Le prix : entre raison et illusion ?
Fiche
Le prix est une variable importante pour le consommateur et pour l'entreprise. Différentes options de politiques tarifaires s'offrent aux entreprises et les choix faits doivent être en cohérence avec les objectifs stratégiques qu'elles se sont fixés (cible, objectifs commerciaux, objectifs financiers). La fixation du prix obéit à des logiques rationnelles (coûts subis et marge voulue par l'entreprise, prix cible), mais également irrationnelles (gratuité, services publics). De plus, certains achats (la plupart du temps utiles) sont raisonnés, d'autres sont plus impulsifs (achats plaisir ou cadeau) et souvent ne relèvent pas toujours de la raison.
1. La notion de prix
Le prix est la variable du marchéage (ou marketing mix) la plus rapide à modifier et qui conditionne le plus le chiffre d'affaires de l'entreprise.
Rappel : Le marchéage répond aux quatre questions suivantes : quel produit ? À quel prix ? Comment communiquer sur le produit ? Comment le distribuer ?
La politique de prix désigne l'ensemble des décisions et actions nécessaires pour déterminer la structure et le niveau de la tarification des biens et des services proposés aux consommateurs.
L'entreprise fixe ou change les prix en fonction de différentes situations auxquelles elle fait face (lancement du produit, accélération des ventes, accroissement de la concurrence, etc.).
Dans le processus de fixation des prix, l'entreprise est donc soumise à des :
• contraintes internes : liées aux coûts et à la capacité de production de l'entreprise, ainsi qu'à la cohérence interne de sa politique commerciale (prix en adéquation avec l'image et la qualité du produit) ;
• contraintes externes : liées à la demande, à la concurrence, à la distribution et à la réglementation des prix.
2. Les politiques tarifaires
2.1. Le prix unique
Quel que soit le type de client ou la situation d'achat, le prix proposé est le même. Cette stratégie privilégie la clarté et la simplicité. Elle pose néanmoins la limite de la maximisation du profit, car certains clients sont prêts à payer davantage le produit. Cette pratique n'exclut pas les modulations de prix lors de promotions. Cette méthode n'est adaptée que quand les clients sont homogènes. Elle est facile et pratique à mettre en œuvre, mais ne tient pas compte de la diversité des consommateurs. (Ex. : produits alimentaires.)
2.2. Le prix différencié (ou tarifs multidimensionnels)
Cette politique de prix consiste à proposer plusieurs prix pour un même bien ou service selon la situation. Elle permet de s'adapter à la diversité des consommateurs. (Ex. : place de cinéma pour enfants, étudiants, etc.)
Les prix peuvent varier en fonction, par exemple, de la quantité commandée, de la qualité des clients (commerçant, particulier, étudiants), du canal de distribution emprunté (sur place ou à emporter), etc. Cette politique est très adaptée à une clientèle hétérogène, mais la diversité des prix proposés peut créer de la confusion dans l'esprit des consommateurs. C'est une politique complexe à mettre en œuvre (risque d'erreurs).
2.3. Le prix forfaitaire
Cela consiste à proposer un prix pour un ensemble de prestations ou de biens afin de favoriser la vente de davantage de produits (la formule « déjeuner rapide » qui comprend un sandwich, une boisson et un dessert). Pour recevoir un accueil favorable, le prix forfaitaire doit être inférieur à la somme des prix de chaque produit pris indépendamment. Cette politique est adaptée aux clients particulièrement en attente d'un budget clair (ex. : forfait téléphone portable.).
2.4. La gestion des capacités (appelée yield management)
Afin d'optimiser le chiffre d'affaires, de plus en plus d'entreprises adaptent le prix de vente de leurs services aux fluctuations de la demande (transport ferroviaire, aérien, hôtellerie, cinéma, etc.). Cela peut cependant entraîner une confusion dans l'esprit du consommateur à cause de la diversité des prix (ex. : SNCF).
