Des territoires traversés et remodelés par des mobilités complexes
Fiche
L'Afrique australe est un espace traversé par d'intenses flux migratoires. Elle est l'une des plus importantes zones de départ mais aussi d'arrivée au sein du continent africain, avec l'Afrique du Sud pour principale destination d'arrivée. L'Afrique australe concentre des flux de toutes natures : migrations économiques, réfugiés, exode rural, tant du point de vue intranational qu'international. Ces migrations structurent l'espace de la région à toutes les échelles.
I. L'Afrique australe dans l'espace migratoire mondial
L'Afrique australe est inscrite dans de larges espaces migratoires. Ces migrations sont actuelles, mais relèvent aussi d'héritages anciens.
1. Un espace ouvert aux migrations
Boers au combat. Gravure parue dans l'Illustrated London News, 1881
• Les héritages migratoires ont façonné la région. À l'époque coloniale apparaît un premier brassage. L'arrivée de populations européennes débute dès le xviie siècle dans la région du Cap, avec l'arrivée des colons hollandais, appelés Boers. Ceux-ci sont progressivement repoussés vers l'intérieur des terres par les Anglais qui les affrontent lors de la guerre des Boers de 1899 à 1902. La population d'origine européenne comporte également quelques descendants de Portugais en Angola ou au Mozambique.
• Dans les espaces de l'Afrique australe intégrés à l'Empire britannique, les migrations sont intenses dès le début du xxe siècle. Les Anglais favorisent l'installation en Afrique du Sud de personnes originaires des autres territoires de l'Afrique australe de façon à exploiter les ressources minières et encouragent les déplacements de populations internes à l'Afrique du Sud vers les zones d'exploitations minières. Par ailleurs, une population d'origine indienne s'installe, notamment dans la région de Durban, pratiquant le commerce.
• Ces migrations ont ainsi façonné des sociétés complexes, conduisant à des clivages, mais apportant à l'Afrique australe une richesse culturelle.
2. Les facteurs de migrations
• Les facteurs de migrations sont nombreux. Tout d'abord, les aspects économiques, qui sont les principaux dans la région. Ils sont suscités tant par l'attrait économique des villes et de certains pays que par les difficultés des zones rurales. Ainsi, les flux migratoires peuvent être importants même vers des espaces urbains connaissant un fort taux de chômage, mais qui laissent espérer davantage de perspectives, fût-ce dans des secteurs informels de l'économie.
• Les migrations liées aux déstabilisations politiques existent également, ainsi celles des réfugiés en provenance d'Afrique centrale et de l'Est, et des fermiers d'origine européenne du Zimbabwe venant chercher refuge en Afrique du Sud.
• Enfin, les migrations Sud-Nord (au sens économique) sont également présentes dans l'archipel des Comores, entre les îles relevant de la république des Comores (indépendante depuis 1975) et Mayotte, territoire français d'outre-mer, où la part des étrangers est très importante dans la population.
3. Des flux importants
• La région est donc animée par de nombreux flux migratoires. On compte aujourd'hui 4,5 millions de migrants internationaux en Afrique australe, soit une multiplication par quatre en vingt ans.
• Les migrations intrazone (à l'intérieur de l'Afrique australe) sont légèrement majoritaires, représentant 53 % du total. Cela indique que l'Afrique australe attire également des populations venant d'autres pays, essentiellement africains. L'attrait de l'Afrique du Sud explique l'importance de cette part des migrations extrazone.
Exercice n°1
Exercice n°1
II. Les espaces des migrations
1. Les zones de départ
• Les espaces de départ sont constitués des zones dans lesquelles la situation économique, sociale ou politique est la plus tendue. L'Angola, malgré la rente pétrolière, ou encore le Mozambique, deux pays où la guerre a longtemps généré des flux de réfugiés, peinent à résoudre leurs problèmes de développement. Le Zimbabwe, quant à lui, voit sa situation politique responsable de nombreux départs.
• Dans d'autres cas, les situations sont plus complexes et certains territoires attirent des migrants tout en émettant des flux, comme entre le Malawi et le Mozambique. Certains de ces pays sont surtout des étapes vers une migration plus lointaine, en Afrique du Sud. Les zones de départ sont soit des espaces en difficulté, ruraux ou urbains, ces derniers constituant un tremplin migratoire pour des populations déjà issues de l'exode rural.
