourd'hui plus de 10 000 établissements dans tous les pays de l'UE (+ le Liechtenstein, la Norvège et l'Islande) et constitue le plus grand marché de quotas d'émission au monde.
Une réduction des émissions de CO2 grâce au marché de quotas d'émission européen (en millions de tonnes, Mt, et en %)
Source : ecologique-solidaire.gouv.fr. |
Ce document montre que, depuis la mise en place du SEQE en 2005, les émissions de CO2 se sont réduites de manière significative dans l'Union européenne puisqu'elles sont passées de 2 377 millions de tonnes en 2003 à 1 748 millions de tonnes en 2016, soit une baisse de 26,4 %. La France et le Royaume-Uni (qui a décarbonisé son secteur électrique) ont respectivement baissé leurs émissions de 34,6 % et de 46,4 % sur cette période.
Ces chiffres montrent que le SEQE est efficace : il permet de réduire les émissions de CO2 dans l'Union européenne.
Ces chiffres montrent que le SEQE est efficace : il permet de réduire les émissions de CO2 dans l'Union européenne.
Les limites d'un marché des quotas d'émission
Ce système présente néanmoins des limites. D'abord, la réduction des émissions de CO2 n'a lieu que dans les cas où elle est peu chère. Dans les autres cas, les entreprises choisiront de continuer à polluer. Par ailleurs, sa mise en place est difficile dans la mesure où le « juste niveau » de droit à polluer pour toute l'économie ne doit pas être trop faible pour ne pas décourager l'activité économique et ne doit pas être trop élevé pour avoir un effet réel sur la pollution. Par exemple, l'UE a accordé un niveau trop élevé de droits à polluer lors de la création du SEQE, conduisant ainsi à une forte chute du prix moyen du quota, celui-ci passant de 20,6 € en 2005 à 13,1 € en 2009. Depuis 2017, le prix du quota connaît une hausse importante et se situe désormais aux alentours de 25 € la tonne.Enfin, la mise en place d'un marché des quotas d'émissions dans un espace géographique donné peut inciter les entreprises à délocaliser leur production vers des zones ou des pays dans lesquels il n'en existe pas.
Zoom sur…
Les externalités, une défaillance du marché
Les externalités désignent les conséquences positives ou négatives de l'activité économique sur le bien-être d'autres individus ou sur le bien-être de la société tout entière. Une externalité (ou un effet externe) est nommée ainsi car il s'agit d'une « fuite » en dehors du marché dans la mesure où elle n'est pas prise en compte par les agents économiques, elle est « extérieure » au marché. L'analyse économique a démontré que les agents économiques ont tendance à « surproduire » les externalités négatives (une usine de produits chimiques ne prend pas spontanément en compte les déchets qu'elle rejette et ne se soucie pas de les réduire). En ce sens, elles constituent une défaillance de marché. Les économistes considèrent le changement climatique ou plus généralement la pollution comme une externalité négative.Zoom sur…
L'initiative Science Based Targets : lorsque les ONG et les entreprises s'associent contre le réchauffement climatique
En 2015, l'ONG WWF, Carbon Disclosure Project, le think tank WRI et le Global Compact des Nations unies ont lancé l'initiative Science Based Targets (iSBT). Son objectif est d'inciter les entreprises privées à s'engager à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. En décembre 2019, 285 grandes entreprises ou groupes aux activités extrêmement diverses adhèrent à ce projet. On peut citer par exemple : Nike, Gap, Levi Strauss & Co, Puma, Asics, Marks & Spencer, H&M. Une trentaine d'entreprises françaises se sont engagées auprès de ce dispositif : Veolia Environnement, Danone, L'Oréal, Atos, PSA, etc.Selon un rapport d'impact, ces 285 entreprises rejettent actuellement 752 millions de tonnes de CO2 dans l'atmosphère (soit plus que la France et l'Espagne réunies) et pourraient réduire de 35 % leurs émissions (soit 265 millions de moins) si elles remplissent les objectifs qu'elles se sont fixés et qui ont été validés par l'iSBT.
Chiffres clés
Les émissions de CO2 dans le monde
Selon la base de données EDGAR (base de données pour la recherche sur l'atmosphère planétaire, gérée par la Commission européenne), les émissions de CO2 ont augmenté de 60,2 % dans le monde entre 1990 et 2015. Il est intéressant de remarquer qu'elles ont continué à augmenter aux États-Unis (+3,4 %) tandis que les émissions françaises ont baissé de manière significative (−14,1 %). On constate donc que tous les pays développés n'ont pas connu les mêmes évolutions en termes d'émission de CO2.Par ailleurs, les chiffres indiquent qu'elles ont explosé en Chine et en Inde sur la période 1990-2015 (respectivement +364,1 % et 278,3 %). Ces pays connaissent en effet des taux de croissance économique très élevés et la production de richesses matérielles en plus grand nombre implique davantage d'émissions de CO2. L'enrichissement et le développement enclenchés par ces pays pourront probablement permettre à leurs gouvernements respectifs d'agir à l'avenir pour ralentir, voire réduire leurs émissions de CO2.
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