Question problématisée (10 points)
La mondialisation se traduit par une intensification des flux de toute nature, qui entraîne une mise en connexion des différents espaces à toutes les échelles. Les flux matériels désignent le transfert de matières premières, de produits manufacturés ou de personnes par un moyen de communication matériel. Les flux immatériels (flux financiers, flux d'informations et de services) relient également les pays entre eux. Ces flux empruntent de grandes routes à l'échelle mondiale. Pour les marchandises, il s'agit essentiellement de routes maritimes qui traduisent ainsi le processus de maritimisation de l'économie et accompagnent la littoralisation de la production, c'est-à-dire le processus de concentration des activités productives sur les littoraux. La littoralisation des espaces productifs favorise-t-elle l'explosion des flux d'échanges matériels et immatériels ? Après avoir analysé l'importance des espaces productifs littoraux dans la mondialisation, nous aborderons le rôle que jouent les flux maritimes dans leur organisation.
Dans un premier temps, les espaces productifs littoraux sont des espaces dynamiques de la mondialisation.
D'abord, les littoraux – zones de contact entre la terre et la mer – sont globalement des zones densément peuplées. Ainsi, la moitié de la population mondiale habite à moins de 100 km d'un littoral. Ces espaces sont fortement urbanisés : ainsi, deux des trois mégalopoles mondiales sont situées sur les littoraux (celles des États-Unis et du Japon). Cette densité de peuplement sur les littoraux contribue à leur attractivité, car elle induit une concentration des lieux de consommation et des activités économiques.
Parmi ces dernières, la production se concentre du plus en plus sur les littoraux. Cette proximité permet aux unités productives de gagner du temps dans l'importation des matières premières et dans l'exportation de produits transformés. Cela conduit à l'émergence de zones industrialo-portuaires (ZIP), de grands ports qui associent logistique et industrie : des raffineries de pétrole, des usines chimiques, sidérurgiques ou agroalimentaires côtoient d'immenses plateformes de stockage de marchandises. En France, la première ZIP est créée à Dunkerque en 1963.
Ces littoraux aménagés connectent leur arrière-pays aux échanges mondiaux. Ainsi, de grandes façades maritimes sont devenues des territoires dynamiques de la mondialisation : elles jouent un rôle d'interface en permettant de connecter leur arrière-pays (hinterland) au reste du monde. Par exemple, la Northern Range concentre les principaux ports européens du Havre à Hambourg : elle constitue une véritable porte d'entrée en Europe.
C'est pourquoi la littoralisation des espaces productifs est l'une des conséquences de la mondialisation. Elle favorise l'explosion des flux maritimes, qui jouent un grand rôle dans l'organisation des zones portuaires.
Dans un second temps, les flux matériels et immatériels connaissent une forte intensification qui traduit la mise en connexion des espaces induite par la mondialisation. Les flux de marchandises ont été multipliés par 8 depuis les années 1980. Les flux immatériels connaissent une forte croissance, notamment grâce aux nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC).
La littoralisation des activités productives favorise l'explosion des flux. En effet, le transport maritime connaît un formidable essor : plus de 85 % des flux matériels transitent par des zones portuaires. Cet essor est permis par des progrès techniques : les navires se sont spécialisés, la conteneurisation s'est généralisée à l'ensemble de la planète et la taille des navires a fortement augmenté.
L'explosion des flux de toute nature joue un rôle sur l'organisation des espaces productifs littoraux. Pour s'adapter au gigantisme des navires et à la conteneurisation, les espaces portuaires connaissent de profondes mutations : les ports s'agrandissent et installent d'immenses avant-ports pour répondre à la croissance de la taille des navires. Pour optimiser le temps de chargement et de déchargement, ils ont de plus en plus recours à l'automatisation. Des plateformes multimodales s'y développent afin de faciliter le passage d'un mode de transport à l'autre.
Par ailleurs, cette explosion des flux maritimes dans le cadre de la mondialisation induit une hiérarchisation des espaces littoraux productifs à toutes les échelles. Ainsi, à l'échelle mondiale, les vingt premiers ports mondiaux assurent la moitié du trafic mondial. Douze des 20 premiers ports mondiaux sont chinois et polarisent les échanges de produits manufacturés. En effet, l'Asie orientale assure 40 % du trafic mondial des conteneurs. Les principaux ports mondiaux, situés à proximité de mégalopoles, polarisent également les flux immatériels : ainsi, Tokyo, Shanghai et Shenzhen font partie des 10 premières bourses mondiales. En outre, à l'échelle locale, l'exacerbation de la concurrence entre les espaces oblige les grands ports à se moderniser sans cesse.
Pour conclure, la littoralisation des espaces productifs favorise l'explosion des flux d'échanges matériels et immatériels. L'installation de zones industrialo-portuaires permet un gain de temps et une compétitivité accrue, accentuée par les progrès techniques dans le domaine maritime (taille et spécialisation des navires, conteneurisation). Ce processus aboutit également à une mise en concurrence et à une hiérarchisation des espaces littoraux, qui bénéficie à l'Asie orientale, première façade maritime mondiale devant la Northern Range et les façades maritimes nord-américaines.