La fin de la Seconde Guerre mondiale et les débuts d'un nouvel ordre mondial


Fiche

Alors que, le 8 mai 1945 en Europe et le 2 septembre 1945 en Asie, s'achève le conflit le plus meurtrier de l'histoire, qui a frappé profondément les civils comme les militaires et qui a été marqué par des crimes de masse et la politique d'extermination nazie, les deux grands vainqueurs – les États-Unis et l'URSS – négocient pour imposer un nouvel ordre international. Toutefois, malgré la naissance de l'Organisation des Nations unies (ONU) et la volonté de punir les crimes commis par les puissances de l'Axe, les tensions entre les deux grands conduisent rapidement à une rupture et à ce que l'on a appelé la guerre froide. De 1945 à 1948, les bases d'un nouveau monde sont posées.
I. Le bilan de la guerre
Le bilan de la Seconde Guerre mondiale est sans précédent. Il explique à la fois le traumatisme lié à ce conflit et le bouleversement géopolitique qu'il constitue.
La guerre a causé la mort de 60 millions de personnes. Pour la première fois, le nombre de civils tués est supérieur à celui des militaires. Les morts ont été causées à la fois par les combats entre armées, les opérations de représailles des forces occupantes, les bombardements de terreur contre des cibles civiles et la politique d'extermination nazie. Cette dernière a causé à elle seule 6 millions de morts. Certains États ont été particulièrement touchés, comme l'URSS, qui compte plus de 20 millions de morts à la fin du conflit.
Le bilan matériel est tout aussi désastreux. De nombreuses villes européennes et asiatiques ont été rasées par les bombardements aériens, comme Londres dès 1940, ou encore Berlin à partir de 1943. L'appareil industriel, quoique mieux préservé, a aussi été profondément atteint, causant une diminution importante de la production en Europe et en Asie orientale. Les infrastructures de transport, ponts et voies ferrées, sont aussi touchées.
Du point de vue moral, la guerre pose la question de la responsabilité des démocraties qui, avant la déclaration de guerre, ont cédé face aux totalitarismes. La politique nazie d'extermination des juifs, des Tziganes, des homosexuels et des personnes handicapées a été facilitée par les gouvernements collaborateurs installés dans plusieurs pays d'Europe occupés. Les bombardements atomiques d'Hiroshima et Nagasaki les 6 et 9 août 1945 montrent la responsabilité des hommes devant une nouvelle arme aux capacités destructrices infiniment supérieures à celles des armes conventionnelles.
Exercice n°1
Zoom sur…
Le programme du CNR
Le 15 mars 1944, le Conseil national de la Résistance adopte à l'unanimité un programme destiné à préciser les grandes lignes de l'action politique à mener dans le pays une fois l'occupant chassé et la légitimité républicaine rétablie. Le programme s'organise en plusieurs axes :
• unité du pays autour du CNR sous l'autorité du général de Gaulle ;
• définition du rôle des Forces françaises de l'intérieur et institution de Comités départementaux de libération ;
• organisation de l'épuration en châtiant les collaborateurs.
Outre ces mesures liées à la fin du conflit, certaines concernent la République et précisent son rôle au niveau social et économique :
• rétablissement des libertés ;
• nationalisation des entreprises dans certains secteurs stratégiques ;
• hausse des salaires ;
• instauration d'une sécurité sociale.
La plupart de ces éléments mis en œuvre sous la IVe République ont contribué à ancrer l'idée républicaine. Toutefois, l'unanimisme politique du CNR, associant les gaullistes, les chrétiens-démocrates et les forces de gauche, se rompt très rapidement, entre 1946 et 1947.
II. Un nouvel ordre international
La fin du conflit voit émerger de nouveaux rapports de force entre les nations. Si les puissances européennes déclinent, les États-Unis et l'URSS s'affirment comme les nouvelles superpuissances.
