La rhétorique ancienne distingue trois genres qui ont chacun un domaine d'application spécifique : le genre délibératif qui expose des arguments en vue d'aboutir à une décision, le genre judiciaire qui accuse ou défend, enfin le genre épidictique qui fait l'éloge ou le blâme d'une personne ou d'une idée. Ce dernier genre, enseigné dans l'Antiquité, prend place également dans la littérature, dès qu'un texte se fixe pour but de louer ou de blâmer dans une intention moralisante.
1. Quelles sont les origines historiques de l'éloge ?
La pratique de l'éloge remonte à l'Antiquité : les orateurs grecs avaient en effet l'habitude de célébrer les vertus de leur cité, sous la forme du panégyrique . Les Romains ont poursuivi l'exercice, en le personnalisant notamment avec les éloges des empereurs. Puis, avec l'arrivée du christianisme, le genre de l'éloge se spécialise dans la glorification de la vie des saints (hagiographie).
Le genre du portrait, apparu dans les salons précieux du xvii e siècle, peut apparaître comme une prolongation et une diversification de l'éloge. Il prenait aussi bien la forme d'un jeu pratiqué dans les conversations mondaines (voyez la « scène des portraits » dépeinte par Molière dans Le Misanthrope) que celle d'une activité littéraire, notamment chez les mémorialistes (le Cardinal de Retz, La Rochefoucauld, Saint-Simon), les épistoliers (Mme de Sévigné) ou les auteurs d'oraisons funèbres (Bossuet).
Exercice n°1
Exercice n°1
2. Quelles sont les différentes formes de l'éloge ?
Quelle que soit sa forme, l'éloge repose toujours sur un système de valeurs :
- des valeurs morales, intellectuelles ou spirituelles (honnêteté, courage, fidélité, piété, etc.) ;
- des valeurs esthétiques (beauté, grâce, élégance, etc.) ;
- des valeurs pratiques (utilité, facilité d'emploi, coût réduit, etc.).
Certains genres, qu'ils soient littéraires ou non, sont par essence élogieux :
- le blason est un court poème qui fait l'éloge du corps féminin ; les poètes de la Pléiade, Ronsard notamment, s'en étaient fait une spécialité ;
- l'hymne et le panégyrique sont des chants de louange à la gloire d'un dieu ou d'un personnage célèbre ;
- l'oraison ou l'hommage funèbres sont écrits en l'honneur d'un défunt ; Bossuet a ainsi célébré Henriette d'Angleterre, Duchesse d'Orléans, belle-sœur de Louis xiv ;
- l'hagiographie fait le récit de la vie des saints sur un mode nécessairement laudatif ;
- l' apologie vise à justifier et à défendre une doctrine ou une personne (plaidoirie d'un avocat, par exemple) ;
- la publicité met en valeur les qualités d'un produit ou d'un service.
D'autres genres peuvent recourir occasionnellement à l'éloge : portrait positif d'un personnage dans un roman, valorisation d'une œuvre artistique dans un texte critique, éloge d'un mode de vie ou d'un groupe social dans un essai, etc.
3. Quels sont les procédés employés pour louer ?
Le genre de l'éloge recourt à tous les procédés du registre laudatif :- un vocabulaire mélioratif ;
- des figures par amplification (hyperbole) ou par opposition, des répétitions (anaphore, accumulation, énumération) ;
- des métaphores et des comparaisons valorisantes ;
- un rythme et une syntaxe qui donnent souvent une allure emphatique au discours.
4. Quelles sont les origines historiques du blâme ?
Symétrique de l'éloge, le blâme s'exprime, dans l'antiquité romaine, à travers la satire, genre poétique peu codifié qui associe la description railleuse d'une époque et l'enseignement moral qu'il convient d'en retenir. À l'instar des auteurs latins (Horace, Martial et Juvénal), les écrivains de la Renaissance (Marot) puis les classiques (Boileau) écrivent des satires en vers.
