La France vaincue est dirigée de juillet 1940 à août 1944 par le maréchal Pétain. Installé à Vichy, cet homme déjà âgé (il a 84 ans en 1940) entend remettre le pays au travail. Comment le régime de Vichy peut-il espérer redresser une nation qui est en fait soumise à l'Allemagne ?
I. Un régime né de la défaite
1. Une défaite rapide
• L'attaque allemande du 10 mai 1940 surprend l'armée française à travers les Ardennes : la percée du général Guderian à Sedan perfore la défense française. La Wehrmacht, l'armée allemande, progresse rapidement vers la capitale. En juin, la retraite est générale. La désorganisation est totale, d'autant plus que, sous les bombardements allemands, des millions de civils français fuient l'avance ennemie et s'ajoutent aux soldats sur les routes : c'est l'exode.
2. La signature de l'armistice
• Dans un discours radiodiffusé le 17 juin, le vainqueur de Verdun, le maréchal Pétain, nommé président du Conseil après Paul Reynaud, annonce aux Français qu'il a demandé l'armistice. Celui-ci est signé à Rethondes le 22 juin et entre en vigueur le 25 juin 1940. Il laisse à la France un gouvernement et son empire, mais coupe le pays en deux : le Nord (55 % du territoire) est une zone occupée par les Allemands, le Sud reste une zone libre. L'Alsace et la Lorraine sont rattachées au Reich. À Londres, le général de Gaulle a lancé à la radio (BBC), le 18 juin, un appel à la résistance.
3. Un nouveau régime
• Le 10 juillet 1940, à Vichy, les députés confient à Philippe Pétain les pleins pouvoirs constitutionnels. Celui-ci met fin à la IIIe République et instaure l'État français.
II. La Révolution nationale
1. Un régime réactionnaire
• Une fois au pouvoir, Pétain veut restaurer l'autorité de l'État et remettre le pays au travail. Le 25 juin 1940, il annonce ainsi ses ambitions : « C'est à un redressement intellectuel et moral que d'abord je vous convie. Français, vous l'accomplirez, et vous verrez, je vous le jure, une France neuve surgir de notre ferveur. »
• Rejetant la devise républicaine « Liberté, égalité, fraternité » et la démocratie, il supprime le suffrage universel et les partis politiques. La France doit se tourner vers des valeurs traditionnelles : le patriotisme, la famille, la religion. « Travail, famille, patrie » devient la devise du nouveau régime. Les femmes doivent rester au foyer pour éduquer les enfants ; on met en valeur la fête des Mères et on décore les parents de famille nombreuse. Le travail des paysans est cité en exemple : « La terre, elle, ne ment pas. […] Elle est la patrie elle-même. » Les Français, enfin, sont invités à retourner vers la religion catholique.
• Dans les écoles, les enfants participent à des chantiers de jeunesse, où ils reçoivent une éducation sportive, mais aussi patriotique et morale.
De plus, le maréchal développe autour de lui un véritable culte de la personnalité : chansons (« Maréchal, nous voilà ! »), portraits dans toutes les classes, etc.
De plus, le maréchal développe autour de lui un véritable culte de la personnalité : chansons (« Maréchal, nous voilà ! »), portraits dans toutes les classes, etc.
2. Vichy, un régime autoritaire
• Dès ses débuts, le régime a supprimé la liberté de la presse et le droit de grève, interdit les partis et les syndicats. Pour Pétain, le pays ne peut se relever, en effet, que s'il est uni. Les fonctionnaires doivent prêter serment. L'État favorise le corporatisme.
• Les dirigeants de la IIIe République, dont Léon Blum et Édouard Daladier, sont arrêtés et jugés en 1942, au procès de Riom : le régime les accuse de n'avoir pas préparé la France à la guerre.
3. Un régime d'exclusion
• Dès le mois d'octobre 1940, Vichy prend l'initiative de promulguer des lois antisémites (l'accès à certains métiers est désormais interdit aux Juifs) : c'est le statut des Juifs, qui fait d'eux des citoyens de seconde zone. En juin 1941, le recensement des Juifs est obligatoire ; un an plus tard, ils doivent porter une étoile jaune. Plus tard, on les livre aux Allemands.
III. Le durcissement du régime
1. L'illusion de la collaboration
• En serrant la main de Hitler le 24 octobre 1940 à Montoire, Pétain entend lui témoigner le soutien de la France. Il espère en retour l'indulgence du vainqueur. Le régime de Vichy tente d'atténuer les clauses de l'armistice. Persuadé de la victoire finale de l'Allemagne, le maréchal Pétain entame une politique de collaboration de sa propre initiative. Cela n'empêche pas Hitler, le 11 novembre 1942, alors que les Alliés viennent de débarquer au Maroc et en Algérie, d'envahir la zone dite « libre ».
