Mers et océans : vecteurs essentiels de la mondialisation
Fiche
Les océans recouvrent 71 % de la surface de la planète. La mondialisation, phénomène d'accélération des flux de toute nature, se mesure particulièrement à la surface des océans : en 2015, neuf milliards de tonnes de marchandises y circulaient, représentant 80 % du volume total des marchandises. Dans le monde, environ 50 000 navires de commerce naviguaient en 2012 : 40 % de pétroliers, 40 % de vraquiers et 15 % de porte-conteneurs. Ce commerce maritime apparaît comme une cible potentielle tout au long des xxe siècle et xxie siècles : pour des belligérants dans le cadre des guerres entre États mais aussi pour des pirates qui y trouvent des produits et des équipages à rançonner. Si ces espaces particuliers que constituent les océans favorisent la mondialisation, ils sont aussi – parfois profondément – modifiés par ce processus.
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Des espaces convoités pour leurs ressources
Les espaces maritimes contiennent des richesses très convoitées par les acteurs de la mondialisation, notamment les ressources halieutiques. Depuis les années 1990, la production aquacole est en plein essor, au point qu'en 2016 elle représentait 74 millions de tonnes, contre 93 millions de tonnes pour la pêche. Il existe 4,6 millions de bateaux consacrés à celle-ci dont 75 % en Asie, avec une flotte très largement constituée d'embarcations de petite taille. Néanmoins, la surpêche est une préoccupation majeure : selon la FAO (Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture), une espèce de poissons sur trois est menacée d'extinction. L'usage de ces stocks biologiques se diversifie, par exemple, avec le développement de l'exploitation des algues et de leur culture pour approvisionner les industries pharmaceutiques et cosmétiques. La localisation de ces ressources se modifie également en raison des changements climatiques : ainsi, la conchyliculture est très sensible à un phénomène d'acidification des océans par absorption du CO2 et les stocks de poissons se déplacent vers le nord, là où les températures sont plus basses.
Les fonds marins sont également des espaces riches en ressources, notamment en hydrocarbures. L'off shore extrait près d'un tiers de la production mondiale de gaz et de pétrole mais son exploitation nécessite davantage d'investissements que l'exploitation terrestre, ce qui la rend plus sensible aux évolutions des cours du pétrole. La répartition est inégale dans les océans : la Norvège a largement investi dans l'exploitation de ces ressources, tout comme les entreprises américaines dans le golfe du Mexique. La mer Caspienne et l'Afrique de l'Ouest sont deux autres espaces majeurs d'exploitation pétrolière.
Des métaux sont également présents en grande quantité, notamment sous la forme de nodules polymétalliques riches en nickel et cobalt. Si leur exploitation est encore aujourd'huitechniquement coûteuse, la hausse des cours internationaux liée à la demande des pays émergents la rend de plus en plus rentable. Le sable constitue aussi une richesse, essentielle à des sociétés où le béton tient une large part. Son exploitation massive en Indonésie est pointée du doigt car elle alimente l'érosion et la disparition d'îles.
Les fonds marins sont également des espaces riches en ressources, notamment en hydrocarbures. L'off shore extrait près d'un tiers de la production mondiale de gaz et de pétrole mais son exploitation nécessite davantage d'investissements que l'exploitation terrestre, ce qui la rend plus sensible aux évolutions des cours du pétrole. La répartition est inégale dans les océans : la Norvège a largement investi dans l'exploitation de ces ressources, tout comme les entreprises américaines dans le golfe du Mexique. La mer Caspienne et l'Afrique de l'Ouest sont deux autres espaces majeurs d'exploitation pétrolière.
Des métaux sont également présents en grande quantité, notamment sous la forme de nodules polymétalliques riches en nickel et cobalt. Si leur exploitation est encore aujourd'huitechniquement coûteuse, la hausse des cours internationaux liée à la demande des pays émergents la rend de plus en plus rentable. Le sable constitue aussi une richesse, essentielle à des sociétés où le béton tient une large part. Son exploitation massive en Indonésie est pointée du doigt car elle alimente l'érosion et la disparition d'îles.
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Enfin, la force des éléments est une source d'énergie potentielle. Le vent qui souffle souvent au-dessus de la mer est exploité grâce à des champs éoliens off shore. Au sein de l'Union européenne, 2 000 éoliennes off shore sont ainsi installées, un chiffre en constante augmentation, et 98 % de celles-ci le sont en mer du Nord, particulièrement propice à ce genre d'installation. De façon plus confidentielle mais avec un réel potentiel, l'utilisation des courants marins pour la production d'énergie est envisagée. La France en fut pionnière avec l'usine marémotrice de la Rance en Bretagne, utilisant la puissance des marées pour faire tourner ses turbines.