Plus généralement, la veine polémique et satirique se retrouve dans de nombreux textes dont l'intention est de condamner, de s'opposer à une attitude, une opinion ou des valeurs. Cet état d'esprit anime ainsi certains fabliaux du Moyen Âge, les récits de Rabelais, l'œuvre poétique d'Agrippa d'Aubigné, de nombreuses pièces de Molière, etc. Au xviiie siècle, en particulier, la pensée des Lumières fait la part belle à la contestation des institutions religieuses et politiques. Des écrivains comme Voltaire ou Beaumarchais, manient la satire avec délectation, dénonçant les travers des hommes et les vices de la société ou critiquant leurs adversaires. En témoigne cet extrait d'une lettre de Voltaire à Rousseau . « J'ai reçu, Monsieur, votre nouveau livre contre le genre humain ; je vous en remercie ; vous plairez aux hommes à qui vous dites leurs vérités, et vous ne les corrigerez pas. Vous peignez avec des couleurs bien vraies les horreurs de la société humaine dont l'ignorance et la faiblesse se promettent tant de douceurs. On n'a jamais tant employé d'esprit à vouloir nous rendre bêtes. Il prend envie de marcher à quatre pattes quand on lit votre ouvrage. » (Voltaire, Correspondance.)
5. Quelles sont les différentes formes du blâme ?
Le blâme revêt des formes diverses, selon le degré d'intensité de la critique qu'il formule. De l'injure à la dénonciation argumentée, le genre évolue par degrés :
- l'injure est une réaction vive et brève, propre aux disputes (dans la comédie, par exemple) ;
- la caricature dresse un portrait négatif, en grossissant délibérément les défauts de l'individu qu'elle dépeint ;
- la critique négative est une argumentation construite, qui a pour objectif de convaincre un interlocuteur.
Le blâme n'est pas propre à un genre littéraire précis : il peut être distillé dans une œuvre romanesque, une pièce de théâtre, un essai, un article de journal, etc. Toutefois, il existe des genres dont la vocation est plus particulièrement de blâmer :
- l'épigramme, poème très bref qui se termine sur une pointe satirique ;
- le pamphlet, ouvrage incisif, très virulent, qui réagit sur le vif à une polémique ;
- le libelle, écrit satirique, parfois diffamatoire.
6. Quels sont les procédés employés pour blâmer ?
Les procédés les plus couramment utilisés pour blâmer sont :- un vocabulaire péjoratif ;
- des figures par amplification ( hyperbole ) ou par opposition ( antithèse ) des répétitions ( anaphore, accumulation, énumération) qui accentuent la réprobation, exagèrent la critique ;
- des métaphores et des comparaisons dépréciatives ;
- une ponctuation expressive, des phrases de type exclamatif ou interrogatif qui traduisent, par exemple, la colère et l'indignation du locuteur.
La citation
« Sans liberté de blâmer, il n'est point d'éloge flatteur. » (Beaumarchais, Le Mariage de Figaro.)Exercice n°1
Qu'est-ce qu'un panégyrique ?
Cochez la bonne réponse.
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Le terme panégyrique, hérité du grec, désignait à l'origine l'assemblée de tout le peuple venu écouter le discours d'un orateur. Par glissement, il a fini par prendre un sens ironique et désigner un éloge exagéré, une louange emphatique. Le parti-pris indéniable de l'auteur pouvant parfois s'apparenter à un manque d'objectivité, le terme a fini par prendre un sens ironique et désigner une médisance. Néanmoins, il ne pouvait s'agir d'« un écrit satirique attaquant des institutions ou une personne connue », qui est la définition du pamphlet.
Exercice n°2
Comment peut-on désigner cet extrait ?
