La construction européenne


Fiche

Au début des années 2000, avec la fin du monde soviétique, une période riche d'opportunités s'ouvre pour l'Union européenne. Son pouvoir d'attraction sur l'Europe orientale est manifeste, ouvrant la voie à de futurs élargissements. Parallèlement, l'approfondissement progressif des compétences de l'Union est en cours de préparation.
I. L'Union européenne : élargissements et approfondissements
• Avec l'entrée en application du traité de Maastricht (1992), la CEE – devenue Union européenne (UE) – progresse vers un approfondissement des compétences communautaires, au détriment de celles des États. L'euro est en place depuis 2002 : d'abord constituée de onze pays membres, la zone euro en rassemble aujourd'hui dix-sept, profitant des différents élargissements des années 2000. Certaines compétences des États membres sont assumées par des institutions communautaires (Parlement, Conseil de l'Union, Commission) et une coopération judiciaire et policière est mise en place.
• Dès 1995, à la faveur de la chute du mur de Berlin et de l'effondrement de l'URSS – doublé par un effacement manifeste de la puissance russe en Europe orientale –, des pays d'Europe centrale ou septentrionale, autrefois trop proches du bloc de l'Est pour se départir d'une certaine neutralité, entrent dans l'UE : c'est le cas de l'Autriche, de la Suède et de la Finlande. En 2004, c'est le grand élargissement : huit pays d'Europe orientale autrefois satellites de l'URSS (République tchèque, Slovaquie, Hongrie, Pologne, Slovénie, qui appartenait à la Yougoslavie) ou même Républiques soviétiques (Estonie, Lettonie, Lituanie) ainsi que deux petits États méditerranéens (Chypre et Malte) entrent dans l'UE. Le centre de gravité de l'Union se déplace donc vers l'Est. L'Allemagne, jadis coupée en deux, voisine du bloc de l'Est, se retrouve en position centrale. L'adhésion en 2007 de deux autres pays d'Europe orientale ex-satellites de l'URSS, la Bulgarie et la Roumanie, renforce encore cette composante centrale de l'Allemagne réunifiée. Enfin, la Croatie, ancienne République yougoslave, adhère à l'UE en 2013. Les processus d'élargissement sont donc toujours actifs.
II. Les difficiles progrès de la gouvernabilité de l'UE
• Les élargissements posent la question de la gouvernabilité de l'UE. Ce qui était jadis aisé à six pays d'Europe de l'Ouest relativement proches est devenu très délicat à 25, a fortiori à 27 ou à 28 ! Aussi cherche-t-on à donner du corps à l'UE, à la doter d'institutions plus à même de manœuvrer.
• En juin 2003, un projet de Constitution est ainsi présenté. Il prévoit de nombreux changements institutionnels :
  • l'élection du président du Conseil européen tous les deux ans et demi par les chefs des États de l'UE qui remplacera la présidence tournante d'une durée de six mois ;
  • la nomination d'un ministre des Affaires étrangères, chargé de mener la politique extérieure de l'UE et de coordonner l'action des États membres dans le domaine de la défense ;
  • le renforcement du Parlement, qui partagera alors le pouvoir législatif avec le Conseil et vote le budget ;
  • la mise en place d'une commission réduite à 18 membres chargée de mettre en œuvre la politique de l'Union ;
  • le remplacement de la règle de l'unanimité par celle de la majorité qualifiée (55 % des États représentant 65 % de la population et comprenant au moins quinze États) pour de nombreuses décisions communautaires.
• En ce qui concerne la Constitution, un long chemin reste à parcourir. La future Constitution n'entrera en vigueur qu'après avoir été ratifiée par les États membres. Or, le 29 mai 2005, si neuf États avaient déjà approuvé le texte proposé, 55 % des Français et 61 % des Néerlandais l'ont rejeté par référendum, ce qui a suffi à enterrer le projet. Le traité de Lisbonne de 2007, entré en vigueur en 2009, réintroduit une partie des réformes projetées et rejetées :
  • renforcement de l'indépendance du président de la Commission européenne envers les États ;
  • création d'un Haut Représentant de l'Union pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité ; chargé de la politique européenne de sécurité et de défense, il est élu à la majorité qualifiée par le Conseil de l'Union européenne ;
  • le président du Conseil européen (c'est-à-dire le sommet des chefs d'État et de gouvernement) est désormais élu à la majorité qualifiée, il assure la représentation extérieure de l'Union.
III. L'Union européenne : une union à problèmes
• L'élargissement récent de l'Europe à 25 membres, à 27 en 2007 et à 28 en 2013 pose des problèmes : la mise à niveau économique des nouveaux membres est difficile et les populations des pays fondateurs craignent d'avoir à en payer le prix économique et social (délocalisations ou abaissement de leurs droits acquis).
• Dans le domaine de la politique étrangère, la mise en place d'une politique commune s'appuyant sur une organisation de défense à l'échelle de l'Europe est difficile à mettre en œuvre. Les intérêts et les traditions diplomatiques des pays sont encore trop différents. L'intervention américaine en Irak, en 2003, a ainsi montré les profonds désaccords entre les pays membres, la France et l'Allemagne s'y opposant, alors que la Grande-Bretagne, l'Italie, l'Espagne, la Pologne acceptaient d'y participer.
• En fait, la construction européenne est inachevée et connaît des fragilités capables de la remettre en cause.
Fragilité institutionnelle : l'UE est une union à géométrie variable ; l'espace Schengen déborde du cadre de l'UE, mais ne comprend pas les îles Britanniques ; la zone euro ne compte que 17 membres sur 28 Fragilité démocratique : l'UE souffre d'un déficit d'adhésion, car, en dehors du Parlement, aucune institution n'est élue par le peuple ; l'euroscepticisme gagne du terrain, dénonçant la bureaucratie des « eurocrates ». Les peuples d'Europe peinent à comprendre exactement le fonctionnement d'institutions très complexes, qui appliquent des traités incompréhensibles au plus grand nombre.
Fragilité financière, enfin : la crise de la dette souveraine européenne met les solidarités à rude épreuve et démontre que les finances publiques ne sont pas sur une trajectoire viable. Cette crise place la construction européenne à la croisée des chemins : soit les États membres parviennent à régler les problèmes ensemble, et progressent vers davantage d'intégration ; soit la zone euro éclate, et peut-être l'Union avec elle…
© 2000-2024, rue des écoles