Pendant le conflit, les Alliés réfléchissent à la mise en place d'un nouvel ordre international qui puisse garantir la paix. Les États-Unis, après deux décennies d'isolationnisme, sont décidés à participer activement à ces nouvelles institutions. La conférence de Yalta a lieu en février 1945. Elle est dominée par les États-Unis et l'URSS, la France n'ayant pas été invitée et la Grande-Bretagne y tenant un rôle de second plan. Le président américain Franklin Roosevelt parvient à imposer son idée d'une Organisation des Nations unies, fondée lors de la conférence de San Francisco, le 26 juin 1945. L'ONU, dirigée par un secrétaire général, comporte une assemblée générale à laquelle participent cinquante et un États, et un Conseil de sécurité dans lequel les cinq principales puissances, dont la Chine, disposent d'un droit de veto sur les décisions. L'organisation peut soutenir une coalition militaire pour venir en aide à un État membre victime d'une agression ou mettre en place une force d'interposition dans le cas d'une guerre civile.
Conscients du rôle de la crise de 1929 dans l'arrivée au pouvoir du nazisme et dans la marche à la guerre, les Alliés souhaitent établir une gouvernance monétaire mondiale. À l'issue de la conférence de Bretton Woods, en 1944, le dollar devient la seule monnaie convertible en or, au taux fixe de 35 dollars l'once. Toutes les autres monnaies sont convertibles en dollar et ne doivent pas varier de plus ou moins 1 % par rapport au taux fixé. En 1947 a lieu le premier round du GATT (General Agreement of Tariffs and Trade) destiné à stabiliser les échanges commerciaux.
Dans la plupart des pays, on demande davantage de justice sociale. Le programme du Conseil national de la Résistance, publié le 15 mars 1944, jette les bases, en France, d'une politique fondée sur une solidarité nationale renforcée (sécurité sociale, retraites).
Afin de punir les responsables des atrocités commises pendant le conflit, le droit international dispose de la notion de crime contre l'humanité, qui apparaît dans la Charte de Londres en 1945. De grands procès sont organisés contre les principaux dignitaires nazis et japonais. Du 20 novembre 1945 au 1er octobre 1946, lors du procès de Nuremberg, vingt-quatre responsables nazis sont jugés et douze sont condamnés à mort. En 1946 s'ouvre le procès de Tokyo, pendant lequel sont jugés vingt-huit chefs militaires et politiques japonais dont sept sont condamnés à mort.
Exercice n°2Exercice n°3
III. Les tensions entre les deux superpuissances
Au sein de ce nouvel ordre international, les rapports de force entre puissances sont toutefois prépondérants. Les États-Unis, qui n'ont pas connu la guerre sur leur sol, ont développé un appareil industriel sans précédent, et les forces armées américaines sont présentes en Europe et en Asie. La plupart des pays engagés dans le conflit se sont endettés auprès des États-Unis, et ils disposent également d'un monopole nucléaire jusqu'en 1949, date de l'explosion de la première bombe atomique soviétique.
L'URSS dispose de son côté, avec l'Armée rouge, d'une puissance militaire considérable en Europe, dont elle occupe la partie est, où elle annexe de nombreux territoires. La présence de partis communistes dans les pays d'Europe occidentale, coordonnés depuis 1947 par le Kominform, lui donne une influence politique planétaire.
Lors de plusieurs conférences, les principales puissances tentent de trouver un accord sur la manière d'organiser la sortie de la guerre. À Yalta, en février 1945, on s'accorde sur la mise en place d'élections libres dans les pays libérés, ce qui, compte tenu de la présence de l'Armée rouge en Europe de l'Est, accroît l'influence soviétique. À Potsdam, en juillet 1945, le sort de l'Allemagne est décidé : le pays est divisé en quatre zones d'occupation (américaine, soviétique, britannique et française), de même que sa capitale, Berlin.