Les facteurs de choix de cette stratégie sont :
• une segmentation pointue de la clientèle (en fonction de l'âge : tarifs étudiants ; de la fréquence d'achat : tarifs pro ; de la situation d'achat : tarifs pour réservation sur Internet, par exemple) ;
• un secteur d'activité de services ayant un processus de réservation et une capacité d'offre limitée ou contrainte (par exemple, 400 places dans un train, 100 places dans un restaurant, etc.).
Exercice n°1
Exercice n°1
2.5. La gratuité
Elle est de plus en plus utilisée par les entreprises pour rendre leur offre globale plus attirante. En effet, la généralisation du numérique a conduit les entreprises à proposer certains services gratuitement (logiciels, contenus médias, etc.). Cette stratégie tarifaire a généralement un coût indirect pour le consommateur, car l'entreprise répercute souvent cette gratuité sur d'autres services. Elle peut néanmoins être financée par la publicité d'autres enseignes.
Les différents modèles de gratuité
• L'offre freemium qui combine la gratuité (« free ») et le positionnement haut de gamme (« premium »). Au départ, il y a une prestation gratuite, mais pour bénéficier de tous les avantages de l'offre, le consommateur devra payer (ex. : Deezer).
• Le marché tripartite (trois parties) : l'offre gratuite aux internautes (jeux, informations par exemple) est financée par la publicité, les entreprises louent des espaces publicitaires sur des moteurs de recherche.
• La vente de données : un site, un jeu, un blog, etc. peuvent vendre les données personnelles des utilisateurs à une entreprise.
• Les subventions croisées directes : la gratuité d'un bien est compensée par la nécessité d'acheter des produits complémentaires indispensables (ex. : imprimante gratuite, cartouches d'encre à un prix fixé avec une forte marge).
• Les subventions croisées indirectes : le principe est de permettre la gratuité à certains utilisateurs en faisant payer ceux qui acceptent de payer (ex. : les sites de rencontre sont quasi exclusivement financés par les hommes).
• Le don : les services gratuits sont financés par des personnes sans contrepartie (ex. : Wikipédia).
3. Les méthodes de fixation des prix
La fixation des prix nécessite la prise en compte de plusieurs éléments qui ne sont pas exclusifs entre eux, mais complémentaires.
3.1. La prise en compte de la demande
La sensibilité-prix (ou coefficient d'élasticité) permet de mesurer l'impact d'une modification du prix sur le volume des ventes. Le consommateur interprète le prix selon ses caractéristiques psychologiques et son environnement social. Par conséquent, un changement de prix influencera son comportement d'achat. L'analyse de l'influence de la variation du prix sur le volume de la demande est au cœur de la réflexion mercatique.
Logiquement, lorsque le prix baisse, la demande augmente. La sensibilité-prix permet ainsi de déterminer dans quelle proportion s'effectue cette relation. En fonction de cette sensibilité, l'entreprise fera varier le niveau de prix de ses produits.
Le coefficient d'élasticité E se calcule et s'analyse de la manière suivante :
E = variation de la demande / variation du prix
= (demande 2 − demande 1) / demande 1 = (prix 2 − prix 1) / prix 1
• Si E est positif, le prix et la demande varient dans le même sens ; si E est négatif, alors le prix et la demande varient en sens inverse.
• Si E = 0, l'élasticité est nulle ; une variation du prix n'a aucun impact sur la demande.
• Si E est compris entre − 1 et 1 donc proche de 0 : l'élasticité est faible ; la demande est peu sensible au prix.
• Si E <− 1, ou E > 1, la demande est très élastique et est sensible aux variations du prix. Dans ce cas, l'entreprise a tout intérêt à jouer sur les prix afin de stimuler la demande.
Le prix cible correspond au prix visé par l'acheteur. Une fois ce prix connu par l'entreprise, au moyen d'une étude de marché, l'entreprise cherchera à adapter ses coûts afin de dégager les marges visées. La démarche de fixation de prix est donc inversée. Le prix cible est souvent exprimé TTC. Il faut calculer le prix cible HT afin de déterminer la marge et le coût de revient.