2. L'État policier
• Très favorable aux Allemands, Pierre Laval dirige le gouvernement français à partir d'avril 1942. Il multiplie les initiatives dans le cadre de la politique de collaboration d'État ; l'Allemagne ayant besoin de main-d'œuvre, il instaure la relève (un prisonnier français libéré contre l'envoi de trois travailleurs français en Allemagne) en 1942, puis le STO, le service du travail obligatoire, un an plus tard.
• La politique d'exclusion à l'encontre des Juifs devient une politique de persécution. La police française aide les Allemands à pourchasser les Juifs (rafle du Vel'd'Hiv' des 16-17 juillet 1942), les francs-maçons et les étrangers, qui sont enfermés dans des camps d'internement, avant d'être envoyés dans les camps de concentration. Sur les 300 000 Juifs habitant en France en 1939, 75 000 ont été déportés.
• En 1943, Laval crée la Milice, une organisation paramilitaire qui lutte contre les résistants, main dans la main avec les Allemands. Certains combattent même sous uniforme allemand dans la LVF, la Légion des volontaires français, contre le bolchevisme et finissent dans la division SS Charlemagne. Le régime de Vichy n'a plus aucune autonomie.
3. La fin du régime
• Pour la grande majorité des Français, la préoccupation quotidienne reste l'approvisionnement en nourriture. Les familles sont soumises au rationnement ; les vivres et les produits de consommation courante se font rares.
• Vichy est de plus en plus clairement soumis aux Allemands. Après le débarquement des Alliés en Normandie, l'occupation se durcit ; en représailles contre les actions de la Résistance, la division SS Das Reich massacre, le 10 juin 1944, la population du village d'Oradour-sur-Glane (642 hommes, femmes et enfants).
• Le 2 juin 1944, le général de Gaulle proclame le gouvernement provisoire de la République française. À cette date, le régime de Vichy a en fait cessé, depuis longtemps, d'exercer un véritable pouvoir. En août 1944, Pétain, Laval et quelques autres sont emmenés par les Allemands dans leur retraite, à Sigmaringen, en Allemagne.
• En France, pendant l'été 1945, l'« épuration » s'organise : les collaborateurs sont pourchassés (certains sont exécutés sans jugement). Pétain, qui est rentré en France, est condamné à mort, mais sa peine est commuée en détention perpétuelle par de Gaulle. Laval et d'autres collaborateurs sont exécutés. Il faudra du temps pour que les Français puissent se réconcilier et prennent la pleine mesure de ce qu'est cette triste période de leur histoire : les « années noires ».
Exercice n°1
En juillet 1940, le maréchal Pétain met en place l'État français. Quelle est la devise de ce nouveau régime ?
Cochez la bonne réponse.
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La devise du régime de Vichy montre bien à quel point il s'agit d'un régime autoritaire traditionnel, fondé sur des valeurs morales de droite classique. En même temps, cette devise manifeste le rejet d'un prétendu « laxisme » dû au Front populaire, qui aurait conduit à la débâcle de 1940.
Exercice n°2
Complète les phrases suivantes.
Écrivez les réponses dans les zones colorées.
Dès juin 1940, la population fuit les troupes allemandes, c'est l'.
L'armistice est signé le 22 juin 1940 à .
Pétain collabore avec l'Allemagne nazie ; cette politique est symbolisée par sa rencontre avec Hitler le 24 octobre 1940 à .
L'armistice est signé le 22 juin 1940 à .
Pétain collabore avec l'Allemagne nazie ; cette politique est symbolisée par sa rencontre avec Hitler le 24 octobre 1940 à .
La célèbre poignée de main de Montoire entre Hitler et Pétain a largement été instrumentalisée par la propagande nazie à travers toute l'Europe.
Exercice n°3
Qui a pris l'initiative de la politique de collaboration avec l'Allemagne ?
Cochez la bonne réponse.
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La France n'est pas le seul pays occupé par les forces nazies. Il s'agit cependant du seul dont le gouvernement légal a pris l'initiative d'une collaboration d'État qui contribue fortement à l'effort de guerre allemand. C'est pourquoi les Alliés ont d'abord traité la France en ennemie, avant que de Gaulle ne renverse la perspective.