Exercice n°1
Exercice n°1
Les échanges de la mondialisation
Si 80 % de nos consommations passent par les mers et océans, elles sont canalisées sur de véritables autoroutes maritimes faisant l'objet d'une étroite surveillance. Reliant les grands ports de la mondialisation, ces routes se croisent parfois et empruntent des passages rendus obligatoires par la géographie. Les détroits sont ainsi des espaces particulièrement fréquentés par les navires de commerce. Malacca, Bab-el-Mandeb, Gibraltar et Ormuz sont autant de points névralgiques, où la libre circulation doit être assurée pour la bonne santé de l'économie mondiale. Ces passages à proximité des côtes ne sont pas sans danger. En 1978, l'Amoco Cadiz, un pétrolier, échoue sur les côtes bretonnes, provoquant l'une des plus grandes marées noires de l'histoire. La pointe bretonne, le Raz de Sein, était alors l'un des passages les plus fréquentés au monde. Pour éviter de nouvelles catastrophes, les plus gros navires doivent aujourd'hui contourner ce passage par l'ouest.
La mondialisation concerne également les flux illégaux qui empruntent la voie maritime. Les narcotrafics se déploient ainsi à l'échelle planétaire en tentant de dissimuler les drogues dans la masse des marchandises transportées. À la suite du renforcement des contrôles douaniers, aux frontières comme dans les ports, les trafiquants innovent. Les garde-côtes américains ont ainsi arraisonné plusieurs semi-submersibles transportant des centaines de kilos de drogue dans le golfe du Mexique.
D'autres flux illégaux prennent un visage tragique dans le cadre des routes migratoires, notamment au cours de tentatives de traversée de la Méditerranée depuis les côtes africaines vers l'Italie ou l'Espagne ou depuis la Turquie vers les îles grecques. D'après l'ONU, plus de 20 000 personnes, voyageant le plus souvent dans de frêles embarcations surpeuplées, sont décédées dans ce contexte. En 2013, un chalutier transportant 500 passagers fait ainsi naufrage au large de Lampedusa, provoquant la mort de 366 personnes.
Exercice n°3Exercice n°4
La mondialisation concerne également les flux illégaux qui empruntent la voie maritime. Les narcotrafics se déploient ainsi à l'échelle planétaire en tentant de dissimuler les drogues dans la masse des marchandises transportées. À la suite du renforcement des contrôles douaniers, aux frontières comme dans les ports, les trafiquants innovent. Les garde-côtes américains ont ainsi arraisonné plusieurs semi-submersibles transportant des centaines de kilos de drogue dans le golfe du Mexique.
D'autres flux illégaux prennent un visage tragique dans le cadre des routes migratoires, notamment au cours de tentatives de traversée de la Méditerranée depuis les côtes africaines vers l'Italie ou l'Espagne ou depuis la Turquie vers les îles grecques. D'après l'ONU, plus de 20 000 personnes, voyageant le plus souvent dans de frêles embarcations surpeuplées, sont décédées dans ce contexte. En 2013, un chalutier transportant 500 passagers fait ainsi naufrage au large de Lampedusa, provoquant la mort de 366 personnes.
Exercice n°3Exercice n°4
De nouveaux espaces maritimes ?
Les changements climatiques actuellement à l'ouvre ont des conséquences majeures pour l'espace maritime. Outre la montée des eaux qui devrait conduire à la submersion de certaines régions comme le delta du Mékong ou celui du Nil, les évolutions environnementales offrent de nouvelles perspectives au transport maritime. Autour du pôle Nord, la banquise ne cesse de se réduire, laissant les eaux libres pour la circulation des navires. Auparavant praticable uniquement l'été, le passage du Nord-Est, proche des côtes russes, a été pour la première fois emprunté par un porte-conteneurs danois en 2018, réduisant de treize jours le temps nécessaire pour relier la Northern Range à la façade maritime asiatique par rapport à la route empruntant le canal de Suez.
De plus, l'accroissement des réseaux d'informations mondiaux comme Internet, a mis l'accent sur la nécessité de développer des « autoroutes de l'information » sous la forme de câbles en partie sous-marins. 1,3 million de kilomètres de fibre optique sont ainsi installés au fond des océans.
Exercice n°7
De plus, l'accroissement des réseaux d'informations mondiaux comme Internet, a mis l'accent sur la nécessité de développer des « autoroutes de l'information » sous la forme de câbles en partie sous-marins. 1,3 million de kilomètres de fibre optique sont ainsi installés au fond des océans.
