Quelles options stratégiques pour les entreprises ?


Fiche

L'entreprise peut segmenter l'ensemble de ses activités en différents domaines d'activité stratégique (DAS) dans lesquels sont menées des stratégies adaptées. Les choix stratégiques s'opèrent donc au niveau global (spécialisation, diversification) et au niveau de chacun des domaines d'activités (construction de l'avantage concurrentiel par différenciation-sophistication-épuration ou par domination par les coûts, choix de marchés pertinents, etc.). Le caractère éphémère de l'avantage concurrentiel (incertitude de l'environnement, intensité de la concurrence, rythme des innovations technologiques, etc.) est mis en évidence. Les choix portent également sur les maillons de la chaîne de valeur que l'entreprise souhaite maîtriser (intégration, externalisation) et sur les modalités de son développement (croissance externe, croissance interne, partenariats), y compris à l'international. Les impacts des technologies numériques (plateformes et réseaux numériques mondiaux, données massives et intelligence artificielle, etc.) sont pris en compte dans l'élaboration des choix stratégiques.
I. L'avantage concurrentiel et la stratégie globale
1. L'avantage concurrentiel
L'avantage concurrentiel permet à une entreprise de se démarquer de ses concurrents. Il s'agit d'une ressource, d'une compétence, d'un positionnement ou de tout autre élément permettant à l'organisation d'être perçue par ses clients comme meilleure que les autres entreprises du marché. Une entreprise peut avoir un ou plusieurs avantages concurrentiels.
L'entreprise Dell a longtemps bénéficié d'un avantage concurrentiel lié à sa capacité à proposer des ordinateurs sur mesure à ses clients, notamment les professionnels. Google est leader des moteurs de recherche du fait de sa rapidité et de la pertinence des résultats.
Un avantage concurrentiel est souvent temporaire parce qu'il peut être imité par les concurrents ou dépassé (innovation technologique, nouveau produit substituable…).
Une veille stratégique, concurrentielle et technologique doit permettre à l'entreprise d'anticiper les évolutions de ses marchés et de préserver ses avantages concurrentiels. Cela passe également par une recherche permanente de l'innovation qui concerne aussi bien les produits qu'elle propose, les procédés de fabrication, les débouchés et les sources d'approvisionnement.
Microsoft est par exemple leader incontesté des systèmes d'exploitation sur PC (Windows), mais doit veiller à le rester en améliorant sans cesse ses produits pour garder une longueur d'avance sur ses concurrents (Linux…).
2. La spécialisation
Les choix stratégiques de l'organisation s'opèrent au niveau global sur la base d'une stratégie qui consiste pour l'organisation à se spécialiser ou se diversifier.
La stratégie de spécialisation consiste à ne produire qu'un seul type de biens ou de services.
Par exemple, les salons Tchip sont spécialisés dans la coiffure à bas prix.
Dans ce cadre, l’entreprise exerce donc un métier unique sur lequel elle peut plus facilement développer un avantage concurrentiel.
Avantages
• Elle permet de développer un savoir-faire spécifique dans un métier précis.
• La stratégie est plus facile à définir et donc plus lisible pour les partenaires et parties prenantes (actionnaires, banques, salariés…).
Inconvénients
• Forte dépendance à un marché ou à un produit qui fait courir un risque important en cas de rupture subie (innovation technologique majeure, effondrement de la consommation du produit proposé, émergence d'un concurrent important…).
3. La diversification
La stratégie de diversification est une stratégie globale qui consiste, à l'inverse de la spécialisation, à produire plusieurs types de produits qui répondent à des besoins différents.
Par exemple, les enseignes de la grande distribution (Carrefour, Leclerc…) développent, en plus de leurs activités traditionnelles (magasins…), des services bancaires ou des prestations de voyage.
Avantages
• Cette stratégie permet de répartir les risques de marché (baisse de la consommation, apparition d'un produit substituable…) sur plusieurs produits.
• Elle permet d'exploiter un avantage compétitif sur plusieurs produits (La Poste se lance dans la téléphonie mobile pour tirer avantage de son réseau de bureaux de poste…).
• Elle permet d'exploiter des synergies lorsque les métiers sont liés (Free se diversifie dans le mobile, mais exploite des fonctions communes avec son activité de fournisseur d'accès à Internet : service clients, savoir-faire dans la relation client…).
Inconvénients
• Cette stratégie peut brouiller l'image et l'identité de l'entreprise aussi bien en interne pour ses salariés que pour ses clients.
• Plusieurs métiers impliquent plusieurs stratégies et donc des investissements démultipliés et isolés.
II. Les domaines d'activité stratégiques (DAS) et la stratégie de domaine
1. Les DAS
Les décisions stratégiques de l'organisation sont d'abord prises au niveau global, puis par métier pour les entreprises ou par mission pour les organisations sans but lucratif.