Exercice n°2
Exercice n°2
3.2. La prise en compte des coûts
Le coût de revient
Cette approche vise à connaître le coût de revient d'un produit, qui est le seuil minimum pour la fixation du prix de vente, car une entreprise a un but lucratif.
L'entreprise doit calculer son coût de revient afin de définir les marges à appliquer et donc son prix de vente.
Rappel du programme de SDGN de 1re
S'il s'agit d'une entreprise industrielle, elle devra calculer son coût de production qui se compose du coût d'achat des matières premières + tous les frais de production (main-d'œuvre, énergie, etc.). S'il s'agit d'une entreprise commerciale, on parlera alors de coût d'achat des marchandises.Ainsi :
coût de revient = coût de production + coût de distribution
Donc coût de revient + marge = prix de vente HT.
Par déduction, la marge commerciale peut se calculer :
marge commerciale = prix de vente HT − coût de revient HT.
Le taux de marge correspond ainsi à la part de la marge exprimée en pourcentage du coût de revient.
Donc taux de marge = (marge / coût de revient HT) / 100
Exercice n°3
Le seuil de rentabilité
Ici, on distingue les coûts fixes et les coûts variables :
Les coûts fixes (frais généraux tels que le loyer) ne varient pas en fonction du niveau d'activité.
| Quantité : Q | Valeur unitaire : VU | Total | en % du CA |
---|---|---|---|---|
chiffre d'affaires (CA) | | | Q × VU | 100 % |
− coûts variables (CV) | | | Données sujet | |
= marge sur coûts variables (MSCV) | | | CA − CV | taux de marge sur coûts variables (TMSCV) = MSCV ×100 / CA |
− charges fixes (CF) | | | Données sujet | |
= résultat (bénéfice ou perte) | | | A − (CV + CF) | |
Les coûts variables dépendent du volume produit (les matières premières, par exemple).
Cette approche permet de calculer le seuil de rentabilité, qui est le chiffre d'affaires qui couvre les charges engagées et le point mort qui est la date à laquelle ce seuil de rentabilité est atteint :
• Le seuil de rentabilité en valeur : SRvaleur = charges fixes / TMSCV
ou bien SR = CA × charges fixes / MSCV
• Le point mort (en nombre de jours) = (SRvaleur/CA annuel) × 360 (la loi comptable compte 360 jours dans une année et 30 jours pour tous les mois).
Ces calculs permettent à l'entreprise d'estimer le chiffre d'affaires minimal pour être rentable et le résultat escompté pour un prix déterminé.
Exercice n°4
Exercice n°4
3.3 La prise en compte de la concurrence
La concurrence varie en intensité selon les marchés. Des opérations promotionnelles ou l'arrivée d'un nouveau concurrent bouleversent la fixation des prix. L'entreprise est amenée à se positionner afin de permettre au consommateur de différencier les offres.
3.4. La prise en compte de la réglementation
La réglementation en matière de prix vise à protéger le consommateur et à préserver les relations entre les différents acteurs (producteurs, grands distributeurs, petits commerces).
L'ordonnance du 1er décembre 1986 pose le principe de la liberté de fixation des prix tout en limitant certaines pratiques qui auraient pour but d'entraver la pratique concurrentielle (par exemple, interdiction de la vente à perte et de l'entente sur les prix, réglementation des périodes de soldes, etc.).
Exercice n°5
Exercice n°5
À retenir
Le choix d'une politique de prix n'est pas figé. Les entreprises doivent en permanence s'adapter aux attentes et à la diversité des consommateurs, et à une concurrence de plus en plus accrue. Ce choix s'effectue donc en fonction de contraintes internes (coûts, recherche de rentabilité, objectifs, positionnement) et de contraintes externes (demande, concurrence, réglementation). Grâce à l'ensemble de ces éléments, l'entreprise pourra déterminer quel type de stratégie mettre en œuvre (différenciation, prix unique, prix forfaitaire ou gratuité). Tous les choix effectués devront toujours se faire en cohérence avec les objectifs stratégiques de l'organisation et les autres aspects du marchéage.© 2000-2024, rue des écoles