Quels sont les caractéristiques contemporaines et les facteurs de la mobilité sociale ? (à l'écrit les années impaires)
Fiche
Un individu peut changer de profession (mobilité professionnelle) ou de lieu de résidence (mobilité géographique), mais c'est surtout la mobilité sociale intergénérationnelle qui intéresse les sociologues. Il s'agit du changement de position sociale d'un individu par rapport à sa position sociale de naissance. Par exemple, un fils d'ouvrier devenant cadre connaît une mobilité sociale intergénérationnelle ascendante. À l'inverse, un enfant issu des professions intermédiaires qui devient ouvrier connaît une mobilité intergénérationnelle descendante (ou un déclassement). Les sociologues utilisent des tables de mobilité pour étudier la mobilité sociale intergénérationnelle.
I. Mobilité observée, taux de mobilité et mobilité structurelle
L'enquête FQP (Formation, qualification professionnelle) 2014-2015 indique que, sur les 10 920 000 actifs âgés de 30 à 59 ans ayant un emploi ou anciens actifs ayant eu un emploi, 6 920 000 occupent un groupe socioprofessionnel différent de leur père. Ce chiffre correspond à la mobilité observée. Nous pouvons en déduire que 4 000 000 d'individus occupent le même groupe socioprofessionnel que leur père : ils sont dits « immobiles » et incarnent la reproduction sociale. On peut dès lors calculer le taux de mobilité, c'est-à-dire la part des actifs mobiles dans le total des actifs âgés de 30 à 59 ans : (6 920 000/10 920 000) × 100 = 63 %. Ainsi, nous pouvons constater que la mobilité sociale intergénérationnelle est le cas le plus courant.
La mobilité observée peut s'expliquer de différentes manières. Tout d'abord, une partie des individus change de groupe socioprofessionnel car ils y sont obligés compte tenu de l'évolution de la structure des emplois proposés (par exemple, certains enfants d'agriculteurs ont dû changer de groupe car le nombre d'emplois proposés dans le secteur agricole s'est considérablement réduit). Cette composante de la mobilité sociale s'appelle la mobilité structurelle.
Une autre partie des individus connaissent une mobilité sociale pour d'autres raisons que l'évolution de la structure des emplois : réussite scolaire, efforts, etc. Les sociologues appellent cette mobilité la mobilité nette.
La mobilité observée peut s'expliquer de différentes manières. Tout d'abord, une partie des individus change de groupe socioprofessionnel car ils y sont obligés compte tenu de l'évolution de la structure des emplois proposés (par exemple, certains enfants d'agriculteurs ont dû changer de groupe car le nombre d'emplois proposés dans le secteur agricole s'est considérablement réduit). Cette composante de la mobilité sociale s'appelle la mobilité structurelle.
Une autre partie des individus connaissent une mobilité sociale pour d'autres raisons que l'évolution de la structure des emplois : réussite scolaire, efforts, etc. Les sociologues appellent cette mobilité la mobilité nette.
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II. Comment expliquer la mobilité nette ?
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La mobilité sociale ascendante passe le plus souvent par la réussite scolaire et le niveau de formation : un individu diplômé a davantage de chances d'occuper une position sociale plus élevée que celle de ses parents. La massification scolaire a néanmoins provoqué une « inflation des diplômes », de sorte que tous les diplômés n'occupent pas nécessairement une position supérieure à leurs parents bien qu'ils soient plus diplômés. C'est ce que les sociologues appellent le « paradoxe d'Anderson ». Les sociologues Stéphane Beaud et Marie Duru-Bellat ont montré que le lien étroit entre diplôme et emploi en France provoque une sorte de compétition scolaire « au plus diplômé » pour augmenter les chances de mobilité sociale ascendante.
La mobilité sociale peut également s'expliquer par les ressources et les configurations familiales. Le sociologue français Pierre Bourdieu (1930-2002) a montré l'importance des ressources dont dispose une famille pour expliquer la réussite ou l'échec scolaire et, partant, la mobilité ou la reproduction sociales. Si le capital économique a son importance, Bourdieu insiste notamment sur le capital culturel : naître dans une famille disposant d'un capital culturel important optimise les chances de réussir à l'école et donc de connaître une mobilité sociale intergénérationnelle ascendante.
La mobilité sociale peut également s'expliquer par les ressources et les configurations familiales. Le sociologue français Pierre Bourdieu (1930-2002) a montré l'importance des ressources dont dispose une famille pour expliquer la réussite ou l'échec scolaire et, partant, la mobilité ou la reproduction sociales. Si le capital économique a son importance, Bourdieu insiste notamment sur le capital culturel : naître dans une famille disposant d'un capital culturel important optimise les chances de réussir à l'école et donc de connaître une mobilité sociale intergénérationnelle ascendante.
La configuration familiale, c'est-à-dire le « type » de famille (composée d'un couple et d'enfants, monoparentale, recomposée, parents divorcés, etc.) a également une influence sur la mobilité sociale dans la mesure où elle a des incidences sur la réussite (ou l'échec) scolaire. Par exemple, avoir des parents divorcés ou peu présents augmente les probabilités d'échec scolaire, même pour les enfants issus de milieux sociaux favorisés. On parle parfois de « méshéritiers » pour désigner ces enfants « bien nés » mais qui sont en situation d'échec scolaire et qui connaissent donc généralement un déclassement.