Le métier d'une entreprise correspond au savoir-faire qu'elle maîtrise afin de produire des biens ou services. Le DAS est un groupe d'activités ou de produits homogène.
Par exemple, la téléphonie mobile et la fourniture d'un accès Internet sont deux DAS de l'entreprise Orange.
2. La domination par les coûts
La stratégie de domination par les coûts est une stratégie de domaine qui consiste à rechercher systématiquement des sources d'économie tout au long du processus de production (de la conception jusqu'au service après-vente) pour proposer aux clients des produits au meilleur prix.
La diminution des coûts est une priorité pour toutes les organisations, et ce, pour de nombreuses raisons : la maximisation des profits pour les actionnaires, l'augmentation des rémunérations, le financement des investissements…
Cet axe d'action est également une stratégie à part entière parce qu'elle constitue un positionnement stratégique et mercatique dont la manifestation la plus répandue est le modèle discount ou low cost.
Ce modèle est présent dans de nombreux secteurs d'activité : la grande distribution (Aldi, Leader Price…), le transport aérien (Ryanair…), le transport ferroviaire (iDTGV, Ouigo), l'automobile (la marque Dacia de Renault…).
Avantages
• Elle permet de pénétrer rapidement un marché même lorsqu'il semble saturé.
• Elle permet de satisfaire une partie des consommateurs ignorés auparavant ou dont l'importance a été sous-évaluée.
Inconvénients
• Positionnement commercial spécifique qui consiste à s'adresser à une partie des consommateurs seulement.
• La réduction des coûts implique de rechercher constamment des économies et notamment dans le domaine social (rémunérations, conditions de travail…), ce qui peut nuire à la performance globale de l'entreprise (économique et sociale).
3. La différenciation
La stratégie de différenciation est une autre stratégie de domaine. Elle consiste à proposer des produits (biens ou services) qui seront perçus comme différents et, bien sûr, meilleurs que ceux proposés par les concurrents. Cette stratégie repose sur le besoin ou l'envie des clients de consommer et de s'afficher avec des produits distinctifs. La différenciation est une préoccupation majeure des entreprises en rupture avec la standardisation des produits de la première moitié du xxe siècle (« Ils auront une voiture de la couleur qu'ils souhaitent, pourvu qu'elle soit noire », affirmait Henry Ford).
Cette différenciation peut se fonder sur une innovation technologique (les aspirateurs silencieux de Dyson), un mode de distribution innovant, le conditionnement des produits (la bouteille en verre qui purifie l'eau, la compote en gourde), les services qui accompagnent le bien (les extensions de garantie, les assurances, les services de remplacement immédiat du bien défectueux ou cassé…).
Avantages
• Cette stratégie permet de se démarquer des concurrents et de capter une partie du marché.
• Elle permet également de fidéliser les clients en renouvelant et en améliorant l'offre en permanence.
Inconvénients
• Se différencier et faire évoluer son offre comprend une part de risque dans la mesure où, dans l'absolu, rien ne garantit que cette offre suscitera l'adhésion des clients.
III. La chaîne de valeur : intégration et externalisation
1. L'intégration
La stratégie d'intégration consiste à développer l'entreprise en absorbant les activités complémentaires, en amont du processus de production (tournées vers les fournisseurs et les approvisionnements) ou bien en aval (tournées vers les distributeurs). On parlera dans ces cas d'intégration verticale.
C'est le cas de l'entreprise Total (qui produit et distribue des carburants) lorsque cette entreprise achète des concessions (droit d'exploiter des gisements) ou des raffineries. C'est aussi le cas de l'entreprise Bonduelle lorsqu'elle devient propriétaire de grandes parcelles de terres agricoles en Russie ou aux États-Unis afin d'assurer ses approvisionnements.
L'intégration peut dans certains cas être horizontale. Par exemple lorsqu'une entreprise rachète des entreprises concurrentes pour atteindre une taille permettant de réaliser des économies d'échelle. Ce poids va permettre d'assurer à l'organisation une position de force dans ses rapports avec ses partenaires.
Avantages
• Elle permet une meilleure maîtrise du processus de production puisque l'ensemble de la chaîne est sous le contrôle direct de l'entreprise.
• Elle assure la sécurisation des approvisionnements et l'indépendance à l'égard des fournisseurs.
• Elle autorise un meilleur contrôle de la relation avec les clients (prix pratiqués, positionnement des produits, garanties, SAV…).
• Elle permet l'absorption de la marge des fournisseurs et des distributeurs.
Inconvénients
• L'entreprise est plus complexe et plus coûteuse à gérer du fait des nombreuses étapes intégrées du processus de production (ce que l'on appelle « les coûts de coordination »).
• Risque d'avoir une organisation de la production peu réactive et peu flexible.
• Lourdeur des investissements à assurer tout au long du processus de production.
