De Youri Gagarine à la guerre des étoiles

L'affirmation de la puissance et la conquête du monde passent, pour chacune des deux superpuissances, par une démonstration constante de la force armée, en particulier avec le développement de l'énergie nucléaire. Le projet Manhattan permet aux États-Unis de disposer les premiers de la bombe atomique en juillet 1945. L'URSS les rejoint en 1949. La course à l'armement se poursuit également dans le domaine des missiles. La technologie allemande des V2 a permis la propulsion d'engins explosifs à l'intérieur de fusées allant à une vitesse de plus de 5 000 km/h et montant à une altitude comprise entre 80 et 200 kilomètres. Les États-Unis disposent de modèles de V2 et peuvent surtout s'appuyer sur leur créateur, l'ingénieur allemand Wernher von Braun. Staline demande donc à l'équipe de Sergueï Korolev de rattraper cette avance américaine. Les premiers tirs ont lieu dès la fin des années 1940. Très rapidement, les deux puissances voient plus loin et se penchent sur la conquête de l'espace.
Exercice n°1

L'URSS en tête de la course

Sergueï Korolev, tout en travaillant au projet soviétique de missiles intercontinentaux, d'une portée et d'une charge suffisantes pour atteindre les États-Unis depuis le territoire soviétique, imagine la possibilité de lancement d'un satellite artificiel au-delà de l'atmosphère terrestre. Son acharnement lui permet à la fois de convaincre les responsables du parti et de construire Spoutnik 1, qui sera propulsé vers l'espace le 4 octobre 1957. Ce premier triomphe russe va piquer au vif les États-Unis qui se lancent à leur tour dans la course spatiale. Explorer, le premier satellite américain, est mis en orbite le 1^er février 1958. Mais l'URSS garde toute son avance. Grâce au programme Vostok, dès le 3 novembre, soit à peine un mois après le lancement de Spoutnik 1, c'est Spoutnik 2 qui s'élance vers l'espace, avec à son bord la chienne Laïka. C'est le premier vol spatial habité de l'histoire de l'humanité.
En 1958, les États-Unis créent la NASA afin de donner une impulsion décisive à leur programme spatial. L'URSS et les États-Unis travaillent d'arrache-pied à l'envoi du premier homme dans l'espace. Mais ce sont encore les Russes qui remportent, de peu, la victoire avec le vol de Youri Gagarine, le 12 avril 1961. Le 5 mai 1961, Alan Shepard est le premier Américain dans l'espace et John Glenn le premier Américain en orbite en 1962. En 1963, la première femme à franchir l'atmosphère est la Russe Valentina Terechkova.
C'est désormais à la Lune que vont s'intéresser les deux rivaux.

Objectif Lune et la victoire américaine

Le 12 septembre 1962, le président américain J. F. Kennedy prononce à la Rice University un discours dans lequel il expose le programme américain de conquête de l'espace. Celui-ci est devenu une « nouvelle frontière » que la mission Apollo est déterminée à franchir en envoyant des hommes sur la Lune. L'URSS, grâce à son programme Luna initié en 1959, a déjà effectué un certain nombre de missions d'exploration du satellite naturel de la Terre (photographies de la face cachée de la Lune, alunissage de Luna 2). À partir du début des années 1960, elle travaille sur un projet de véhicules motorisés (rovers) destinés à explorer et à récolter des échantillons lunaires.
Mais le triomphe revient aux États-Unis, avec les premiers pas de Neil Armstrong et de l'équipage d'Apollo 11 sur la Lune, le 21 juillet 1969.
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Le temps de la détente

Après cette victoire, la conquête spatiale est freinée par les crises des années 1970 qui ébranlent l'économie mondiale. En outre, après l'affaire des missiles de Cuba en 1963, et jusqu'à la fin des années 1970, le temps est également à une certaine détente dans les relations entre Russes et Américains. Le 8 juin 1962 est signé un premier accord de coopération pour l'exploration et l'utilisation pacifique de l'espace. Durant 10 ans, la NASA et l'Académie des sciences russe échangent des données, des savoirs en matière de météorologie, de biologie, de techniques dans le domaine spatial. Cette collaboration aboutit à l'accord soviéto-américain du 24 mai 1972, qui prévoit l'arrimage de capsules Apollo et Soyouz et l'échange de cosmonautes/astronautes en cours d'orbitage. Cela sous-entend donc la compatibilité des engins et l'échange mutuel concernant leur conception. Le 15 juillet 1975 les lanceurs Soyouz et Saturn décollent respectivement des bases de Baïkonour en URSS et de Cap Canaveral aux États-Unis. Le 17 juillet, les vaisseaux Soyouz et Apollo effectuent l'amarrage des deux vaisseaux et les équipages se rencontrent. Les 20 et 25 juillet, les deux vaisseaux sont de retour sur Terre.

