La comédie
Fiche
D'origine populaire, la comédie a pour but de divertir et de faire rire, tout en dénonçant des ridicules, des vices, des abus. Son dénouement est généralement heureux.
Quels sont les différents procédés comiques ? Peut-on distinguer différentes formes de comédie ?
Quels sont les différents procédés comiques ? Peut-on distinguer différentes formes de comédie ?
I. Un peu d'histoire
• La comédie apparaît en Grèce, au cours des fêtes données en l'honneur de Dionysos, les grandes Dionysies. Par opposition à la tragédie, qui mettait en scène des personnages de haut rang (princes et rois), elle était considérée comme un genre mineur. Aristophane, en Grèce, puis Plaute et Térence, à Rome en sont les plus illustres représentants.
• En France, la farce est particulièrement présente au Moyen Âge (xiiie -xvie siècle). Elle se donne alors en plein air, à l'occasion d'une fête. L'intrigue (généralement une grossière mystification) est très simple, le dénouement heureux et les personnages populaires. L'exemple le plus caractéristique est la Farce de Maître Pathelin.
• La comédie s'est développée et complexifiée à partir de l'époque classique, avec Molière, Marivaux ou Beaumarchais.
II. Les procédés comiques
Si ce qui fait rire les uns ne fait pas toujours rire les autres, les comédies reposent pourtant sur des procédés éprouvés : le comique de situation, le comique de caractère, le comique de mots.
1. Le comique de situation
• Le comique de situation repose souvent sur un quiproquo : deux personnages comprennent les mots dans un sens différent. Ainsi, dans l'Avare, Valère évoque son amour pour Élise, alors qu'Harpagon pense qu'il lui parle de sa cassette.
l'Avare
« VALÈRE
Moi ? Je ne l'ai point enlevée, elle est encore chez vous. HARPAGON (à part)
O ma chère cassette ! (Haut)
Elle n'est point sortie de ma maison ? VALÈRE
Non, monsieur. HARPAGON
Hé ! dis-moi un peu : tu n'y as point touché ? VALÈRE
Moi, y toucher ! Ah, vous lui faites tort, aussi bien qu'à moi ; et c'est d'une ardeur toute pure et respectueuse que j'ai brûlé pour elle. HARPAGON (à part)
Brûlé pour ma cassette ! »
Moi ? Je ne l'ai point enlevée, elle est encore chez vous. HARPAGON (à part)
O ma chère cassette ! (Haut)
Elle n'est point sortie de ma maison ? VALÈRE
Non, monsieur. HARPAGON
Hé ! dis-moi un peu : tu n'y as point touché ? VALÈRE
Moi, y toucher ! Ah, vous lui faites tort, aussi bien qu'à moi ; et c'est d'une ardeur toute pure et respectueuse que j'ai brûlé pour elle. HARPAGON (à part)
Brûlé pour ma cassette ! »
Molière, V, 3
2. Le comique de caractère
• On le rencontre en particulier dans les pièces de Molière. Ce dernier dénonce les défauts des hommes : l'égoïsme (le Médecin malgré lui), la vanité (le Bourgeois gentilhomme), l'hypocrisie (Tartuffe), le pédantisme (les Femmes savantes), etc. L'avarice excessive d'Harpagon, dans l'Avare, fait de lui la risée de tous.
3. Le comique de mots
• L'effet comique peut provenir du langage lui-même. Ainsi, dans le Bourgeois gentilhomme, de Molière, Cléonte fait semblant de parler le turc : « Ambousahim oqui boraf, Iordina, salamalequi ».
La répétition de certains mots ou de certaines formules produit également un effet comique : Géronte, désemparé, répète ainsi sept fois son fameux « Que diable allait-il faire dans cette galère ! » (Molière, les Fourberies de Scapin, ii, 7).