« La femme est bien dans son droit, et même elle accomplit une sorte de devoir en s'appliquant à paraître magique et surnaturelle ; il faut qu'elle étonne, qu'elle charme ; idole, elle doit se dorer pour être adorée. Elle doit donc emprunter à tous les arts les moyens de s'élever au-dessus de la nature pour mieux subjuguer les cœurs et frapper les esprits. Il importe fort peu que la ruse et l'artifice soient connus de tous si le succès en est certain et l'effet toujours irrésistible. C'est dans ces considérations que l'artiste philosophe trouvera facilement la légitimation de toutes les pratiques employées dans tous les temps par les femmes pour consolider et diviniser, pour ainsi dire, leur fragile beauté. L'énumération en serait innombrable ; mais pour nous restreindre à ce que notre temps appelle vulgairement le maquillage, qui ne voit que l'usage de la poudre de riz, si niaisement anathématisé par les philosophes candides, a pour but et pour résultat de faire disparaître du teint toutes les taches que la nature y a outrageusement semées, et de créer une unité abstraite dans le grain et la couleur de la peau […]. »
Charles Baudelaire, « Éloge du maquillage », Le Peintre de la vie moderne, 1863
Cochez la bonne réponse.
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Le texte est un éloge du maquillage qui pare et même transfigure la femme. Il s'appuie sur des termes mélioratifs et sur des valeurs esthétiques. Inversement, il critique les détracteurs du maquillage. Cet éloge est paradoxal dans la mesure où Baudelaire défend le maquillage, ordinairement jugé comme un artifice trompeur et un acte relativement frivole et superficiel. On peut en fait y voir un éloge de l'art en général capable de transfigurer le réel.
Exercice n°3
Dans cet extrait du Discours à l'Académie française, Bossuet fait l'éloge du roi Louis XIV. Quelles valeurs met-il en avant ?
Discous à l'Académie française
« Un roi a été donné à nos jours, que vous nous pouvez figurer en cent emplois glorieux, et sous cent titres augustes ; grand dans la paix et dans la guerre ; au dedans et au dehors ; dans le particulier et dans le public, on l'admire, on le craint, on l'aime. De loin il étonne, de près il attache ; industrieux par sa bonté à faire trouver mille secrets agréments dans un seul bienfait ; d'un esprit vaste, pénétrant, réglé, il conçoit tout, il dit ce qu'il faut, il connaît et les affaires et les hommes, il les choisit, il les forme, il les applique dans le temps, il sait les renfermer dans leurs fonctions ; puissant, magnifique, juste […]. »
Jacques Bénigne Bossuet, 1671
Cochez la bonne réponse.
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Bossuet écrit au nom de valeurs morales facilement repérables : il célèbre la bonté du roi, sa puissance mais aussi sa mesure (« grand dans la paix et dans la guerre, d'un esprit […] réglé, juste »).
Exercice n°4
Relisez l'extrait du texte de Bossuet.
« Un roi a été donné à nos jours, que vous nous pouvez figurer en cent emplois glorieux, et sous cent titres augustes ; grand dans la paix et dans la guerre ; au dedans et au dehors ; dans le particulier et dans le public, on l'admire, on le craint, on l'aime. De loin il étonne, de près il attache ; industrieux par sa bonté à faire trouver mille secrets agréments dans un seul bienfait ; d'un esprit vaste, pénétrant, réglé, il conçoit tout, il dit ce qu'il faut, il connaît et les affaires et les hommes, il les choisit, il les forme, il les applique dans le temps, il sait les renfermer dans leurs fonctions ; puissant, magnifique, juste […]. »
Quels sont les procédés employés par l'auteur pour louer le monarque ?
Cochez la (ou les) bonne(s) réponse(s).
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Le vocabulaire mélioratif est très présent dans le texte : « glorieux », « augustes », « esprit vaste », « pénétrant », « puissant », « magnifique ».
On peut relever deux gradations :
- « on l'admire, on le craint, on l'aime » permet d'insister sur la relation privilégiée du roi avec son entourage ;
- « il les choisit, il les forme, il les applique dans le temps » montre que le monarque connaît bien ses sujets et, par conséquent, sait les administrer au mieux de leurs intérêts et de ceux de l'État.
L' hyperbole (« mille secrets agréments dans un seul bienfait ») insiste sur la grandeur du roi et contribue à en faire un être hors du commun.
