Classer les procédés de modalisation

Qu'appelle-t-on « modalisation du discours » ?
Le locuteur révèle souvent dans son énoncé son point de vue, c'est-à-dire ses opinions ou ses sentiments. L'énoncé contient alors des traces, des indices de cette subjectivité : c'est ce qu'on appelle « la modalisation du discours ».
• Toute modalisation permet de traduire :
  •  soit une certitude, plus ou moins forte selon que le locuteur est convaincu ou non de ce qu'il énonce ; c'est le cas dans les remarques d'élèves qui suivent ; Exemples : M. Lesot nous prend apparemment pour des imbéciles. (présomption) M. Lenoir, à l'évidence, manque de clarté dans ses explications. (certitude forte) ;
  •  soit une évaluation, c'est-à-dire un jugement positif ou négatif. Exemple : M. Le Gentil sait fort bien redonner confiance aux élèves en difficulté.
• Si les marques du locuteur sont plus particulièrement présentes dans le texte argumentatif, on les trouve aussi dans les autres types de texte (narratif, descriptif, explicatif) : seuls les énoncés scientifiques et techniques échappent en principe à la modalisation.
Quels sont les procédés de modalisation ?
Les procédés lexicaux
Le vocabulaire utilisé par le locuteur peut révéler sa subjectivité. C'est le cas lorsqu'il emploie :
  • des adverbes d'opinion (hélas, sans doute, évidemment, etc.) ou d'intensité (trop, pas assez, etc.) ; Exemple : Votre devoir n'est pas assez précis.
  • un champ lexical péjoratif, c'est-à-dire exprimant un point de vue négatif, dévalorisant ; Exemple : La nourriture de la cantine est infecte, abominable !
  • un champ lexical mélioratif, c'est-à-dire exprimant un point de vue positif, valorisant. Exemple : M. Bellot est un professeur idéal.
Les procédés grammaticaux
La grammaire offre elle aussi des procédés de modalisation. Il est ainsi possible d'employer :
  • certains types de phrases, plus particulièrement la phrase exclamative ; Exemple : La copie d'Hector a disparu : quelle catastrophe !
  • le conditionnel pour exprimer l'incertitude ; Exemple : La copie d'Hector aurait été volée !
  • les auxiliaires modaux pouvoir, devoir, falloir. Exemple : La copie d'Hector a être égarée.
Les procédés stylistiques
Certaines figures de style expriment également le point de vue du locuteur. C'est le cas plus particulièrement :
  • de la comparaison et de la métaphore, qui traduisent une façon de voir toute subjective ; Exemple : Mon voisin de classe avait l'air d'une chouette.
  • de l'antiphrase, qui permet au locuteur de dire, par ironie, le contraire de ce qu'il pense ; Exemple : Deux sur vingt ! Bravo, belle réussite !
  • de la litote, qui permet de modérer un propos défavorable et donc de ménager la sensibilité de l'interlocuteur ; Exemple : Cette copie n'est pas excellente. (= cette copie est mauvaise).
  • de l'hyperbole, qui permet d'insister en exagérant. Exemple : Votre devoir est une catastrophe nationale Ou Votre devoir est la huitième merveille du monde.
Exercice n°1
Sélectionne dans ce texte les modalisateurs qui traduisent l'appréciation positive de l'auteur.
Sélectionnez la (ou les) bonne(s) réponse(s) dans le texte.
en violet

À l'écart de l'autoroute, enfermée dans ses remparts, Ferrare se révèle délaissée par les touristes.Quelle erreur ! Dans l'une des plus riches régions fruitières d'Italie s'élève cette ville-musée toute rose, au riche passé historique, aux merveilleux monuments, à l'atmosphère romantique. Avant vous, Montaigne, Stendhal, Chateaubriand ont succombé à son charme.
L'auteur de ce texte exprime son point de vue positif sur la ville de Ferrare à l'aide de plusieurs procédés de modalisation : une exclamative (Quelle erreur !), un vocabulaire mélioratif (riche, merveilleux, romantique, ville-musée, charme), un superlatif (l'une des plus riches).
Exercice n°2
Repère dans ce texte les procédés de modalisation qui traduisent une certitude ou une incertitude du narrateur.
Sélectionnez la (ou les) bonne(s) réponse(s) dans le texte.
en violet