Des tensions apparaissent rapidement entre les deux superpuissances. Dès 1946, Churchill a évoqué un « rideau de fer » coupant l'Europe en deux. Outre la rivalité idéologique, la question du sort de l'Europe libérée, et surtout de l'Allemagne, est déterminante. En 1947, les Alliés occidentaux décident d'unifier leurs zones d'occupation et d'y créer une monnaie. En représailles, en juin 1948, Staline décrète le blocus de Berlin-Ouest, qui constitue une enclave dans la zone d'occupation soviétique en Allemagne. Les Alliés décident de la ravitailler par un pont aérien. En mai 1949, Staline doit céder, mais l'Allemagne est divisée avec la création de deux États : à l'ouest, la République fédérale d'Allemagne (RFA) ; à l'est, la République démocratique allemande (RDA). Dans les autres pays d'Europe occupés par l'Armée rouge, les Soviétiques favorisent l'arrivée au pouvoir des partis communistes en éliminant progressivement les autres partis. En Tchécoslovaquie, où les démocrates se maintiennent au pouvoir, Staline organise un coup de force, le « coup de Prague », le 25 février 1948, forçant le président Benes à nommer un Premier ministre communiste. Seule la Yougoslavie, dirigée par le maréchal Tito, constitue un pays communiste libre de l'influence soviétique, car il n'a pas été libéré par l'Armée rouge.
La bipolarisation s'accentue et aboutit en 1947 au début de la guerre froide. Le 12 mars 1947, le président américain Harry Truman énonce la doctrine de l'« endiguement » du communisme, à laquelle répond le secrétaire général du Kominform, Andreï Jdanov, par une doctrine de lutte contre l'impérialisme américain. L'aide Marshall, constituée d'importants financements, proposée par les États-Unis en juin 1947, montre quels États acceptent de se ranger dans le camp occidental.
Exercice n°4Exercice n°5
Zoom sur…
Le coup de Prague
En janvier 1948, le seul pays occupé par l'Armée rouge en Europe de l'Est dans lequel un régime communiste n'est pas encore en place est la Tchécoslovaquie. Toutefois, la démocratie y est fragile, compte tenu des pressions exercées par les communistes et le poids de l'occupant soviétique. En 1947, le gouvernement libéral avait accepté l'aide Marshall, avant d'être obligé de la refuser. Le parti communiste envisage, comme dans les autres futures démocraties populaires, d'agir suivant la « tactique du salami » visant à éliminer les forces de droite puis les forces de gauche non communistes. Le gouvernement est alors dirigé par le communiste Klement Gottwald, mais comporte surtout des libéraux. Le président Edvard Benes, par crainte de Staline, n'empêche pas que, le 17 février 1948, le parti communiste lance une campagne d'arrestation de militants politiques, de journalistes et de militaires opposés à ses idées. Le 25 février, les ministres non communistes démissionnent. Le nouveau gouvernement, porté par des élections organisées dans un contexte de pression de la part des communistes, transforme le pays en démocratie populaire, sur le modèle stalinien. Le coup de Prague marque la fin du dernier espoir de démocratie en Europe de l'Est et constitue l'achèvement de la construction du bloc communiste.
IV. Les tensions aux Proche et Moyen-Orient
Des tensions apparaissent au Proche-Orient. En Palestine, les Britanniques souhaitent mettre fin au mandat qui leur avait été confié par la Société des Nations à la fin de la Première Guerre mondiale. La situation est tendue entre les populations palestiniennes et les juifs, qui souhaitent disposer d'un État, comme cela leur avait été promis en 1917 par la déclaration Balfour. L'ONU établit en 1947 un plan de partage selon lequel Jérusalem devient une ville internationale sous contrôle de l'ONU. Le 14 mai 1948, Israël proclame son indépendance. Le lendemain, les États arabes voisins l'attaquent. Après la victoire d'Israël, les territoires qui auraient dû constituer l'État palestinien sont partagés entre Israël et les États arabes voisins. La Jordanie prend le contrôle de la vieille ville de Jérusalem et de la Cisjordanie, qui devient ainsi l'un des enjeux des conflits israélo-arabes.
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