Enfin, par une série d' antithèses , Bossuet fait du roi une figure universelle, admirable en tous lieux et en toutes circonstances : « grand dans la paix et dans la guerre ; au dedans et au dehors ; dans le particulier et dans le public », « de loin […], de près ».
Exercice n°5
Dans cet extrait de la Lettre à Louis XIV, que reproche Fénelon au roi ?
Lettre à Louis XIV
« Cependant vos peuples que vous devriez aimer comme vos enfants, et qui ont été jusqu'ici si passionnés pour vous, meurent de faim. La culture des terres est presque abandonnée, les villes et les campagnes se dépeuplent ; tous les métiers languissent et ne nourrissent plus les ouvriers. Tout commerce est anéanti. Par conséquent vous avez détruit la moitié des forces réelles du dedans de votre État, pour faire et pour défendre de vaines conquêtes au-dehors. Au lieu de tirer de l'argent de ce pauvre peuple, il faudrait lui faire l'aumône et le nourrir. La France entière n'est plus qu'un grand hôpital désolé et sans provisions. »
Fénelon, 1694
Cochez la bonne réponse.
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Dans cette lettre, Fénelon blâme vigoureusement une politique de guerres incessantes (« pour faire et pour défendre de vaines conquêtes au-dehors ») qui a ruiné la France (des impôts sont prélevés pour financer la guerre) et dont les conséquences sont la pauvreté et la famine. C'est donc bien le bellicisme du roi qui est ici en cause au premier chef, même si Fénelon lui reproche également les effets de cette politique.
L'auteur sermonne Louis XIV au nom de valeurs paternalistes : par l'expression « vos enfants », il rappelle au monarque le lien qui doit l'unir à son peuple. Dans la monarchie absolue, le roi est considéré comme l'incarnation de Dieu sur Terre : il doit donc se comporter comme un père plein de bonté qui se préoccupe du bonheur de ses sujets.
Exercice n°6
Voici un portrait extrait des Caractères de La Bruyère.
« Champagne, au sortir d'un long dîner qui lui enfle l'estomac, et dans les douces fumées d'un vin d'Avenay ou de Sillery, signe un ordre qu'on lui présente, qui ôterait le pain à toute une province si l'on n'y remédiait. Il est excusable : quel moyen de comprendre, dans la première heure de la digestion, qu'on puisse quelque part mourir de faim ? »
Quels sont les procédés qui permettent d'identifier ce texte comme un blâme ?
Complétez l'analyse suivante avec les mots : ironique, parallélisme, péjoratif, nom, antiphrase.
Écrivez les réponses dans les zones colorées.
Tout d'abord, le même du personnage, Champagne, l'associe à la fête, à la réjouissance et à l'insouciance, ce qui est choquant dans le contexte de famine que dépeint La Bruyère.
Le vocabulaire employé pour qualifier l'individu est également significatif : il sort d'un « long » dîner (l'adjectif est ici connoté négativement), est sans doute ivre (« les douces fumées du vin d'Avenay ») et lourd des mets dont il s'est gavé sans mesure (« qui lui enfle l'estomac »).
Le entre les termes « enfle l'estomac » et « ôterait le pain », « première heure de la digestion » et « mourir de faim », contribuent à faire de cet homme un être détestable, égoïste, aveugle au monde qui l'entoure.
Enfin, La Bruyère achève ce portrait sur une note : la tournure interrogative de la dernière phrase et l'emploi de l'adjectif excusable relèvent de l' et invitent le lecteur à s'indigner du comportement de Champagne.
Le vocabulaire employé pour qualifier l'individu est également significatif : il sort d'un « long » dîner (l'adjectif est ici connoté négativement), est sans doute ivre (« les douces fumées du vin d'Avenay ») et lourd des mets dont il s'est gavé sans mesure (« qui lui enfle l'estomac »).
Le entre les termes « enfle l'estomac » et « ôterait le pain », « première heure de la digestion » et « mourir de faim », contribuent à faire de cet homme un être détestable, égoïste, aveugle au monde qui l'entoure.