Exercice n°7
Un droit international maritime
En 1918, le président Wilson intégrait déjà la libre circulation maritime dans sa réflexion sur la mise en place d'un monde nouveau après la Grande Guerre. Presque soixante-dix ans plus tard, les Nations unies commencent à définir un droit maritime international toujours en construction. La Convention des Nations unies sur le droit de la mer, signée à Montego Bay en Jamaïque, en 1982, est progressivement adoptée par 168 pays. Les États-Unis, poids lourd maritime, refusent néanmoins de parapher le texte. Il s'agit de délimiter les accès aux ressources tant halieutiques et énergétiques que minérales, mais aussi d'établir un droit de circulation essentiel à la mondialisation.
La Convention prévoit la libre circulation dans les détroits mais surtout la mise en place de zones économiques exclusives (ZEE), d'une largeur de 200 milles nautiques (370 km) depuis le rivage. Celles-ci réservent au pays concerné l'exploitation des ressources de la colonne d'eau et du sous-sol. La France dispose par exemple de la deuxième ZEE en termes de surface au monde. Cette définition théorique simple se heurte néanmoins aux réalités géographiques, notamment lorsque la proximité des pays empêche une distance réciproque de 200 milles. Au sein de l'Union européenne, la Croatie et la Slovénie se disputent par exemple le contrôle du golfe de Piran. Ce dernier constitue la seule ouverture sur la mer de la Slovénie mais l'accès aux eaux internationales se fait par un corridor revendiqué par la Croatie. Les polices des deux pays verbalisent régulièrement leur voisin pour pêche illégale.
Les tensions de ce type risquent de se renforcer en raison du changement climatique en cours. En effet, la fonte de la banquise ouvre de nouvelles perspectives pour l'Arctique. Des passages, autrefois bloqués par la glace, sont désormais libres une grande partie de l'année, les pays environnants souhaitant les contrôler. Ainsi, le Canada considère le « passage du Nord-Ouest » comme un passage dans ses eaux intérieures, tandis que les États-Unis le considèrent comme un détroit international. Les zones de pêche font également l'objet de vives concurrences : en 2005, une « crise de l'anchois » divise la France et l'Espagne au sujet de la période autorisée pour la pêche de ce poisson dont les stocks diminuent fortement.
Enfin, certaines îles font l'objet de disputes territoriales, puisqu'elles servent ensuite à établir la ZEE. La Chine s'est ainsi emparée des Paracels et des Spratleys dans la mer de Chine méridionale, revendiquées aussi par le Vietnam. Elle y établit actuellement un ensemble d'installation civilo-militaires lui assurant une continuité dans la surveillance des flux maritimes en provenance du Moyen-Orient.
Le droit international n'est pas exempt de ce qui peut apparaître comme des contradictions internes. Ainsi, si les ZEE répondent à la logique d'appropriation, la conférence de Montego Bay assure dans le même temps la logique de libre circulation. De plus, cette appropriation des espaces se fait le plus souvent dans un but économique d'exploitation des ressources tandis que la protection de l'environnement est affirmée dans les discours publics comme une priorité du xxie siècle. L'un des symboles de la vulnérabilité des écosystèmes face aux bouleversements mondiaux est la disparition des récifs coralliens sous l'action conjuguée de la surpêche, de l'acidification des océans et de l'exploitation à outrance des sables.
La Convention prévoit la libre circulation dans les détroits mais surtout la mise en place de zones économiques exclusives (ZEE), d'une largeur de 200 milles nautiques (370 km) depuis le rivage. Celles-ci réservent au pays concerné l'exploitation des ressources de la colonne d'eau et du sous-sol. La France dispose par exemple de la deuxième ZEE en termes de surface au monde. Cette définition théorique simple se heurte néanmoins aux réalités géographiques, notamment lorsque la proximité des pays empêche une distance réciproque de 200 milles. Au sein de l'Union européenne, la Croatie et la Slovénie se disputent par exemple le contrôle du golfe de Piran. Ce dernier constitue la seule ouverture sur la mer de la Slovénie mais l'accès aux eaux internationales se fait par un corridor revendiqué par la Croatie. Les polices des deux pays verbalisent régulièrement leur voisin pour pêche illégale.
