Des chats par millions
« Il était une fois un très, très vieil homme, et une très, très vieille femme, qui habitaient une maison très, très belle, entourée de fleurs de partout sauf à l'endroit où l'on passait pour entrer. Pourtant, ils étaient malheureux de n'avoir personne avec eux.
« Nous nous contenterions d'un chat ! », songeait la très, très vieille femme.
« Un chat ?, dit le très, très vieil homme.
– Oui, un chat gentil et petit », lui dit la très, très vieille femme.
Et le très, très vieil homme dit :
« Vous aurez ce chat, ma chérie ! » et il partit.
Il prit le chemin des collines pour trouver ce qu'il avait promis. Puis il dépassa les collines que viennent caresser le soleil. Et il traversa les vallées que l'ombre laisse toutes fraîches. Il marcha, marcha, voyagea pendant si longtemps qu'en fin de compte il arriva sur une dernière colline qui était couverte de chats.
Chats ici, chats là, chats un peu plus loin,
chats et chatons dans tous les coins,
des chats, il y en avait vingt, cent, deux cents, mille et encore un.
Des millions, des billions, des trillions de chats,
et encore un peu plus que ça !
« Oh ! oh ! », dit le très, très vieil homme, tout joyeusement, « je vais m'arranger, maintenant, pour trouver le plus élégant et le ramener. » Et ainsi, il en choisit un qui était blanc.
Et il allait s'en retourner, quand il remarqua un autre chat qui n'était pas seulement blanc, mais noir et blanc, et qui lui sembla tout aussi beau que le précédent. Alors il le prit aussitôt.
Mais alors, il en vit un gris, un chaton frisé, tout petit, qui était à y réfléchir aussi joli, il le prit aussitôt.
Mais voilà que, sur son chemin, il en vit un troisième qui était tapi dans un coin, et ce chat tout à fait roux était si câlin qu'il le prit.
Et puis encore un peu plus loin, il découvrit un chaton complètement noir, qui lui parut fort remarquable.
« Ce serait vraiment regrettable de laisser cet être admirable ! », remarqua le très, très vieil homme. Il le prit, comme ses semblables.
Mais voilà qu'encore plus loin, il vit un chat qui était brun, avec des raies jaunes, comme un tigre.
« Je ne peux pas ne pas le prendre ! », s'écria le très, très vieil homme, et c'est ce qu'il fit.
Et c'est ainsi que chaque fois que ce pauvre très, très vieil homme posait son regard quelque part, il voyait, à nouveau, un chat si joli qu'il ne pouvait pas se résoudre à le laisser là.
Ainsi, avant qu'il ait compris ce qui allait lui arriver, il les avait tous emportés.
Alors, le très, très vieil homme retourna chez lui. Il grimpa sur les hautes collines, traversa les belles vallées, pour montrer tous ces jolis chats à la très, très vieille femme qui l'attendait…
C'était amusant de les voir, ces centaines et milliers de chats, ces millions, ces billions, ces trillions de chats tous derrière le très, très vieil homme.
Ils arrivèrent près d'une mare. « Miaou ! Miaou ! Nous avons soif ! », s'écrièrent alors les chats.
« Voilà toute l'eau qu'il vous faut ! », leur répondit-il aussitôt.
Chaque chat se désaltéra, et lorsque chaque chat eut bu, il n'y avait plus de mare.
« Miaou ! Miaou ! Nous avons faim !, crièrent à nouveau les chats, ces milliers, ces millions, ces trillions de chats qui avaient autant d'estomacs.
– Mangez l'herbe sur les collines ! », dit le père tranquille. Ils mangèrent l'herbe et le foin et n'en laissèrent pas un brin.
Bientôt, la très, très vieille femme les vit venir à sa cabane. Elle s'écria : « Mon chéri, qu'apportez-vous ici ? J'ai demandé un chat, je n'en voulais pas tant que ça ! Nous ne pourrons pas les nourrir tous ! Ils mangeront tout, la maison et nous !
– Je n'avais pas pensé à ça !, s'excusa le très, très vieil homme.
– Qu'allons-nous faire de ces chats ? » »
Wanda GA'G, Circonflexe, 1992