Enfin, La Bruyère achève ce portrait sur une note : la tournure interrogative de la dernière phrase et l'emploi de l'adjectif excusable relèvent de l' et invitent le lecteur à s'indigner du comportement de Champagne.
Les Caractères de La Bruyère sont ainsi constitués de portraits à l'ironie percutante qui dénoncent les vices des hommes et font la satire de certains types : l'avare, le gourmand, le paresseux, etc.
Exercice n°7
Comment peut-on désigner le double portrait que contient ce texte ?
Boule de Suif
« Dans la voiture, on se regardait curieusement, à la triste clarté de cette aurore.
Tout au fond, aux meilleures places, sommeillaient, en face l'un de l'autre, M. et Mme Loiseau, des marchands de vins en gros de la rue Grand-Pont.
Ancien commis d'un patron ruiné dans les affaires, Loiseau avait acheté le fonds et fait fortune. Il vendait à très bon marché de très mauvais vins aux petits débitants des campagnes et passait parmi ses connaissances et ses amis pour un fripon madré, un vrai Normand plein de ruses et de jovialité.
Sa réputation de filou était si bien établie, qu'un soir à la préfecture, M. Tournel, auteur de fables et de chansons, esprit mordant et fin, une gloire locale, ayant proposé aux dames qu'il voyait un peu somnolentes de faire une partie de « Loiseau vole », le mot lui-même vola à travers les salons du préfet, puis, gagnant ceux de la ville, avait fait rire pendant un mois toutes les mâchoires de la province.
Loiseau était en outre célèbre par ses farces de toute nature, ses plaisanteries bonnes ou mauvaises ; et personne ne pouvait parler de lui sans ajouter immédiatement : « Il est impayable, ce Loiseau. »
De taille exiguë, il présentait un ventre en ballon surmonté d'une face rougeaude entre deux favoris grisonnants.
Sa femme, grande, forte, résolue, avec la voix haute et la décision rapide, était l'ordre et l'arithmétique de la maison de commerce, qu'il animait par son activité joyeuse. »
Tout au fond, aux meilleures places, sommeillaient, en face l'un de l'autre, M. et Mme Loiseau, des marchands de vins en gros de la rue Grand-Pont.
Ancien commis d'un patron ruiné dans les affaires, Loiseau avait acheté le fonds et fait fortune. Il vendait à très bon marché de très mauvais vins aux petits débitants des campagnes et passait parmi ses connaissances et ses amis pour un fripon madré, un vrai Normand plein de ruses et de jovialité.
Sa réputation de filou était si bien établie, qu'un soir à la préfecture, M. Tournel, auteur de fables et de chansons, esprit mordant et fin, une gloire locale, ayant proposé aux dames qu'il voyait un peu somnolentes de faire une partie de « Loiseau vole », le mot lui-même vola à travers les salons du préfet, puis, gagnant ceux de la ville, avait fait rire pendant un mois toutes les mâchoires de la province.
Loiseau était en outre célèbre par ses farces de toute nature, ses plaisanteries bonnes ou mauvaises ; et personne ne pouvait parler de lui sans ajouter immédiatement : « Il est impayable, ce Loiseau. »
De taille exiguë, il présentait un ventre en ballon surmonté d'une face rougeaude entre deux favoris grisonnants.
Sa femme, grande, forte, résolue, avec la voix haute et la décision rapide, était l'ordre et l'arithmétique de la maison de commerce, qu'il animait par son activité joyeuse. »
Guy de Maupassant, 1880
Cochez la bonne réponse.
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Le texte s'apparente très vite à un éloge : le double portrait repose en effet sur des termes mélioratifs et des valeurs positives. Pourtant, cet éloge est paradoxal : Loiseau est vu de manière favorable par son entourage mais sa bonhomie met mal à l'aise et son physique porte les marques du bourgeois engraissé. Enfin, une relecture du texte amène à voir que la filouterie de Loiseau, encensée par ceux qui sont indirectement cités, est une malhonnêteté dont le marchand tire une réelle fierté (« Il vendait à très bon marché de très mauvais vins aux petits débitants des campagnes »).