2. L'externalisation
La stratégie d'externalisation consiste à transférer une partie de l'activité ou des fonctions de l'entreprise (production, comptabilité, gestion des ressources humaines, entretien des locaux…) à une autre entreprise. Il peut s'agir d'une externalisation de spécialité pour bénéficier d'un savoir-faire que l'entreprise maîtrise moins bien que son prestataire.
Par exemple, les fabricants informatiques font produire leurs microprocesseurs par deux grandes firmes concurrentes, Intel et AMD.
Il peut aussi s'agir d'une externalisation de capacité pour disposer des possibilités et des faibles coûts de production d'une entreprise prestataire sans que celle-ci maîtrise un savoir-faire particulier.
Par exemple, l'externalisation des services de livraison à domicile pour les enseignes de la grande distribution (Conforama, But…).
Avantages
• Cette stratégie permet de faire des économies en recourant à un prestataire spécialisé, et donc efficace, dans son domaine d'activité. Dans le cas d'une externalisation de spécialité, elle permet de bénéficier d'un savoir-faire particulier non disponible en interne.
• Elle permet également de rendre les coûts de production plus flexibles en s'ajustant plus rapidement à l'évolution de la demande (il est plus simple et rapide de réduire le niveau des commandes que de réorganiser la production en interne).
• En externalisant certaines fonctions ou une partie de la production, l'entreprise peut se concentrer sur son cœur de métier et développer plus facilement un avantage concurrentiel (la conception et l'assemblage des véhicules pour les constructeurs d'automobiles).
• La complexification des technologies et la numérisation de l'économie nécessitent parfois de recourir à des partenaires externes pour conduire des projets innovants…
Inconvénients
• L'entreprise qui externalise une partie de sa production perd également la maîtrise des fonctions externalisées. Elle devient dépendante de ses fournisseurs, elle doit s'assurer de la qualité de leurs produits, de la pérennité de ces entreprises…
• L'entreprise donneuse d'ordre peut être amenée à communiquer des informations sur ses processus, ses méthodes, voire ses secrets de fabrication, à l'entreprise sous-traitante. Le prestataire doit s'engager à ne pas divulguer ces techniques et à ne pas en faire usage pour d'autres clients.
En se recentrant sur son cœur de métier, l'entreprise risque également d'externaliser des fonctions clés (recherche et développement, système d'information, ressources humaines…), ce qui pourrait la fragiliser. Elle doit veiller à conserver son avantage concurrentiel et à n'externaliser que les fonctions non stratégiques.
IV. Les modalités de développement
1. La croissance
La croissance est un processus par lequel l'entreprise change de dimensions (augmentation de l'effectif, augmentation des parts de marché…).
La croissance interne est le fruit d'un développement de l'activité propre à l'entreprise. Cela consiste, pour l'entreprise, à développer ses capacités et ses compétences, en interne, grâce à l'acquisition de nouveaux actifs : machines, ateliers, laboratoires, brevets… On compare ce mécanisme au phénomène de croissance d'un organisme vivant (plante ou animal). C'est une modalité de développement adaptée aux PME.
La croissance externe consiste, pour l'entreprise, à développer ses capacités et ses compétences en s'associant à d'autres entreprises. Sur le plan juridique, ce mode de croissance peut se réaliser par la prise de participation (la société achète une partie d'une autre société) ou par la fusion (deux sociétés fusionnent pour créer une nouvelle société). La croissance externe peut être inaccessible pour des PME ou des entreprises trop endettées.
2. L'internationalisation
L'internationalisation est une stratégie consistant à rechercher l'implantation de l'entreprise sur de nouveaux marchés étrangers. L'entreprise dispose de 3 modalités pour s'internationaliser :
L'exportation consiste à vendre directement ses produits dans un pays étranger en passant par un distributeur local. Elle nécessite peu d'investissements (coûts du transport, droits de douane…)
Le partenariat avec une entreprise locale limite les risques liés à la méconnaissance de l'autre pays. Dans certains cas, c'est une nécessité, car les investissements directs ne sont pas possibles.
L'investissement direct à l'étranger consiste à créer une filiale ou à racheter une entreprise à l'étranger. Nécessite d'évaluer précisément le « risque pays » (politique, économique, climatique…)
À retenir
Pour l'entreprise, le diagnostic stratégique aboutit à l'identification d'un ou de plusieurs avantages concurrentiels sur lesquels les choix stratégiques reposent. Toutefois, ces avantages concurrentiels sont susceptibles d'être remis en cause à tout moment.
Malgré la diversité des stratégies observables, il est possible de les regrouper autour de quelques stratégies types : spécialisation et diversification, domination par les coûts et différenciation, intégration et externalisation.
Ces stratégies ne sont pas toutes exclusives les unes des autres : une entreprise peut par exemple mener parallèlement une stratégie de spécialisation et d'externalisation, ou une stratégie de domination par les coûts et d'intégration.
Les choix stratégiques portent enfin sur les modalités de développement de l'organisation par le biais de croissance externe ou interne, mais également par le choix de l'internationalisation sous forme de partenariats par exemple.
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