Les pratiques et les valeurs de la Troisième République
Fiche
Après des débuts difficiles, le régime républicain s'enracine. Bien qu'il connaisse des crises et des tensions, il marque durablement la société française. Quelles sont les pratiques et les valeurs de la IIIe République ?
I. La mise en place d'une démocratie libérale
• Depuis la crise de 1877, les présidents de la République n'osent plus dissoudre la Chambre des députés. Un régime d'assemblée se met en place, le législatif y prime sur l'exécutif. Le président de la République se borne à nommer le président du Conseil, qui forme le gouvernement et doit être investi par les Chambres. Les débats politiques se développent dans la presse qui a retrouvé une large liberté.
• Les républicains, qui gouvernent dans les premières années de la IIIe République, cherchent à réformer la France. Ils s'appuient sur une partie de la paysannerie française, soucieuse d'échapper au pouvoir des notables, ainsi que sur les classes moyennes, dont ils favorisent le développement. Pour affaiblir les forces réactionnaires et conservatrices, des républicains comme Léon Gambetta mènent une politique anticléricale visant à contrecarrer l'influence de l'Église.
• Mais la meilleure façon d'enraciner la République consiste à développer l'éducation, afin que chaque citoyen puisse exercer son droit de vote plus librement. À partir de 1881, sous l'impulsion de Jules Ferry, l'école primaire devient obligatoire et gratuite pour les garçons et les filles de 6 à 13 ans. Les instituteurs diffusent une morale civique et les valeurs de la République issues de la Révolution de 1789. Ils achèvent l'unification culturelle du pays. L'école publique est laïque. Les symboles religieux y sont interdits, les membres du clergé ne peuvent y enseigner. Cependant, des écoles privées subsistent.
II. Les crises de la République
• Le régime d'assemblée provoque une certaine instabilité ministérielle. En effet, le pouvoir des gouvernements dépend des chambres : les renversements sont fréquents. L'image de la politique se détériore, notamment dans les dernières années du xixe siècle, quand divers scandales politiques sont révélés dans la presse. L'antiparlementarisme se propage. Le régime est attaqué à droite par les catholiques et à gauche par les socialistes et les anarchistes. Ces derniers recourent même au terrorisme pour déstabiliser le pouvoir.
• Une partie des mécontents se regroupe derrière le général Boulanger. Celui-ci apparaît alors comme l'homme providentiel capable d'installer un régime fort et de prendre une revanche sur les Allemands. Il est triomphalement élu député en 1889 ; ses critiques deviennent cependant moins virulentes ; bientôt, il ne constitue plus une menace pour la IIIe République.
• La plus importante crise de la IIIe République est sans aucun doute l'affaire Dreyfus (voir fiche « L'affaire Dreyfus »). Un officier juif, le capitaine Dreyfus, est accusé à tort d'espionnage. En 1898, Émile Zola dénonce l'attitude de l'état-major qui a falsifié le dossier et met en cause la responsabilité du pouvoir politique. Un violent conflit idéologique divise la France entre les dreyfusards, partisans de la réhabilitation de Dreyfus, et les antidreyfusards, souvent antisémites, qui veulent défendre l'honneur de l'armée. Pour maintenir la République et rétablir le calme, les progressistes se rassemblent dans un gouvernement de défense républicaine. Dreyfus est libéré en 1906 mais le clivage qu'a provoqué cette affaire marque la France de la première moitié du xxe siècle.
III. La République radicale
• Une loi de 1901 autorise la formation de partis politiques. Le premier à se constituer est le Parti républicain radical et radical-socialiste. Il prend et conserve un rôle central dans la vie politique française entre 1901 et 1914. Partisans d'une République pure et dure, les radicaux militent en faveur de la laïcité et d'une France de petits propriétaires. Ils sont le pivot de tous les gouvernements jusqu'en 1940. En 1899, Pierre Waldeck-Rousseau allie radicaux et socialistes pour former le « Bloc des gauches ».
• La politique anticléricale des radicaux aboutit à la séparation des Églises et de l'État établie par la loi de 1905 (voir fiche « La séparation de l'Église et de l'État »). Désormais, la République ne reconnaît aucun culte et ne salarie plus les membres du clergé mais doit assurer la liberté de conscience et de culte. Cette mesure, condamnée par le Vatican, suscite un fort mécontentement dans les milieux catholiques. De nombreux troubles ont lieu lorsque l'État cherche à établir l'inventaire des biens d'Église. Ces tensions disparaissent avec la Première Guerre mondiale.
• Les radicaux doivent également composer avec la montée en puissance du mouvement ouvrier. Les différents courants socialistes, de plus en plus influencés par le marxisme, se regroupent en 1905 pour former la Section française de l'Internationale ouvrière (SFIO, dirigée par Jean Jaurès). Parallèlement, la Confédération générale du travail (CGT), fondée en 1895, est toujours le principal syndicat français. Révolutionnaire, il tient à garder son autonomie par rapport aux partis politiques. Les grèves sont durement réprimées par les forces de l'ordre et l'arrivée au pouvoir, en 1906, du radical Georges Clemenceau met fin à l'alliance du « Bloc des gauches ».
• Vers 1910, rien ne menace la République mais la montée du nationalisme prépare l'opinion publique à considérer comme inéluctable la guerre contre l'Allemagne.
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