La guerre des étoiles

Si, dans le domaine spatial et politique les tensions semblaient s'être apaisées entre Américains et Russes, la guerre froide restait latente. Lorsque, en décembre 1979, l'Armée rouge pénètre en Afghanistan, celle-ci éclate à nouveau. Le pays est en proie à une guerre civile qui oppose le gouvernement de mouvance communiste aux moudjahidines, les révolutionnaires islamiques. L'URSS envoie ses troupes pour soutenir le gouvernement, tandis que les États-Unis arment l'opposition. La course à l'armement reprend. Le 23 mars 1983, le président américain Ronald Reagan présente l'IDS (initiative de défense stratégique), surnommée Starwars (guerre des étoiles), à la suite de la sortie au cinéma des films éponymes de George Lucas. Il qualifie en effet dans son discours l'Union soviétique « d'Empire du mal ». L'IDS prévoit la création d'un bouclier spatial antimissiles, constitué de satellites radars, espions et de destruction laser. Si ces dispositifs extrêmement coûteux et d'une technologie encore non maîtrisée ne sont pas développés, l'état économique, politique et industriel de l'URSS ne lui permettent pas d'envisager de concurrencer l'ambition américaine. Les États-Unis deviennent maître du jeu dans cet équilibre précaire de la terreur.
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Les tentatives de reprise de la Russie

Si l'URSS n'a pas les moyens d'une politique d'armement spatial, elle n'en poursuit pas moins ses recherches, en particulier dans l'aménagement de stations orbitales permettant le séjour prolongé dans l'espace à des fins scientifiques. Le 19 avril 1971, la première station permanente, Saliout 1, décolle de Baïkonour. Un équipage y est envoyé au mois de juin suivant. Il restera à bord 18 jours avant de périr dans le vaisseau Soyouz qui le ramène sur Terre. Il faut attendre mai 1973 pour que les Américains mettent en orbite Skylab, leur propre laboratoire spatial. Le 19 février 1986, c'est au tour de la station russe Mir, composée de sept modules, d'entrer en service. Elle n'est démantelée qu'en 2001 après avoir accueilli des chercheurs soviétiques d'abord, mais aussi américains (après la chute de l'URSS) et européens. Elle a ainsi permis la collaboration nécessaire à la création de l'actuelle station spatiale internationale (ISS), projet de la NASA, nécessitant le savoir-faire russe, dont l'assemblage a commencé en 1998. Achevée en 2011, elle est aujourd'hui habitée en permanence.

La confirmation de la superpuissance américaine

Le programme Starwars n'a finalement jamais été développé en raison de l'effondrement de l'Union soviétique en 1991. La structure de défense anti-missile américaine est allégée, réactivée ponctuellement comme lors des attentats de 2001. Mais les États-Unis poursuivent leur politique d'exploration spatiale, en particulier avec la conception de navettes réutilisables. Ils ont entraîné dans leur sillage leurs alliés européens. La France la première crée le Centre d'études spatiales (CES) en 1961 et met au point, en collaboration avec l'Europe, au sein de l'ESA (Agence spatiale européenne), le programme Arianespace. Celui-ci permet le lancement grâce aux fusées Ariane de satellites d'observation et de télécommunications. Elle permet à l'Europe d'avoir une politique spatiale indépendante des États-Unis et jusque dans le milieu des années 1990, elle est le premier lanceur mondial de satellites. Si la collaboration est désormais la règle dans le domaine spatial, en particulier en raison du coût de tels programmes, la NASA reste pionnière dans l'exploration du système solaire, en témoigne l'aventure martienne.

L'émergence de nouveaux acteurs et le retour de la défiance

Outre les trois grands acteurs étatiques que sont les agences américaine, russe et européenne, de nouveaux pays s'inscrivent dans la course aux étoiles. Ainsi la Chine a procédé à un vol habité en 2003. L'Inde produit également ses propres satellites.
Des entreprises privées se placent également désormais sur le marché du voyage extra-atmosphérique, comme les programmes SpaceX ou BlueOrigin des milliardaires Elon Musk et Jeff Bezos. Si la guerre des étoiles a semblé un temps oubliée, elle n'est pourtant jamais loin. En effet, le 8 mars 2021, le premier exercice militaire français AsterX a été lancé afin d'évaluer les capacités de la France à protéger ses satellites d'attaque ou d'espionnage, et s'inscrit dans un programme de développement d'armes lasers antisatellites malveillants. Le ciel n'est pas encore un espace de paix.
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