• Le comique de mots procède enfin parfois de réparties impertinentes ou spirituelles, comme dans les pièces de Beaumarchais et de Marivaux.
le Mariage de Figaro
« FIGARO
Monsieur, j'en rapporte à votre équité, quoique vous soyez de notre Justice. BRID'OISON
Hein ?… Oui, je suis de la-a Justice. Mais si tu dois, et que tu-u ne payes pas ?… FIGARO
Alors monsieur voit bien que c'est comme si je ne devais pas.. »
Monsieur, j'en rapporte à votre équité, quoique vous soyez de notre Justice. BRID'OISON
Hein ?… Oui, je suis de la-a Justice. Mais si tu dois, et que tu-u ne payes pas ?… FIGARO
Alors monsieur voit bien que c'est comme si je ne devais pas.. »
Beaumarchais, iii, 13
III. Différents types de comédie
1. La comedia dell'arte
• Ce genre est apparu en Italie dans la seconde moitié du xvie siècle. On y retrouve toujours les mêmes personnages, reconnaissables à leur costume et également à leur caractère stéréotypé : Arlequin, Pierrot, Colombine, Pantalon, Scaramouche. Les acteurs masculins portent des masques. Tous improvisent sur un canevas préétabli, qui donne les grandes lignes de l'intrigue. Il s'agit en général d'une situation compliquée (un amour contrarié, le plus souvent), qu'une machination permet de dénouer. Ce genre d'intrigue a servi de canevas à beaucoup de comédies, en particulier à celles de Marivaux.
2. Comédie de caractères et satire sociale
• Molière (1622-1673) donne à la comédie ses lettres de noblesse. Il utilise toutes les formes de comédie : les coups de bâton de la farce (les Fourberies de Scapin, l'Avare), les déguisements de la comédie italienne (le Bourgeois Gentilhomme) et les bouffonneries de ses valets (Scapin dans les Fourberies, Polichinelle dans le Malade imaginaire), mais aussi la comédie de caractères et la comédie de mœurs.
« L'affaire de la comédie est de représenter, en général, tous les défauts des hommes, et principalement des hommes de notre temps », écrit Molière dans l'Impromptu de Versailles. À travers ses comédies, il fait la satire des ridicules de la société de son temps.
• Cette satire sociale peut conduire la comédie à l'engagement politique :
« Parce que vous êtes un grand seigneur, vous vous croyez un grand génie. Noblesse, fortune, haut rang, des places : tout cela rend si fier ! », s'exclame Figaro, l'impertinent valet du Mariage de Figaro (Beaumarchais).
3. Le vaudeville
• Sous la forme du vaudeville, comédie légère riche en rebondissements, la comédie de mœurs est omniprésente au xixe siècle, avec Labiche, Feydeau ou Courteline : elle peint la vie des bourgeois, leurs petites ambitions et leurs gros défauts. Ses thèmes sont généralement la cupidité, la morale sociale, la vie de couple.
4. Le théâtre de l'absurde
• Au xxe siècle, le langage se libère. Eugène Ionesco, en particulier, détourne les lieux communs et joue avec des locutions toutes faites : « C'est dur mais c'est le jeu de la règle », ou « La vérité n'a que deux faces mais son troisième côté vaut mieux ».
• Les intrigues font désormais la part belle à l'absurde et au fantastique.
Dans Ubu roi, d'Alfred Jarry (1896), la scène se passe à Nulle part ; le roi et le Czar, déguisés en marionnettes, caracolent sur des chevaux de carton… Cela leur permet d'attaquer les idées reçues et les valeurs établies (religion, famille, patrie). Ubu incarne à la fois l'imbécillité, la lâcheté et la méchanceté humaines.
Dans Ubu roi, d'Alfred Jarry (1896), la scène se passe à Nulle part ; le roi et le Czar, déguisés en marionnettes, caracolent sur des chevaux de carton… Cela leur permet d'attaquer les idées reçues et les valeurs établies (religion, famille, patrie). Ubu incarne à la fois l'imbécillité, la lâcheté et la méchanceté humaines.
• La comédie rejoint alors parfois le tragique : dans En attendant Godot, de Beckett, deux clochards attendent en vain un certain Godot ; ils rencontrent un étrange couple, Pozzo, le maître, et Lucky, l'esclave. Le comique surgit de l'absurdité de la situation, des répétitions, de l'incompréhension réciproque ; se dessine pourtant le tragique d'une condition humaine désaxée et en quête de sens.
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