Exercice n°8
Quel est le registre employé dans cet extrait ?
Caractères
« Arrias a tout lu, a tout vu, il veut le persuader ainsi ; c'est un homme universel, et il se donne pour tel ; il aime mieux mentir que de se taire ou de paraître ignorer quelque chose. On parle à la table d'un grand d'une cour du Nord : il prend la parole et l'ôte à ceux qui allaient dire ce qu'ils en savent ; il s'oriente dans cette région lointaine comme s'il en était originaire ; il discourt des mœurs de cette cour, des femmes du pays, de ses lois et de ses coutumes ; il récite des historiettes qui y sont arrivées ; il les trouve plaisantes, et il en rit le premier jusqu'à éclater. »
Jean de La Bruyère, 1688
Cochez la (ou les) bonne(s) réponse(s).
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La satire est un registre littéraire qui développe une critique pouvant aller de la simple moquerie à l'attaque virulente. Cette critique doit être formulée de façon habile et implicite. Pour cela, les auteurs ont recours, bien souvent, à l'ironie.
Le registre polémique est un registre plus directement combatif et violent qui cherche à démontrer et à convaincre et utilise toutes les ressources de l'argumentation et de la rhétorique au service de la cause qu'il défend. Cette tonalité est donc plus explicite.
Le registre polémique est un registre plus directement combatif et violent qui cherche à démontrer et à convaincre et utilise toutes les ressources de l'argumentation et de la rhétorique au service de la cause qu'il défend. Cette tonalité est donc plus explicite.
Exercice n°9
Quel est le registre dominant dans l'extrait suivant ?
Histoire des oracles
« Assurons-nous bien du fait, avant que de nous inquiéter de la cause. […]
En 1593, le bruit courut que, les dents étant tombées à un enfant de Silésie, âgé de sept ans, il lui en était venue une d'or à la place d'une de ses grosses dents. Horstius, professeur en médecine dans l'université de Helmstad, écrivit en 1595 l'histoire de cette dent, et prétendit qu'elle était en partie naturelle, en partie miraculeuse, et qu'elle avait été envoyée de Dieu à cet enfant, pour consoler les chrétiens affligés par les Turcs. Figurez-vous quelle consolation, et quel rapport de cette dent aux chrétiens ni aux Turcs. En la même année, afin que cette dent d'or ne manquât pas d'historiens, Rullandus en écrit encore l'histoire. Deux ans après, Ingolsteterus, autre savant, écrit contre le sentiment que Rullandus avait de la dent d'or, et Rullandus fait aussitôt une belle et docte réplique. Un autre grand homme, nommé Libavius, ramasse tout ce qui avait été dit de la dent, et y ajoute son sentiment particulier. Il ne manquait autre chose à tant de beaux ouvrages, sinon qu'il fût vrai que la dent était d'or. Quand un orfèvre l'eut examinée, il se trouva que c'était une feuille d'or appliquée à la dent, avec beaucoup d'adresse ; mais on commença par faire des livres, et puis on consulta l'orfèvre. »
En 1593, le bruit courut que, les dents étant tombées à un enfant de Silésie, âgé de sept ans, il lui en était venue une d'or à la place d'une de ses grosses dents. Horstius, professeur en médecine dans l'université de Helmstad, écrivit en 1595 l'histoire de cette dent, et prétendit qu'elle était en partie naturelle, en partie miraculeuse, et qu'elle avait été envoyée de Dieu à cet enfant, pour consoler les chrétiens affligés par les Turcs. Figurez-vous quelle consolation, et quel rapport de cette dent aux chrétiens ni aux Turcs. En la même année, afin que cette dent d'or ne manquât pas d'historiens, Rullandus en écrit encore l'histoire. Deux ans après, Ingolsteterus, autre savant, écrit contre le sentiment que Rullandus avait de la dent d'or, et Rullandus fait aussitôt une belle et docte réplique. Un autre grand homme, nommé Libavius, ramasse tout ce qui avait été dit de la dent, et y ajoute son sentiment particulier. Il ne manquait autre chose à tant de beaux ouvrages, sinon qu'il fût vrai que la dent était d'or. Quand un orfèvre l'eut examinée, il se trouva que c'était une feuille d'or appliquée à la dent, avec beaucoup d'adresse ; mais on commença par faire des livres, et puis on consulta l'orfèvre. »
Fontenelle, Première dissertation, chapitre IV, 1686
Cochez la bonne réponse.