Voyage au bout de la nuit
« Ce colonel était donc un monstre ! À présent, j'en étais assuré, pire qu'un chien, il n'imaginait pas son trépas ! Je conçus en même temps qu'il devait y en avoir beaucoup des comme lui dans notre armée, des braves, et puis tout autant sans doute dans l'armée d'en face. Qui savait combien ? Un, deux, plusieurs millions peut-être en tout ? Dès lors ma frousse devint panique. Avec des êtres semblables, cette imbécillité infernale pouvait continuer indéfiniment…  »
Céline

Ce texte comporte différents procédés de modalisation :
  • verbes modaux (devait, pouvait) ;
  • verbe exprimant la certitude (assuré) ;
  • adverbes (sans doute, peut-être) ;
  • phrases interrogatives.
Exercice n°3
Parmi les énoncés suivants, indique :
  • ceux qui traduisent un degré de certitude de l'énonciateur ;
  • ceux qui traduisent une évaluation de l'énonciateur.
Sélectionnez :
en violet les énoncés qui traduisent un degré de certitude de l'énonciateur
en orange les énoncés qui traduisent une évaluation de l'énonciateur

1. Je ne me suis apparemment pas bien fait comprendre.
2. Il se serait produit un accident sur l'autoroute.
3. Cet endroit est vraiment merveilleux.
4. Ils ont longtemps vécu dans un abominable taudis.
5. Quel film exceptionnel !
6. À cette heure-ci, il doit déjà être parti.
7. Elle ne pourra sans doute pas venir nous aider demain.
Les énoncés 1, 2, 6 et 7 expriment une certitude plus ou moins forte de l'énonciateur à l'aide de différents procédés de modalisation : adverbes d'opinion (apparemment, sans doute), emploi du conditionnel (serait), emploi d'un auxiliaire modal (doit).
Les énoncés 3, 4 et 5 expriment une évaluation positive ou négative à l'aide d'un vocabulaire péjoratif (abominable, taudis) ou mélioratif (merveilleux, exceptionnel) et d'une tournure exclamative (quel film exceptionnel !).
Exercice n°4
Indique si les marques de modalisation mises en valeur dans le texte traduisent une certitude ou une évaluation.
Sélectionnez :
en violet une certitude
en orange une évaluation

« Il faut que (certitude, évaluation) les pays pauvres retrouvent leur dignité en participant au monde de l'entreprise, au monde des finances, que ceux-ci ne soient plus seulement le domaine d'élites restreintes des pays riches. Je ne fais pas preuve de naïveté en disant cela : je suis sûr (certitude, évaluation) qu'il faut chercher de ce côté. Mais j'ai le sentiment (certitude, évaluation) que nous sommes loin de savoir ce qu'il faut faire. […] N'introduisons pas (certitude, évaluation) de hiérarchie entre les civilisations ni entre les cultures. Toutes ont des rapports entre elles ; le métissage des cultures est devenu un phénomène à l'échelle planétaire, et c'est très bien ainsi (certitude, évaluation). Au sein de toutes les religions et de toutes les civilisations, on rencontre le respect des droits de l'homme, la tolérance, la coexistence des cultures. » (Propos de B. Geremek, Libération, 11 novembre 2001)
• L'historien polonais B. Geremek emploie des locutions je suis sûr, j'ai le sentiment exprimant une certitude forte. La locution impersonnelle Il faut que et l'impératif N'introduisons pas traduisent une nécessité qui procède de ce sentiment de certitude.
• Seule l'expression et c'est très bien ainsi exprime une évaluation (positive) de la situation.