Les tensions de ce type risquent de se renforcer en raison du changement climatique en cours. En effet, la fonte de la banquise ouvre de nouvelles perspectives pour l'Arctique. Des passages, autrefois bloqués par la glace, sont désormais libres une grande partie de l'année, les pays environnants souhaitant les contrôler. Ainsi, le Canada considère le « passage du Nord-Ouest » comme un passage dans ses eaux intérieures, tandis que les États-Unis le considèrent comme un détroit international. Les zones de pêche font également l'objet de vives concurrences : en 2005, une « crise de l'anchois » divise la France et l'Espagne au sujet de la période autorisée pour la pêche de ce poisson dont les stocks diminuent fortement.
Enfin, certaines îles font l'objet de disputes territoriales, puisqu'elles servent ensuite à établir la ZEE. La Chine s'est ainsi emparée des Paracels et des Spratleys dans la mer de Chine méridionale, revendiquées aussi par le Vietnam. Elle y établit actuellement un ensemble d'installation civilo-militaires lui assurant une continuité dans la surveillance des flux maritimes en provenance du Moyen-Orient.
Le droit international n'est pas exempt de ce qui peut apparaître comme des contradictions internes. Ainsi, si les ZEE répondent à la logique d'appropriation, la conférence de Montego Bay assure dans le même temps la logique de libre circulation. De plus, cette appropriation des espaces se fait le plus souvent dans un but économique d'exploitation des ressources tandis que la protection de l'environnement est affirmée dans les discours publics comme une priorité du xxie siècle. L'un des symboles de la vulnérabilité des écosystèmes face aux bouleversements mondiaux est la disparition des récifs coralliens sous l'action conjuguée de la surpêche, de l'acidification des océans et de l'exploitation à outrance des sables.
Zoom sur…
La maritimisation du monde
La maritimisation est l'accélération et l'accroissement des échanges par voie maritime, qui a lieu surtout depuis les années 1970. Les causes en sont la diminution du coût des transports maritimes, obtenue grâce au gigantisme des navires et au développement des conteneurs. Révolution du transport, ces boîtes standardisées de six ou douze mètres s'adaptent à tous les types de transports, se superposent et peuvent être réfrigérées pour transporter des denrées alimentaires. Elles ont permis l'accélération des mouvements de marchandises. Le navire MSC Gülsün, construit en 2019, atteint un gabarit de 400 mètres de long sur 62 mètres de large, pour une capacité de transport de 23 756 conteneurs (2 300 dans les années 1970). Environ 20 millions de conteneurs sont simultanément sur mer, assurant une grande partie des échanges de produits manufacturés.Les porte-conteneurs, pétroliers ou vraquiers, parcourent les routes maritimes, reliant entre eux les grands ports de l'économie mondiale. Ceux-ci dessinent des façades maritimes, espaces concentrant des ports qui font l'interface entre un avant-pays (foreland) maritime et arrière- pays (hinterland) terrestre, comme la Northern Range entre Dunkerque et Hambourg. Les plus grands ports du monde se situent en Asie. Ceux de Singapour, Shanghai, ou encore Rotterdam, en Europe, ont adapté leurs infrastructures pour accueillir les plus grands des bateaux. Le port en eau profonde de Shanghai est ainsi construit en 2005 pour accompagner le gigantisme des navires.
Exercice n°2Exercice n°5Exercice n°8
La littoralisation du monde
En parallèle de la maritimisation du monde, sa littoralisation s'accélère : les sociétés humaines se regroupent et concentrent leurs activités le long des littoraux. Se situer à proximité des points de débarquement des produits permet en effet une meilleure rentabilité. Le littoral est également un espace recherché pour le cadre de vie : des activités de loisirs et de tourisme s'y développent et des résidences secondaires s'y installent. Ainsi, sur les littoraux de la Méditerranée, la densité moyenne est passée de 100 hab./km2 en 1970 à 150 hab./km2 en 2000. Les pratiques récréatives se multiplient, certains territoires profitant d'attraits naturels pour une spécialisation, par exemple le surf à Hawaï ou Nazaré (Portugal). Les croisières se sont multipliées dans quelques espaces spécifiques, les Caraïbes et la Méditerranée, y assurant un développement économique mais soulevant aussi des questionnements sur leurs impacts environnementaux.Néanmoins, les littoraux ne connaissent pas tous une évolution semblable, la mondialisation intégrant inégalement les territoires. Les investissements nécessaires pour créer les infrastructures accompagnant le gigantisme des navires sont considérables, d'un point de vue économique mais également écologique et social. Ainsi, le village de Doel en Belgique a été en partie détruit pour agrandir le port d'Anvers. Face à la contestation des habitants pendant plus de vingt ans, une partie du village a été préservée.
Exercice n°6Exercice n°1
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