2. Les zones d'arrivée
• À l'échelle de l'Afrique australe, la principale zone d'arrivée est l'Afrique du Sud. Le niveau de développement du pays constitue une perspective pour de nombreuses personnes issues de certains pays voisins, principalement du Mozambique et du Zimbabwe. Toutefois, le marché de l'emploi en Afrique du Sud permet difficilement d'offrir une perspective à tous. Ainsi, les flux vers l'extérieur de la zone sont également très importants.
• Près de deux millions de personnes ont quitté la région, essentiellement pour l'Europe, l'Asie, les autres pays d'Afrique ou l'Amérique du Nord. Parmi eux, on trouve des migrants peu qualifiés, mais aussi une part importante de diplômés, privant ainsi de leurs compétences leurs pays d'origine. Ce brain drain (« fuite des cerveaux ») touche aussi l'Afrique du Sud, mettant en évidence certaines limites à son émergence.
3. Les espaces migratoires : villes et frontières
• Parmi les espaces marqués par les migrations, on trouve les espaces frontaliers. Ceux-ci sont difficiles à contrôler pour certains États et peuvent donner lieu à des trafics et à une économie informelle.
• Les villes absorbent la plupart des flux migratoires. Certaines ont une croissance essentiellement due à ceux-ci, notamment en Afrique du Sud. Dans les pays du nord de l'Afrique australe, ces migrations contribuent à la création de quartiers informels dans lesquels la création de nouveaux réseaux reste problématique.
Exercice n°2Exercice n°3
Exercice n°2Exercice n°3
III. Migrations et mobilités : les enjeux du développement
1. Les mobilités et le développement économique
• La question migratoire est liée à celle du développement. La réussite de l'Afrique du Sud conduit le pays à devenir une importante destination migratoire. Cela signe son succès dans la région, même si cette situation révèle également de grandes limites.
• Toutefois, le sort des migrants est souvent plus difficile dans les pays les moins avancés. C'est le cas des déplacés issus de la République démocratique du Congo, souvent abrités dans des camps de réfugiés, tout comme ceux issus du Mozambique et ayant trouvé refuge au Malawi.
• La région est également placée à la croisée des mobilités liées au tourisme. Outre les touristes internationaux issus d'autres zones, plus de la moitié des déplacements touristiques s'effectuent à l'intérieur de la région. L'Afrique du Sud reste là encore la principale destination, mais la Namibie et le Zimbabwe connaissent également un tourisme en croissance importante, tant du point de vue du tourisme culturel que du tourisme animalier.
2. Mobilités et développement : tensions et atouts
• Les mobilités sont des atouts, car elles permettent de fluidifier l'accès à des conditions de vie meilleures. Mais cela aboutit également à des tensions. Le brain drain dévitalise certains pays, les privant de près de 75 % de leurs diplômés. Ce phénomène touche également l'Afrique du Sud, où les questions de l'insécurité et des perspectives économiques à long terme découragent une partie de la jeunesse diplômée.
• En Afrique du Sud, la situation est parfois tendue entre les populations locales vivant dans des conditions difficiles, comme les populations noires reléguées dans les townships, et les migrants venus des pays voisins, accusés de constituer une concurrence pour des populations déjà marquées par un haut niveau de chômage.
3. Mobilités et intégration des espaces
• C'est pourquoi les États de la région tentent de réguler les flux migratoires, souvent sans grand succès. Le Botswana a ainsi érigé une barrière métallique électrifiée sur 500 km de frontière avec le Zimbabwe et la Zambie, mettant en évidence le contraste entre ce pays, peu densément peuplé et économiquement stable, et ses voisins. Un dispositif semblable existe entre l'Afrique du Sud et le Mozambique. Ces dispositifs sont largement contournés par des flux clandestins. C'est donc à travers un partenariat régional et un système de gestion commune des flux migratoires que la situation pourrait être gérée.
• Les organisations régionales, comme la Communauté de développement d'Afrique australe, pourraient voir leur rôle renforcé dans le cadre de la gestion des flux migratoires.
Exercice n°4Exercice n°5
Exercice n°4Exercice n°5
© 2000-2024, rue des écoles