III. La notion de fluidité sociale
Les sociologues ont introduit la notion de fluidité sociale pour compléter l'étude de la mobilité sociale. Il s'agit de calculer des rapports de chances relatives (ou odds ratio), c'est-à-dire l'inégalité relative des probabilités d'accéder à un groupe entre deux fils de deux groupes socioprofessionnels différents et ce, indépendamment des variations de la taille de ces groupes. La fluidité sociale mesure ainsi la mobilité de manière relative indépendamment des différences de structure entre origine et position sociale.En 1993, les chances d'être « cadre ou professions intellectuelles supérieures » plutôt qu'ouvrier étaient 40,9 fois plus fortes pour un fils de cadre que pour un fils d'ouvrier. En 2003, ce « odds ratio » est de 28,8. La société est donc plus fluide. Il ne faut donc pas confondre « mobilité sociale » et « fluidité sociale » car une société plus mobile n'est pas nécessairement plus fluide.
Ainsi, les études sociologiques montrent que, si la mobilité sociale est désormais le cas majoritaire, la fluidité sociale n'a, elle, que peu progressé. Une société plus mobile n'est pas nécessairement plus fluide.
IV. Exemple de calcul d'odds ratio
La table de destinée issue de l'enquête FQP de 2014-2015 montre que sur 100 fils de cadres, 47 sont devenus cadres et dix sont devenus ouvriers. Un fils de cadre a donc 4,7 fois (47/10) plus de chances d'être cadre que d'être ouvrier. La même année, sur 100 fils d'ouvriers, 9,4 sont devenus cadres et 47,6 sont devenus ouvriers, le rapport est donc ici de 0,20 (9,4/47,6), cela signifie qu'un fils d'ouvrier a 0,20 fois plus de chance de devenir cadre plutôt qu'ouvrier (ou si l'on retourne le raisonnement : il a 5 fois plus de chance de devenir ouvrier que de devenir cadre). Une fois ces deux calculs de chances relatives effectués, il suffit de diviser le premier par le second : 4,7/0,20 = 23,5.Exercice n°1Exercice n°2Exercice n°3Exercice n°4Exercice n°5
Zoom sur…
Le lien entre la configuration familiale et la réussite scolaire
| Situation familiale | |||
| Père et mère | Famille monoparentale | Famille recomposée | Ensemble |
Scolarité élémentaire | ||||
Ayant redoublé à l'école élémentaire | 14,2 | 24,0 | 23,1 | 16,5 |
Scolarisés en Segpa1 à la rentrée 2007 | 2,0 | 3,9 | 3,9 | 2,5 |
Ayant atteint la médiane en français à l'évaluation nationale de sixième | 52,7 | 41,0 | 42,7 | 50,0 |
Ayant atteint la médiane en mathématiques à l'évaluation nationale de sixième | 54,5 | 39,9 | 43,5 | 51,3 |
Scolarité après 4 ans d'études secondaires | ||||
Ayant redoublé au collège | 8,4 | 15,2 | 14,4 | 10,3 |
Ayant obtenu le brevet 4 ans après leur entrée en sixième | 89,2 | 77,0 | 83,5 | 86,8 |
Ayant atteint la médiane en français aux épreuves terminales du brevet | 51,5 | 40,8 | 44,5 | 49,1 |
Ayant atteint la médiane en mathématiques aux épreuves terminales du brevet | 53,3 | 34,1 | 41,3 | 49,0 |
Ayant atteint la seconde générale et technologique sans redoublement | 62,6 | 42,8 | 46,6 | 57,5 |
Lecture : 14,2 % des élèves vivant avec leurs deux parents sont parvenus en sixième en ayant redoublé au moins une fois à l'école élémentaire ; 24,0 % des élèves vivant en famille monoparentale sont dans ce cas.
Champ : élèves entrés pour la première fois en sixième dans un collège public ou privé de France et n'ayant pas changé de situation familiale au cours des quatre premières années d'études secondaires.
Segpa : une classe Segpa (section d'enseignement général et professionnel adapté) accueille les jeunes de la sixième à la troisième ne maîtrisant pas toutes les connaissances et compétences attendues en fin de primaire.
Source : Ministère de l'Éducation nationale, panel d'élèves 2007 du second degré, 2012.
Ce document montre le lien entre la situation familiale et la situation scolaire. Tous les chiffres convergent pour montrer qu'un enfant réussit mieux à l'école lorsque ses parents vivent sous le même toit. À l'inverse, les enfants vivant au sein de familles monoparentales ou de familles recomposées connaissent tendanciellement une scolarité plus difficile. Par exemple, le taux national de redoublement au collège est de 10,3 %, cela signifie qu'en moyenne un enfant sur dix redouble une classe au collège. Ce taux n'est que de 8,4 % pour les enfants vivant avec leur père et leur mère tandis qu'il monte à 15,2 % pour les enfants vivant dans des familles monoparentales, soit presque deux fois plus.
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