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Forme particulière du registre comique, le registre satirique est lié à la visée de l'œuvre : faire rire aux dépens d'une institution ou d'un groupe social, ici les pseudo-savants, plus préoccupés à se disputer qu'à analyser. Le rire est mis au service d'une thèse, d'un combat contre l'ignorance.
On parle de registre comique, lorsque ce qui provoque le rire naît d'une situation, d'un comportement, d'un caractère, d'un geste, d'un mot, sans forcément d'intention critique. Le registre didactique vise lui à enseigner.
On parle de registre comique, lorsque ce qui provoque le rire naît d'une situation, d'un comportement, d'un caractère, d'un geste, d'un mot, sans forcément d'intention critique. Le registre didactique vise lui à enseigner.
Exercice n°10
Quelle est la thèse défendue par Rousseau dans la lettre suivante ?
Lettre au Comte de Lastic
« [...] J'espère qu'ayant à vous offrir des excuses et de l'argent, ma lettre ne saurait être mal reçue. J'apprends que Mlle de Cléry a envoyé de Blois un panier à une bonne vieille femme, nommée Mme Levasseur, et si pauvre qu'elle demeure chez moi ; que ce panier contenait, entre autres choses, un pot de vingt livres de beurre ; que le tout est parvenu, je ne sais comment, dans votre cuisine ; que la bonne vieille, l'ayant appris, a eu la simplicité de vous envoyer sa fille, avec la lettre d'avis, vous redemander son beurre, ou le prix qu'il a coûté ; et qu'après vous être moqués d'elle, selon l'usage, vous et Mme votre épouse, vous avez, pour toute réponse, ordonné à vos gens de la chasser. J'ai tâché de consoler la bonne femme affligée, en lui expliquant les règles du grand monde et de la grande éducation ; je lui ai prouvé que ce ne serait pas la peine d'avoir des gens, s'ils ne servaient à chasser le pauvre, quand il vient réclamer son bien ; et, en lui montrant combien juste et humanité sont des mots roturiers, je lui ai fait comprendre, à la fin, qu'elle est trop honorée qu'un comte ait mangé son beurre. Elle me charge donc, Monsieur, de vous témoigner sa reconnaissance de l'honneur que vous lui avez fait, son regret de l'importunité qu'elle vous a causée, et le désir qu'elle aurait que son beurre vous eût paru bon. Que si par hasard il vous en a coûté quelque chose pour le port du paquet à elle adressé, elle offre de vous le rembourser, comme il est juste. Je n'attends là-dessus que vos ordres pour exécuter ses intentions, et vous supplie d'agréer les sentiments avec lesquels j'ai l'honneur d'être, etc. »
Jean-Jacques Rousseau, décembre 1754
Cochez la bonne réponse.
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Cette lettre de Rousseau est un bon exemple d'une stratégie argumentative reposant sur l'emploi de l'implicite. En effet, sur le plan formel, tous les indices d'une lettre de remerciement et les marques de respects sont présents. Mais le lecteur perçoit vite la subjectivité de Rousseau et certains termes employés dans une tonalité ironique (« elle est trop honorée qu'un comte ait mangé son beurre », « le désir qu'elle aurait que son beurre vous eût paru bon ») lui confirment que Rousseau ne cherche pas du tout à convaincre ou persuader le comte de Lastic, mais bien à lui marquer le mépris qu'il a pour sa conduite (« avec lesquels j'ai l'honneur d'être, etc. »).